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27.01.2013

…Et pour une escalope

litteratureC’était à Lorient.
Une signature de mon bouquin Brassens, poète érudit, dans une librairie.

En mai et il faisait vraiment chaud. Patrick - mille fois hélas disparu le 26 octobre dernier - suait sous son indéfectible et noir chapeau et nous faisions de régulières escapades en face, à la terrasse d’un grand bistrot, pour nous y mouiller généreusement les amygdales de bières fraîches, en disant du mal du capitalisme et des gens de la finance.

J’étais derrière ma table et je me languissais. Des gens venaient, discutaient, trottinaient, palpaient le livre.

J’allais donc plier les gaules quand une petite femme aux allures pressées, qui, elle, allait passer son chemin sans me jeter le moindre regard et filer vers un autre destin, entraînant par la main une charmante fillette, s’arrêta tout net devant ma table en poussant un petit cri de franche surprise :

- Ah, Brassens !

- Eh oui…

Elle prit le livre, parcourut la quatrième, revint à la couverture, fit la moue et déclara :

- J’n’aime pas Brassens….

J’étais déçu. Cette petite bonne femme alerte m’était en effet soudainement sympathique.

-
Ça arrive, dis-je, comme un vrai corniaud
- Enfin, c’est pas que j’n’aime pas. C’est que je n'comprends pas tout. Voilà.

-
Ça arrive aussi, m’entendis-je récidiver comme un triple idiot, vraiment fatigué par la chaleur et le houblon.
- Mais vous savez quoi ?

- Ben non…

- Je vais vous en  acheter deux…

Je ne saisissais pas bien. Retrouvant un semblant d’esprit, je m’interposai tout sourire :

- Il ne faut pas acheter des livres qu’on…. Qu’on n’aime pas.

Il faisait vraiment trop chaud ou alors nous avions trop forcé sur les demis. J‘avais failli dire qu’on ne comprend pas.

- Oui, mais mon mari est un vrai mufle, un phallo qui ne fait rien à la maison, pas un plat, pas un coup de balai, n’étend jamais le linge, ne fait strictement rien des choses ménagères…Rien.

J’étais évidemment sidéré de tant de confidences spontanées, intimes et intempestives. J'’attendais la chute avec effroi.

La petite femme s’excitait.

Elle poursuivit :

- Il ne fait les courses que chez le boucher. C’est tout. Et vous savez pourquoi ?

- Ma foi, non, avouai-je, dépité.

Elle sembla s’agacer de tant d’ignorance de la part d’un écrivain.

- Eh ben, mon mari, il adore Brassens. Et le boucher aussi, et quand ils sont tous les deux, ils en profitent, ils  passent des temps infinis à parler de leur cher Brassens.

- Ah, c’est curieux, aggravai-je mon cas, des perles de sueur au front.

- C’est comme ça. Alors, vous allez m’en signer deux et je vais leur offrir.
Ça, ça va leur faire plaisir…
Je m’appliquai à deux belles dédicaces, remerciant in petto ce boucher-poète et ce bonhomme de mari phallocrate.

Brave dame ! Je la revois encore, tout excitée et tellement authentique !
Au dîner, je conseillai à Patrick de varier un peu et d’organiser parfois des signatures dans les boucheries charcuteries.
Il se trouve qu’il s’y trouve aussi des gens férus de poésie à notre goût.
 
Illustration : Patrick et Annie, à Vaisons-la-Romaine.

08:00 Publié dans Brassens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

24.01.2013

Marions les ! Marions les !

littérature, politique, écritureEn introduction de mon véritable propos, j’en remets une petite couche sur ce qui fait bander les socialistes - qui ont sans doute grand besoin de stimuli pour ce faire - depuis leur avènement au pouvoir et aux forceps.
Il faut tout d'abord dire que ces socialistes-là ne l’étant nullement dans les faits se voient contraints de l’être dans les idées. Le mariage homosexuel est donc une idée qui présente pour l’épicerie socialiste l’avantage incomparable de briller telle une enseigne hautement progressiste, voire révolutionnaire. C’est l’abolition de la peine de mort de Mitterrand, qui, elle, était vraiment une sortie du Moyen-âge par le haut de la loi.
Une idée révolutionnaire qui arrive à se frayer un chemin pour rentrer jusque dans la tête des imbéciles, forcément, cesse de l’être au risque qu’explosent ces têtes. Et alors que le véritable courage, la révolution des mœurs, consisterait à abolir cette infâme procédure d’Etat civil qui renferme l’amour et la jouissance des caresses dans un carcan de droits et de devoirs, ces cons-là proclament l’enfermement pour tous et surtout pour ceux qui jusqu’alors s’aimaient différemment.
Si, depuis plus de quarante ans que nous jetons un regard critique sur la politique et sur l’évolution du monde, nous n’étions aguerris intellectuellement aux tours de passe-passe des pouvoirs capables de vendre une merde pour une orange bien parfumée, les bras nous en tomberaient. Ils ne nous en tombent pas. Nous sommes presque amusés de les voir mentir par gesticulations, comme des gosses de récréation pris la main dans le sac.
Ce qui nous amuse moins, quand même, c’est cette jeune femme joliment court vêtue, au minois de poupée Barbie, qui, elle, porte-parole de surcroît de tout un magma d’indécisions, prétend rayer de la carte des trottoirs de France toutes les putains et abolir une fois pour toutes le plus vieux métier du monde. Décidément, les socialistes n’arrivant pas à faire la pige au grand capital et aux diktats de la finance - si tant est qu’ils en aient eu l’intention ailleurs que dans leurs fiches publicitaires -, impuissants qu’ils sont à juguler la misère et l’ennui des gens, sont très préoccupés de ce qui se passe dans les profondeurs de leurs pantalons et de comment leurs administrés ont le plaisir de vivre leur plaisir !
Je n’aimerais pas faire l’amour avec une socialiste ! J’aurais bien trop peur de commettre une faute punissable!
Car on croît rêver ! Bientôt, le pauvre bougre esseulé dans une ville sans âme et sans humains à qui tendre la main, en plein désarroi d’humanité et qui ira acheter l’illusion d’une demi-heure de tendresse dans les bras d’une professionnelle, sera un délinquant aux yeux de la prude ministre et devra répondre de son intempestive bandaison devant un chat fourré somnolent, le coude négligemment appuyé sur un code pénal.
Elle se fout du monde, hein ? Est-ce que par hasard ces filles ne lui rendraient pas une image négative, pas propre pour un sou d’elle-même parvenue au pinacle du spectacle politique à peine sortie de l’œuf et n’ayant jusqu’alors rien prouver sinon un certain talent à grenouiller dans les coulisses, au point qu’elle veuille les supprimer du champ social ? Ça n’est pas impossible, après tout. Supprimez mon image, vous supprimerez mon fait !
Misère !
Et comment vendre cette bouillie à un électorat béat ? C’est fort simple, en se faisant, en bonne  socialiste de l’amalgame, l’avocat de la veuve et de l’orphelin : les putains sont toutes des filles tombées dans le ruisseau et sous la coupe d’immondes proxénètes qui les exploitent, les battent et tirent profit d’un infect commerce.
Si le fait existe, madame, c’est que vous n’arrivez pas à faire respecter la loi et que, conséquemment, vous n’avez rien à faire là et surtout vous êtes incompétente pour prétendre en pondre de nouvelles, lois. Car le proxénétisme - délinquance effectivement abjecte - est interdit et fortement puni par la justice.
Mais vous ne connaissez absolument rien,
sinon ce que vous savez de vous-même, aux filles que vous voulez supprimer et vous jetez le bébé avec l'eau du bain. Et celles qui exercent leur petit métier de marchandes de plaisirs éphémères vous envoient certainement, avec toute l’éloquence populaire dont elles font parfois montre, les cinq lettres.
Mais soyons rassurés, nous autres, les méchants et les pervers. Les filles de joie existeront bien après que cette ministre de la feinte pudeur aura disparu du champ magnétique des mascarades et compromissions politiques.
Elle ne sera passée par ici, somme toute, que pour se couvrir de ridicule aux frais de la République.
Et gageons dès à présent que si les filles produisaient au fisc des déclarations en bonne et due forme, avec factures détaillées et nature des prestations fournies, le missionnaire à 5,5 % de TVA, par exemple, la fellation et la levrette à 20%, le cunnilingus et la sodomie, produits de luxe, taxés à 33%, madame la toute jeune ministre laisserait tomber le masque, mettrait sa morale dans sa poche et se retrouverait la première proxénète du royaume.



11:25 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, politique, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

14.01.2013

La violence historique - 4 -

littératurePlutôt que de titrer La violence historique, j’aurais sans nul doute été mieux inspiré de parler de violence insurrectionnelle, celle qui intervient quand les contradictions des intérêts sociaux ne peuvent plus trouver résolution que dans l’affrontement direct.
J’étais parti d’une phrase imbécile lue sur Robespierre, donc de la Révolution française et, plus précisément, de la Terreur, dont je demandais - et ce quel que soit le degré d’aversion qu’on puisse éprouver à son égard - qu’elle soit lue avec les yeux de l’époque révolutionnaire, c'est-à-dire le temps des coalitions militaires de toute l’Europe, des menaces d’invasion du territoire par ces  coalitions, du soulèvement de la Vendée, de l’entrée en dissidence d’une dizaine de grosses villes, dont Lyon, Nantes et Bordeaux, du manque de farine et de pain et cætera, et non avec les yeux "apaisés", éteints, morts, de la nôtre.
La  violence historique ne s’exprime donc évidemment pas que sur des barricades et par le renversement manu militari des pouvoirs en place. Elle s’exprime dans les attentats, les actes individuels, les lois liberticides, la brutalité du système financier, l’iniquité permanente du système économique, la pauvreté du plus grand nombre.
En entamant ce sujet que je vais sans doute clore aujourd’hui, il m’apparaissait évident que je me situais hors du champ politique tel qu’il est investi depuis l’instauration du suffrage universel, c’est-à-dire par des gens qui ne peuvent que trahir leur discours sitôt leurs fesses installées dans les fauteuils moelleux de la République. Ça me semblait évident car je ne m’adresse ni à des naïfs, ni à des militants pour une gestion sociale de la misère. Je m’adresse à des gens qui voient plus loin que le bout de leurs possibilités à terme, à des rêveurs, des poètes, des révoltés, des utopistes, des coléreux, des pour qui le masque du carnaval politique est définitivement tombé et qui réclament néanmoins encore le droit de vivre leur vie et d’émettre des opinions hors du cercle vicieux, mensonger, falsifié, des oppositions traditionnelles gauche, droite, centre et autres labels de la décomposition démocratique qui, depuis plusieurs siècles, ont fourni les preuves de leur vilenie.
Je pense et redis donc que la violence insurrectionnelle est le marque-page du grand livre de l’histoire, que c’est elle qui indique à qui veut bien lire ce livre sans les lunettes de ses intérêts immédiats, de ses peurs et de ses engagements dans la comédie politique, où nous en sommes réellement de la course de l’histoire.
Cette violence ne s’est pas exprimée en France depuis la Commune de Paris, que l’idéal démocratique noya dans le sang, le meurtre, les viols, les exécutions sommaires et de masse, les déportations.
Depuis, n’en déplaise aux démocrates progressistes qui se croient à la page parce qu’ils ont cessé de lire le monde, nous n’avons pas avancé d’un pouce et j’en veux pour preuve qu’aucun pouvoir, qu’aucun gouvernant, qu’aucune République, qu’aucun réformateur à la gomme n’a même songé, ne serait-ce qu’à titre symbolique, à débaptiser les avenues, les parcs et les rues des grandes villes qui honorent la mémoire infâme de cet infect boucher que fut Adolph Thiers.
Parce que la dernière grande déroute du peuple est là et que tout le reste s’est construit sur et grâce à cette déroute, avec l’aval de tous les opposants aux divers gouvernements.
D’ailleurs, si j’étais certain de les avoir encore à mon crédit, devant moi,  je parierais 20 ans de mon existence que la violence insurrectionnelle, quand elle refera immanquablement surface, trouvera devant elle, pour la conjurer dans le sang, des Thiers issus aussi bien de l'église Copé, Hollande, Mélenchon, Le Pen que de tout autre accapareur de la parole décadente. Toute cette clique se croise, se rencontre et se flagorne aux hasards des couloirs de parlements, des loges maçonniques, des remises de décoration, des commémorations et autres grandes kermesses républicaines.
Je  l’ai déjà dit : la violence est incontournable si l‘on veut changer de chapitre. Le reste n'est que tergiversation intéressée à la pérennité du désastre.
Le dilemme est dans le souhaitable ou non de cette violence et je me suis exprimé sur le sujet.
Et c’est parce qu’ils la croient définitivement muselée que les escrocs de la parole politique se croient du même coup autorisés à singer cette violence et à proposer dans leurs discours publicitaires les motifs mêmes sur quoi elle éclatera certainement.
Mais, comme dit l’autre, il y a déjà longtemps que je verrai le monde par en-dessous, côté racines des fraisiers.
Alors, j’en parle à mon aise… et il me reste surtout à vivre en dehors des controverses de salon. Profiter de la vie sans avoir à endosser la soutane et le goupillon de causes qui, à force d'être remises aux calendes, ne sont plus que causes de causeurs.

14:16 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

11.01.2013

Fontenelle et mézigue

Fontenelle.jpgFontenelle, alors quasiment centenaire, eut ce trait d’humour noir et de quasi triomphe qui m’est resté à l’esprit : Je n’ai plus d’ennemis, ils sont tous morts !
J'angoisse fortement, quarante ans avant d'avoir atteint l’âge canonique du philosophe, d’être bientôt contraint de lui emprunter son sarcasme en parlant de mes amis…
En attendant ce jour noir, je reprendrai lundi mes élucubrations sur La violence historique.
Je vous souhaite à tous un week-end bien vivant à tout point de vue !

10:47 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

10.01.2013

Chagrin, chagrin, chagrin !

1889163_13295277-pontnecro2-20121029-m114a.jpgJe vous parlais de violence historique… Qu’en ai-je à foutre de la violence historique ?
Ce matin, la violence, la violence du cœur, la vraie violence, la violence de la mort, vient de me frapper de plein fouet et je n’ai que des larmes à offrir au désespérant inconnu .
Un mail de sa compagne m’apprend que Patrick Clémence, mon premier éditeur, mais, bien au-delà, mon copain, mon camarade, mon ami, mon frère de l’anarchie joyeuse est décédé alors que j’étais en France pour la musique, le 26 octobre.
Il avait 64 ans.
Je ne savais pas. Je suis si loin !
Cet homme, ce poète, ce combattant, ce cœur ouvert à tous vents, je l’avais rencontré en 1999. Nous avions un livre en commun et un amour partagé pour Brassens, l’anarchie, la poésie, la joie de vivre…
Nous en avons éclusé des demis de bière ensemble et des petits vins de comptoir ! Un matin d'été à Mauzé-sur-le-Mignon, nous nous étions engouffrés dans un bistro  pour une première petite bière (dixit) avant de nous rendre à une signature de livres au Centre culturel et, là,  nous avions eu toutes les peines du monde à convaincre la tenancière que nous n'étions pas des frères jumeaux ! Je ne suis même pas certain qu'on ait réussi, à la convaincre...
Le monde vient de se vider d’un de ses chants les plus chers à mon oreille.
Lecteur, toi qui ne l’as pas croisé, tu peux, ici, pour moi, lui rendre un dernier hommage en regardant sa si bonne bouille et en écoutant son sourire voler aux rendez-vous du temps qui passe et qui tue. Tu peux également lire ici, q
uelques mots sur cet homme qui fut cher à mon coeur et qui, par-delà l'implacable camarde, le reste.
J’aimais cet homme d’une grande fraternité.
Chagrin.
Je hais la mort !


10:28 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

09.01.2013

La violence historique - 3 -

259-11.jpgLes hommes qui ne doutent jamais de leurs convictions - intellectuelles, mais aussi sensibles et viscérales - ne sont pas des hommes mais des réservoirs d’idéologie. Des ersatz de libre arbitre.
Je suis bien,  je suis à l’aise, avec certaines de mes idées, de mes visions de l’homme et du monde et pas vraiment convaincu de certaines autres qui, bien que je les sente très vivantes en moi depuis les primes aurores, ne me semblent pas toujours à leur place.
Profondément séduit par la pensée anarchiste dès l’adolescence, puis, un peu plus tard, par ses lumineuses remises à jour situationnistes, celles de Vaneigem bien plus que celles de Debord parce qu’ayant plus directement prise sur le sensible, j’ai parfois l’angoisse d’avoir toujours interprété le monde, ses contradictions et ses coercitions avec un compas réglé sur une théorie. D’autant que l’histoire depuis quelque quarante ans ne semble pas vraiment pressée de venir en vérifier le bien-fondé.
Ceci étant dit, j’ai trouvé exprimé dans le Traité de savoir vivre à l’usage des jeunes générations tout le sentiment du monde que j’exprimais moi-même confusément quant à la vie quotidienne, l’ennui, l’amour, l’amitié, le désir d’affranchissement des aliénations. Ce livre m’a enseigné que mon mal de vivre, que l’on a tendance à prendre adolescent pour une disposition individuelle à un romantisme de bon aloi, était partagé par des milliers de jeunes gens chez lesquels il avait à peu près les mêmes causes et les mêmes effets. Même découverte de ce sentiment dans La Société du spectacle, plus théorique et d’un abord beaucoup plus difficile, puis, des années plus tard, dans Le livre des plaisirs aussi bien que dans le Chevalier, la Dame, le Diable et la mort, bien après La Véritable scission dans l’internationale situationniste, donc, de 1972.
Mais je viens d’écrire une grosse bêtise en affirmant […] d’autant que l’histoire depuis quelque quarante ans ne semble pas vraiment pressée de venir en vérifier le bien-fondé. Car le nombre d’individus, parmi les pires ennemis de la pensée et de la pratique situationniste et anarchiste, qui se sont abreuvés à la source tarie du situationnisme, est absolument incalculable et les progrès de plus en plus inhumains du spectacle (soit la représentation de la vie vendue et vécue comme étant la vie elle-même) grand prédateur de l'authenticité de l’existence que nous connaissons  aujourd’hui - du moins pour ceux qui savent encore ce que veut dire connaître - sont décrits quasiment mots pour mots dans La Société du spectacle, publié en 1967.
On n’attend pas la révolution comme on attend le car, disait-on. Ben non… Mais s’agissait-il vraiment de révolution ? La révolution n’est-elle pas, d’abord, la mise en pratique individuelle de sa vie en la protégeant autant que faire se peut des grandes obligations sociales d’un monde renversé plutôt qu’un échange de coups de fusil ? Si des millions d’individus se mettaient en devoir de vivre leur vie, leurs désirs, leurs espoirs, tout ce qu’ils portent en eux de profondément personnel, au lieu de se calquer sur une survie prédéfinie par un système dont tout le monde sait, chaque jour un peu plus, qu’il est, à tout point de vue, aussi bien moral qu'intellectuel, entièrement fondé sur le faux, la révolution n’aurait-elle pas les moyens de se dispenser de la violence historique ?
Les situs ne disaient pas autre chose en écrivant sur les murs : Ne travaillez jamais !
Ce fut sans doute une erreur. Car la phrase culte de Vaneigem, refuser un monde où la certitude de ne pas mourir de faim s’échange contre celle de mourir d’ennui, a été entendue à sa juste profondeur, telle une bombe à retardement posée dans la cervelle anesthésiée des hommes. Elle a été entendue et les tenants spectaculaires du pouvoir spectaculaire, pour désamorcer la bombe, ont depuis quarante ans érigé la pire des aliénations, le travail, en valeur absolue, incontournable, puissante, unique, sans laquelle l’homme n’est plus un homme capable d’accéder au bonheur de vivre.
Ce qui, par essence, est antinaturel, contraignant, contraire à l’amour et à la jouissance, est présenté et vécu comme le plus grand des bonheurs. Les luttes sociales, du même coup, ne sont pas des luttes pour l’existence, mais contre l’existence. Et sur la scène spectaculaire où se joue la misère d'un monde, on assiste à un de ses actes les plus grotesques, celui où les esclaves réclament à grands cris le fouet que les maîtres n'ont même plus les moyens de leur donner, tout occupés qu'ils sont à faire fructifier pour eux seuls et autrement les cargaisons engrangées par plus de deux cents ans d'exploitation forcenée de la galère sociale.
C’est tout ce que
le monde renversé attendait des hommes pour continuer son renversement sur ce chemin qui, résolument, tourne le dos à la vie et s’en éloigne chaque jour un peu plus.
Avec la bénédiction de tous, maîtres, gardes-chiourmes et esclaves.
Dans de telles conditions, engager sa vie dans la violence historique pour remettre les choses à l’endroit, et ce envers et contre tous, me paraît aujourd’hui relever de la détresse du desesperado.
Il me semble beaucoup plus fructueux de protéger cette vie propre en lui faisant prendre les chemins de traverse et de solitude qui la préservent,
jusqu'à son dernier souffle, des affres de la résignation.

14:22 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

08.01.2013

La violence historique - 2 -

Hier, je terminais mon texte en citant deux représentants de la parole spectaculaire, Mélenchon et Zemmour. C’était une erreur de le clore ainsi car il eût fallu préciser tout de suite ce que j’entendais par «aboyeurs inconséquents».
C’est là un des grands dangers, dont j’ai souvent parlé, de l’écriture numérique en direct qui, souvent, ne prend pas le temps de fixer avec recul les tenants et les aboutissants de la pensée.
french-revolution.jpgJ’entends donc par aboyeurs inconséquents des gens qui font montre d'une certaine radicalité dans leurs propos ou leurs écrits et ne mesurent absolument pas le degré de violence historique que commandent ces propos ou ces écrits pour épouser une réalité. Ces aboyeurs inconséquents sont donc inconscients, ou, plus certainement, discoureurs irresponsables, c’est-à-dire qu’ils usent de la parole comme d’un acte en soi, comme d’une entité abstraite, séparée du monde qu'elle prétend critiquer.
Mélenchon ne dit pas que des choses fausses ; bien au contraire. De même pour Zemmour. Mais ils mentent aussi bien l’un que l’autre car l’un et l’autre, chacun sur des positions qu'ils veulent contraires, mettent en scène les prémisses de la violence historique, tout en étant farouchement opposés à cette violence et en se réclamant profondément légalistes et grands partisans du jeu démocratique. Ce sont des gens de la réification en ce que le sujet vivant de l'argument ne poursuit pas d’autre but que de réduire ce sujet à un objet mort ; des gens comme il en existe des milliers sur la scène de la représentation politique.
Quand Mélenchon, ou Poutou, ou tout autre pseudo radical, dit qu’il faut en finir avec la finance, que de la dette publique on s’en fiche, qu’il faut s’occuper d’abord du bien-être des gens, que les créanciers prédateurs attendront et que le système de l’argent est à rayer de la carte parce qu'il asservit le monde, je ne pourrais qu’adhérer à fond s’il y avait derrière tout ça un désir ardent, autre que celui de la carrière politique, qui me dirait clairement, sans fioritures, comment l’aboyeur compte s’y prendre pour réaliser son discours.
Je n’adhère donc pas parce que la nature de la pierre angulaire est tue, refoulée, taboue : ces idées généreuses ne peuvent en effet dépasser le stade des idées que par l’affrontement direct, violent, jusqu’à ce qu’un vainqueur se dégage clairement de cet affrontement. Faire croire aux gens que par la seule puissance de leur bulletin de vote, ils vont changer la face du monde, que les banquiers vont venir docilement déposer aux pieds des vainqueurs de la consultation électorale leurs privilèges et leurs coffres-forts et qu'ainsi sera abattu un système inique, parfaitement rôdé, puissamment armé, doté d'une police à son entière discrétion, participe de l’escroquerie pure et simple. Tellement pure et simple qu'elle en est grotesque.
Quand intervient la violence historique, les aboyeurs, au mieux, se taisent, au pire, se terrent. Parce que l’histoire démontre que cette violence, dont ils avaient pourtant fait, mais sans jamais la nommer, leur haridelle de fausse bataille, leur éclate au nez sans qu’ils l’aient vu venir et, niant la totalité de l’époque qu’elle se propose de dépasser, les nie en tant qu’éléments à part entière de cette époque. S’ils s’en tirent et restent sur scène, comme c’est souvent le cas, ce n’est qu’au moment du reflux de la violence, par cet art de la récupération de la colère qu’ils connaissent tous et savent manier à merveille.

Personne, à moins d’être un voyou ou un désaxé, ne peut appeler de ses vœux que les hommes s’arment les uns contre les autres et entreprennent de s’égorger. C’est pourquoi les espoirs d’une société humaine où serait reine la seule jouissance d’exister, est un espoir résolument torturé par une douloureuse contradiction. Quand on aime la vie, quand on aime sa vie, cet amour passe, commence même, par un respect chaleureux de la vie des autres.
Respect, qu’hélas, n’ont pas, n’ont jamais eu et n’auront jamais les grands maîtres argentiers de ce monde et tous leurs misérables valets.
Là encore réside toute la difficulté humaine qu’il y a à vouloir parler avec sincérité, aussi bien intellectuelle que viscérale, de la violence historique.

A suivre

11:15 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (30) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

07.01.2013

La violence historique - 1 -

C’est un vaste sujet que celui ayant trait à la violence historique. Le cadre étroit d’un texte ordinairement couché sur un blog ne saurait donc satisfaire à l’exigence de clarté que commande sa gravité, si tant est qu’on veuille le sérieusement traiter.
littératureDe plus, je n’ai sans nul doute pas tous les éléments en ma possession pour en faire une analyse complète et quand bien même les aurais-je, que je n’aurais ni la compétence, ni le temps et ni la patience pour mener à bien un tel dessein.
Depuis longtemps, j’ai néanmoins sur la question une idée assez précise, et, contradictoirement, fort complexe, pour avoir envie d’en brosser quelques traits tirés de l’histoire, de ma lecture du monde contemporain et de mes expériences personnelles.
Le déclic de cette réflexion  embryonnaire fut une phrase lue dans un livre en deux volumes que l’on m’a récemment offert et que je parcourais en diagonale il y a quelques jours. Un livre dont je n’avais jamais entendu parler et dont l’auteur m’est complètement inconnu, Les 76 jours de Marie-Antoinette à la Conciergerie, de Paul Belaiche-Daninos.
Il arrive bien souvent qu’on lise des stupidités qui font grincer des dents. Qui hérissent le poil, comme on dit. Et puis c’est tout... Mais là, ce fut comme une goutte d’eau qui aurait fait déborder un vase patiemment rempli par le goutte-à-goutte de l’intoxication permanente de la parole et des écrits depuis des décennies. J’ai formulé tout haut la vanité suivante : non, il ne faut pas laisser passer ça ! Car ce fut bien une des plus grosses absurdités qu’il m’ait été donné de lire depuis longtemps. Une grossièreté, un contresens, une ineptie sans bornes étalée sans vergogne dans les toutes premières lignes d’un livre qui, à en croire sa quatrième de couverture, se veut pourtant un récit historique :
De nos jours, au vu des lois qui régissent les droits des prisonniers, Robespierre et ses acolytes, seraient condamnés pour crime contre l’humanité.
Même en passant sur le terme bas «acolytes», c’est en dire assez long sur la vision de l’histoire de cet auteur et l’angle d’attaque de son propos en dit également assez sur sa partialité, sur son idéologie et sur le but poursuivi, pour avoir envie de refermer l’ouvrage aussitôt. Ce que je fis.
Qu’on me comprenne bien. Je ne suis pas du tout disposé à me faire l’avocat du célèbre avocat trancheur de têtes. Je suis en revanche tout disposé à le lire historiquement et non pas en le ressuscitant, pas plus lui qu’aucun autre, dans un cadre juridique né près de deux cents ans après sa mort ! Quelle indigeste idiotie !
Avec cette dialectique étroite, on pourrait dire aussi qu’un tribunal international jugerait aujourd’hui Jules César sous le même chef d’inculpation pour avoir traîné, enchaîné et pieds nus, Vercingétorix depuis l’Auvergne jusqu’à Rome. Que ce même tribunal poursuivrait pour crime contre l’humanité Néron, Caligula, Napoléon, Adolf Thiers, Charlemagne, les catholiques de la Saint-Barthélemy et de l’Inquisition, bref, la liste est trop longue, chaque épisode historique, chaque pas fait depuis la fin de la préhistoire jusques à nous, serait à même de fournir au tribunal son lot de criminels contre l’humanité. Ce qui est certainement vrai, mais ce qui n’a aucun sens si on considère les hommes sans les extraire de leur époque.
Dans le même esprit, en amalgamant le temps, les esprits, les nécessités, l’avancée des consciences et les technologies, bref en jugeant et pensant le passé à travers le prisme commode du présent, on pourrait dire, et, pire, même écrire comme le fait cet auteur, que si cet imbécile
naïf qu’était Napoléon avait pensé à se doter d’une flotte d‘avions de chasse, il aurait bombardé Moscou avant d’y entrer et que si Jules César, autre grand candide, avait eu l’idée de mettre sur orbite des satellites de surveillance le renseignant sur les tribus gauloises, leurs mœurs exactes et leurs mouvements, la guerre des Gaules aurait duré beaucoup moins longtemps.
On le voit. Phrase stupide qui mène à des stupidités à se tenir les côtes. Livre qui ne l’est sans doute pas moins, bien que, ou peut-être parce que, couronné par l’Académie. Mais laissons cela. Ce n’était qu’un déclic.
S’il fallait répertorier toutes les idioties qui s’écrivent et toutes les malversations des argumentations employées, on y perdrait son chemin.

Les époques, c'est comme les humeurs de la météo : chacune succède à celle-là et précède infailliblement celle-ci. Mais la comparaison - abusive je vous le concède - s'arrête là car chaque changement d’époque mijote d’abord dans un chaudron de haine et de frustration avant d’être servi aux convives de l'histoire, libres ou manipulés, avec une violence plus ou moins exacerbée.
Chaque fois que les hommes ont sérieusement pensé à la nécessité de changer radicalement d’époque, la poudre a parlé et le sang a coulé. Aucune page du grand livre n’a été tournée sans que les hommes ne s’entre-tuent. Et c’est bien ce que voudraient nous faire oublier les réformateurs atones qui accèdent chacun à leur tour, telles des marionnettes sur le cirque, ici ou ailleurs, au pouvoir. Pour eux, la violence historique, celle qui ne s’éteindra qu’avec l’humanité, c’est chez les autres. Aux antipodes. La Syrie, la Lybie, le monde arabe… Chez nous, rien de tel, voyons !  Les hommes grondent mais ne mordent plus ; comme si, tel un chien, l’histoire s’était définitivement couchée à leurs pieds, en avait fini de ses courses folles et ronronnait maintenant sur leurs pantoufles, et ce jusqu'à la nuit des temps. Du moins de le leur.
Nous ne partageons évidemment pas la même vision, candide, intéressée, mensongère et abrutissante des choses. La société des hommes est un magma qui, toujours, un jour ou l’autre, trouve le cratère pour jaillir hors de l'écorce qui la retient prisonnière.
Le monde ne se change qu’à condition de violence.
C’est pourquoi, n’ayant aucun goût pour la violence armée et éprouvant un incommensurable dégoût pour la mort volontairement distribuée, même à nos pires adversaires, sommes-nous amenés, si nous voulons être autre chose qu'un blogueur coléreux ou qu'un aboyeur inconséquent tel que Mélenchon ou Zemmour par exemple - ou que tout autre marchand d'idées pseudo-radicales - à réfléchir sincèrement à nos désirs de changement de société, sachant que les pacifiques urnes sont mis en place non pas pour changer le monde et les conditions faites à la vie mais bien pour conserver les deux en l’état.

A suivre

 

13:01 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

06.01.2013

Marc Robine : Lucienne

J'aime beaucoup cette chanson parce que j'aime beaucoup ce que faisait Marc Robine, parce qu'elle est très bien écrite, très sensible, authentique, et parce que l'arpège y est joliment empreint de cette tristesse particulière qui rend parfois joyeux le sentiment de vivre.



08:00 Publié dans Musique et poésie | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook | Bertrand REDONNET

04.01.2013

André Hardellet, Julien Gracq, Brassens...

littératureFace aux poètes et aux grands écrivains, la justice avec un j minuscule, celle des grands de ce monde, de la propriété privée, de la magouille légale justifiée et cautionnée par la morale coercitive judéo-chrétienne, s’est souvent ridiculisée.
Deux cas d’école viennent évidemment directement à l’esprit, Les Fleurs du mal, condamné pour «offense à la morale religieuse, outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs» et Madame Bovary, également poursuivi pour «outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs».
Retenons tout de même que Flaubert fut relaxé, en grande partie grâce à ses appuis politiques. Comme quoi, du XIXe au XXIe siècle, vraiment rien de nouveau sous le soleil de la combine…
On connaît donc ces deux cas parmi d’autres, multiples, mais peut-être connaît-on moins celui d’André Hardellet, condamné aux mêmes motifs en 1973 pour son roman Lourdes, Lentes, un livre généreux et tendre sur les phantasmes sexuels d’un jeune garçon, très bien écrit, dans un cadre campagnard bien dit.
Ce fut une condamnation honteuse, sous le regard indifférent d’un Président de la République à la gomme, qui se faisait pourtant gloire d’avoir écrit, ô misère, une Anthologie de la poésie française !
Hardellet, dont Breton, Pierre Mac Orlan et son ami Julien Gracq disaient le plus grand bien, ne se remit pas de cette condamnation infâme, déplacée, injustifiable : il mourut l’année suivante. Même amnistié par l'arrivée du Président tête de noeud.


Hardellet et Georges Brassens éprouvaient l’un pour l’autre une très grande estime. Compagnon de ce dernier, Mario Poletti (que j’eus l’heur de rencontrer deux fois à Vaison-la-Romaine), raconte dans son livre très bien documenté Brassens me disait :
« […] en juin 1974, André Hardellet me rend visite aux éditions Plon. Son visage est marqué par sa condamnation. Il me demande de lui fournir le livre La Vie après la mort, en vogue à l’époque. Quelques jours plus tard il disparaissait… »

Là, la justice ne s’était donc pas seulement ridiculisée : elle avait tué par procuration. Mais il est vrai que le  ministre de l’intérieur à l’origine de la procédure, un grand salaud de première catégorie, Raymond Marcellin, avait été salué par De Gaulle à son arrivée au ministère de l’intérieur en mai 68 - en remplacement de Christian Fouchet -  par un retentissant : Enfin Fouché, le vrai ! En référence à l’abominable ministre de la police de Napoléon Bonaparte.
Pas toujours très fin, «l’homme providentiel», surtout dans ses conceptions de l’Etat policier.
Il est vrai aussi qu'un peu plus tard, ce Marcellin, cette ordure élevée au pinacle politique, sera pris la main dans le sac à installer des micros au Canard enchaîné. La fameuse affaire des faux plombiers de Marcellin.
A ce procès honteux, donc, d’André Hardellet, étaient venus pour lui témoigner amitié, solidarité et soutien, de nombreux amis, dont Julien Gracq et Georges Brassens.
Rien n’y fit. Pour Marcellin, père spirituel de Charles Pasqua, la poésie et la littérature n'étaient qu'affaire d'anarchistes subversifs et sans doute le fait d’être soutenu par des olibrius pareils était à ses yeux un aveu encore plus fort de culpabilité et de perversité totale de l’esprit.

Avant qu’André Hardellet ne soit appelé à la barre, un autre justiciable avait à répondre de ses actes devant les chats fourrés. Il s’agissait d’un homme qui était intervenu chez une dame en instance de divorce sous une fausse identité d’agent de police, mandaté par son ami, le mari, pour y soutirer je ne sais quoi ou y exercer je ne sais quelle contrainte.
A l’énoncé des motifs de poursuites par le juge, Brassens s’était penché sur l’épaule de Mario Poletti et lui avait murmuré : Ce n’est déjà pas glorieux d’être un flic, mais se faire passer pour tel, c’est bien pire encore !
Les flics, la justice, les poètes, les hommes de cœur et d’esprit ne faisaient pas bon ménage, en ce temps-là... Et quand je vois aujourd’hui les poètes à la ramasse, les artistes de pacotille, les philosophes à la noix, les hommes d’esprit qui ont de tout à revendre sauf de l’esprit, fricoter avec les imbéciles au pouvoir, national ou local, ça me donne envie de gerber ce que je n’ai même pas encore bu.

Ça
me donne surtout envie de n'avoir jamais rien de commun ni rien à partager avec tous ces vendus au plus offrant.

 

Illustration : Hardellet et Brassens pour la sortie en librairie du recueil de poèmes Les Chasseurs deux

10:52 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

02.01.2013

Chemineaux 52

littératureC'est donc parti pour ce nouveau blog à trois voix : Stéphane Beau, Philippe Ayraud et mézigue.
L’entrée est libre et, si le cœur vous en dit, c’est par ici.
Ce sera un blog à durée déterminée, cette durée déterminée étant le pari que j’ai fait (et proposé à mes deux acolytes) sur sa pérennité. Il voguera pendant les douze mois de cette année avec un texte par semaine, le mercredi, avant de se saborder en décembre.
Si toutefois il ne fait pas naufrage avant. Sait-on jamais… Même quand on pose à sa promenade une limite dans le temps, il arrive qu’une tempête vienne en contrarier la route, n’est-il pas ?

Si vie me prête vie jusque là, je devrais de mon côté venir à votre rencontre encore cette année sur l’Exil des mots, un rendez-vous qui aura six ans en juillet prochain, quand le soleil sera un peu plus haut sur l’horizon du temps qui passe.
Regroupés, les textes mis en ligne en 2012 sont au nombre de 148- remises en ligne exclues - et constituent un fichier de 608 790 caractères répartis sur 211 pages.
Je ne sais pas si c’est beaucoup ou peu. C’est en tout cas ce que j’ai fait et je ne sais même pas pourquoi je vous dis ça. Peut-être en avez-vous rien à f….
Mais bon…
Cette activité blog est toujours pour moi une source d’interrogation. Je ne sais pas exactement quel en est le but, je ne sais pas quelle est la nature réelle du plaisir que j’y trouve. Existentielle ?  C'est toujours ce qu'on dit quand on ne sait pas trop quoi dire. Parce qu'il ne veut rien dire du tout, ce mot. Un raccourci d'imbécile pour faire intelligent.
Il faut pourtant bien que ce plaisir existe quelque part puisque le blog existe. Sans quoi, il y a longtemps qu’il aurait été expédié d’un savant coup de clic dans les poubelles du nul et non avenu. Dans ma vie, je n’ai jamais rien fait longtemps qui m’ait été pénible. J’ai toujours fait le tri et pris la tangente dès que quelque chose devenait un peu lourd à porter.
J’aimeraiS bien, d’ailleurs, que d’autres blogueurs me fassent part de la nature du rapport qui les lie vraiment à leur blog. Je mets évidemment un S gigantesque et conditionnel à mon verbe, car je sais très bien qu’aucun ne se livrera, en tout cas pas à moi ni en public. Et ce, non pas parce qu’ils sont comme ci et comme ça, en tant qu’hommes et femmes - que je ne connais ni des lèvres ni des dents - mais parce qu’un blogueur, c’est comme ça : ça cause mais ça ne se livre point, tout occupé que c’est à alimenter son tonneau des Danaïdes.
Un blog fonctionne comme s’il n’avait pas d’auteur réel, en fait. Pas d’auteur de chair et de sang, avec des joies, des tourments, des détresses, des espoirs, des haines et des amours. Humainement, je veux dire, de cœur, d’être en profondeur, parce que je n’appelle ni haine ni espoir ce qui se situe sur le discours déplorable de la politique ou sur la critique désincarnée, un peu pédante, de tel livre ou de telle autre production de l’art.
Un blog, c’est parfois un nom, une signature. Dans le meilleur des cas, une photo et dans le pire, un à propos aussi lapidaire que bateau, aime la littérature, la musique, la randonnée, le cinéma… Jamais les femmes, ou les hommes, par exemple. Tabou, tout ça. Un à propos, c’est comme une cuillérée de poudre balancée aux yeux pour éloigner les curieux de la vie. Regardez comme j’écris bien, mais je ne vous dirai pas qui je suis. Ça remplit la fonction  exactement contraire de sa raison d’être. Et c’est bien normal dans un monde à l’envers, n’est-ce pas ?
Bref, c’est comme ça. A vrai dire, je m’en fiche un peu. Mais c’est la raison principale pour laquelle je ne lis plus que deux ou trois blogs et n’intervient plus guère que sur deux.
Car j’ai désappris à discuter avec les fantômes qui ne m’ont pas été chers de leur vivant.

13:11 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET