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26.09.2014

Fabliau en ré dièse augmenté

ULTIMA RATIO REGUM

Le Prince des Sans l’sous se sachant menacé
Cherchait à provoquer un écran de fumée,
Qui distrairait les ires du peuple turbulent.
Sa tête vaquait donc sur des sujets brûlants :
L’or ? La peste ? Le climat ? La répression vulgaire ?
Fi des banalités ! Rien ne valait la guerre,
Ce retour immédiat des ataviques peurs,
Qui font du roi un chef et un grand protecteur !
L’idée bien arrêtée et l’ennemi trouvé,
Sa majesté tantôt fit le canon tonner.

 Certes, nous dit-on, en ces temps reculés
De féroces barbares, visage cagoulé,
Tuaient des voyageurs du royaume de France,
Et ces assassinats réclamaient la vengeance !
«Vous êtes bons chrétiens, assez de reculades,
Car Dieu qui vous regarde commande la croisade !»
Mais le roi n’eût il eu trône sur la balance
Qu’il eût sans état d’âme sur tout ça
fait silence.

Tous les Sans l'sous pourtant- les doux, les indigents,
Les petits, les moyens, sots ou intelligents -
Applaudirent au courage d’un prince méritoire
Qui signait de leur sang sa page dans l’histoire.

12:30 Publié dans Fables | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

19.09.2014

Fabliau en si mineur très diminué

CONFÉRENCE

Aux yeux de ses manants ne trouvant plus de grâce
Pour avoir agréé les appétits voraces
Des grands propriétaires et des hauts dignitaires
Au grand dam et courroux du monde prolétaire,
Le Prince convoqua tous les folliculaires
Pour tenter d’apaiser la grogne populaire.
Grand comédien rompu à l’art de la tromperie
Il comptait ce faisant amadouer les esprits,
Les étourdir de  phrases et les payer de mots,
Que relaierait très bien l’engeance des grimauds.

 Du côté des ministres on faisait triste mine
Car ces gens sans aveu, honnissant la chaumine,
Craignaient que le filou n’annonçât des réformes
Plutôt que d’asperger le peuple au chloroforme.
Le roi les rassura : il fut en son discours
Si flou, si nébuleux, que même leur basse-cour
Dut froncer le sourcil et fournir gros efforts
Pour ouïr exactement le sens des anaphores.
Celles-ci au demeurant en étaient dépourvues ;
Il s’agissait pour l’heure de gouverner à vue.

 Certains chez les Sans l’sou prirent les figures de style
Pour de l’argent comptant et dirent : c’est pas facile
De guider le royaume en ces années deux-mille !
Aimons le souverain et ravalons la bile !
D’autres, bien plus obtus aux plaisirs de l’abscons,
Se virent sans ambages pris pour de pauvres cons …
C’en est trop, crièrent-ils, de ces indignes prônes,
Il nous faut sans tarder le virer de son trône !
Les mâchoires se serrèrent et les poings se fermèrent,
Mais les justes colères sont toujours éphémères.

 Si bien que le bouffon rentrant chez lui tranquille,
Pour des siècles encore régna sur des débiles.

13:42 Publié dans Fables | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

11.09.2014

Fabliau en la mineur

LE FROMAGE DU PEUPLE

Au congrès des soldats armés jusques aux dents,
Le prince des Sans l’sou en vocables ardents
Entreprit un
beau jour de déclarer sa flamme
A ceux qui croupissaient sous la misère infâme.
La gent soldatesque souleva le sourcil,
Ces mots n’ayant point cours en ces mâles conciles
Où il n’est d’ordinaire question que d’ennemis
A saigner et brûler pour sauver la patrie.
Faisant fi, nous dit-on, de la consternation
Le prince fit état d’anciennes filiations
Qui le liaient par le sang et le liaient par le cœur
Aux faibles créatures du monde travailleur ;
En un mot comme en cent, il brisa l’anathème
Qui courbait leur échine, en criant : Je vous aime ! 

 Le peuple des Sans l’sou en fut transi d’émoi
Et jura devant dieu fidélité au roi.
Il n’avait, ce bon peuple, qu’un brouet lamentable
Tous les saints jours du mois à mettre sur sa table,
Mais hélas n’ayant lu que moitié de la fable,
Il avait oublié qu’un roi qui fait l’affable
Ne le fait qu’à seule fin de piller ses étables.

Ainsi va la morale, immuable de par les âges,
Écrite par les corbeaux, les renards, les fromages.

13:18 Publié dans Fables | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

07.09.2014

Fabliau en douze majeur

SUBTERFUGE

Jadis en un palais doré vivait un loup,
Par rouerie élu prince du peuple des Sans l’sou.
Cette engeance, on le sait sur la machine ronde,
A le bon sens ingrat et la bévue féconde.
Ce loup, donc, du diadème aussitôt chapeauté
La meute s’empressa de bien maquereauter
Pour flatter sans ambages les grands loups dominants.
On vit bien, quelquefois, le peuple descendant
Sur le pavé des rues et y grincer des dents,
Rien n’y fit pour autant.
Le Prince des Sans l’sou n’aimait plus que l’argent !

 Dans sa couche cossue cousue d’or et de soie
Pour s’ébattre en grand fauve et se griser d’émoi
Le roi prit une louve aux épaules puissantes,
La fit reine des loups et dame sous-jacente.
Mais, soit qu’il la couvrit comme on couvre putain,
En ne donnant de soi qu’une part de butin,
Soit qu’il connut soudain pénurie de gingembre
Ou qu’elle-même ne sut roidir le royal membre,
Reléguée aux lisières,
La louve fut bannie de l'auguste tanière.

 Et l’on vit tout à coup  surgir le jamais vu :
Les Sans l’sou tous pliés pour une affaire de cul,
Tandis que sous les ors de la forêt touffue
Les grands loups dominants entassaient des écus.

16:16 Publié dans Fables | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET