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30.06.2015

Décalage ?

actu.JPGIl  y a une chose que je ne comprends pas.
Enfin non, en vérité…
Il y a des milliers de choses que je ne comprends pas, car s’il n’y avait que celle-ci, somme toute insignifiante, j’aurais résolu toute l’énigme du monde et je serais dès lors, ou le plus malheureux des hommes, ou le plus heureux d’entre eux.
Disons alors que je pense en ce moment à cette petite chose que je ne comprends pas et qui me turlupine.
Ici, à Biała ou dans mon village des rives du Bug, je n’ai pas accès aux quotidiens français. Je prends donc des nouvelles du pays, lesquelles, soit dit en passant, sont rarement réjouissantes, via les sites d’infos, vendues comme quasiment en direct, tel que sur Voilà -Actualités, par exemple, où l'AFP fait des merveilles.
C’est pas beau, ça, d’habiter à 2500 km de son berceau dans un hameau perdu aux confins du monde russe  et de savoir, dans la minute qui suit,  s’il ne se passe rien de trop fâcheux là-bas ?
Oui mais voilà, justement.

Le massacre de Charlie hebdo, je l’ai appris par D. qui venait de visiter un site d’infos polonais…
J’ai sauté sur ma souris et vite suis allé voir de quoi il en retournait.
Rien. Que des rubriques chiens et chats écrasés.
Bon…Ce doit être un canular.
C’est venu plus tard. Quelques heures après.

Les grandes oreilles de l’oncle Sam sous la table des Présidents, même chose :
- Tu as vu ? Les Américains ont…
- Non. Je n’ai rien vu de tel. Où ça ?
C’est venu plus tard. Quelques heures après.

Le crime infâme d’Isère, la tuerie de Sousse, même chose. Je savais tout ça avant vous, sans doute, même si vous habitez Lyon et si vous avez les mêmes sources d’information que moi…

Bizarre, non ?
Est-ce là la lenteur épouvantable des Français, aussi lents que leur justice et leur administration ?
Ou bien y-a-t-il là-dessous d’autres raisons moins avouables?
Je n’en sais rien, mais c’est fort curieux. Étrange même.
Mais peut-être que les Polonais sont partout à la fois et rapides comme l’éclair pour transmettre, eux.
Humm… J'ai un doute.

16:27 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

24.06.2015

Vous êtes sur écoute

104900174.jpg

" Le fait que la loi sur le renseignement soit adoptée en France sans remous majeurs est inquiétant. Il faut résister à ces dispositions qui renient nos libertés les plus élémentaires.
« L’antiterrorisme est une politique mondiale que chaque pays applique en arguant de sa situation propre, au gré des circonstances, toujours "exceptionnelles". C’est à présent au tour du gouvernement français de faire passer ce qui est ni plus ni moins, quoi qu’en dise le premier ministre, un Patriot Act, en tirant prétexte des attentats de janvier. On serait tenté de dire : un Patriot Act de plus, tant cette "loi sur le renseignement" ne fait que couronner l’empilement de législations antiterroristes qui, ces dernières années, ont peu à peu mis les services de renseignement français au-dessus des lois, et à l’abri de tout recours.
« Le mouvement mondial qui consiste, au nom de la "sécurité", à placer entre les mains de l’administration des pouvoirs qui étaient préalablement dévolus aux juges est un processus manifestement sourd et aveugle. Toutes les voix qui se sont élevées contre la nouvelle "loi sur le renseignement" n’ont en rien pu entamer la volonté des services de faire voter leur loi, et quand le Conseil d’État s’est mêlé d’en corriger les excès les plus visibles, leur homme, le rapporteur Jean-Jacques Urvoas, s’est empressé de rétablir le texte d’origine.
« Même les mises en garde véhémentes adressées à la France par le New York Times, qui n’est pas exactement connu pour figurer au nombre des publications libertaires, n’y ont rien fait. Le ridicule qu’il y a à adopter des lois "à la Bush" avec quinze ans de retard et après tous les scandales que l’on sait, le pathétique qu’il y a à mettre en place un programme Prism à la française après les révélations de Snowden n’ont effleuré ni les députés ni les sénateurs. Dans un tel contexte, on peut bien requérir le renvoi pour "terrorisme" des mis en examen de Tarnac.

« Le terrorisme, ennemi idéal

« Certes, nous dira-t-on, les parlements sont universellement devenus les chambres d’enregistrement des différents lobbys. Certes, nous dira-t-on, la politique se réduit de plus en plus à une pure police des populations. Certes, nous dira-t-on, le terrorisme est l’ennemi idéal, celui qui, étant tapi comme virtualité en chacun, autorise à nous traiter tous en criminels potentiels, celui contre qui l’on pourra toujours mobiliser des populations qui ne se laissent plus mobiliser pour rien. Certes, nous dira-t-on, la surveillance générale est, depuis toujours, au cœur de l’exercice de la "gouvernementalité" libérale. Mais…

« Mais il n’est pas indifférent que cette "loi sur le renseignement" passe ainsi, sans remous majeurs, en France. Du point de vue de la politique antiterroriste mondiale qui accompagne la privatisation forcenée des existences, il n’est pas indifférent que le "domino français" tombe à son tour. Que succombe le pays qui fut pendant plus de deux siècles le pays par excellence de la politique moderne, le pays où fut un jour proclamé: "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs", voilà qui va, à coup sûr, constituer un signal sans équivoque et de portée universelle.
« C’est pourquoi nous appelons tous ceux qui, en France et ailleurs, n’entendent plus qu’on les gouverne par les moyens totalitaires et antidémocratiques de l’antiterrorisme à unir leur voix. »

Giorgio Agamben, Étienne Balibar, Luc Boltanski, Éric Hazan, Florence Gauthier, Hugues Jallon, Leslie Kaplan, Frédéric Lordon et Nathalie Quintane

 

*

Merci à Charles Tatum de m'avoir amicalement autorisé à relayer.
J'ai mis en gras les faits qui  me semblent les plus graves, les plus humiliants, les plus dramatiques.
Je transmets donc, mais sans espoir de retour, par une sorte de sursaut de dignité et comme un bras d'honneur.
Parce que quand un peuple est capable d'accepter d'être ainsi ligoté sans s'organiser pour casser la gueule à ses élus, il n'a que ce qu'il mérite : être traité comme une chose, comme une bête, comme un troupeau de veaux qu'on mène à l'abattoir.
J'ai mis ce texte en tag littérature aussi, car que peut valoir la littérature d'un tel peuple ?

Ironie du sort, c'est le jour-même où les apparatchiks de la démocratie à la française s'apprêtent à valider définitivement leur loi scélérate, qu'ils apprennent les coups tordus faits par leurs amis américains aux présidents français...
Les arroseurs soudain douchés ! La réaction sera diplomatique, entend-on...Autant dire qu'elle ne sera rien, que ronds de jambes et excuses de salons.
Imagine un peu si Poutine avait  ainsi violé les conversations de l'autre pignouf ! On crierait, on menacerait, on déploierait les armes, on ferait l'outragé, on le vouerait encore plus aux gémonies !
Ce pays bafoué, à genoux devant les États-Unis, et qui bafoue ses citoyens, tous terroristes potentiels, ne mérite, dans sa configuration politique actuelle, aucun respect parce qu'il ne respecte rien, enlisé qu'il est dans son mensonge !

 

18.06.2015

żegnaj Józef Kraszewski !

littérature, écritureNotre projet de financement participatif pour la traduction d’un roman de Józef Kraszewski, Szalona, est mort.
Je pense qu’il ne serait pas très honnête, que ce serait mentir par euphémisme, que de parler d’échec. Car il s’agit en fait d’une déconfiture, d’une raclée, d’une déroute, d’un désaveu cinglant.
Nous avons atteint 18% de notre objectif et nous avons mobilisé, en dépit de nos appels, directs ou indirects, de nos innombrables courriers, de nos relais sur  les réseaux sociaux, de nos coups de fil, du soutien promis de certaines institutions,  8 contributeurs !
Dans mon euphorie – je dois vraiment être un fou – j’avais même poussé l’effronterie jusqu’à envoyer une longue lettre à Roman Polanski.
Mais comme j’ai beaucoup de respect pour cet homme, je me dis, tels les petits enfants pauvres qui ne découvrent jamais rien dans leurs souliers de noël, que la lettre ne lui est pas parvenue.
Qu’il est trop loin, trop haut, trop ailleurs… Et moi trop con.
C’est avec beaucoup de sincérité et même d’émotion que je remercie ici les huit personnes qui nous avaient fait l’honneur de leur confiance, et tout particulièrement Marc Villemain qui avait mis son écot une demi-heure seulement après l’ouverture du site, ainsi que Christian Cail, un gars de mon enfance présent dans Le Silence des Chrysanthèmes, qui lui donnait la réplique presque aussitôt.
Je me souviens bien de cet après-midi là. J’étais joyeux comme un pinson, certain qu’avec un tel début, nous allions publier notre traduction !
Merci à Frédéric Chambe, Fabien Arlotto, Sophie Delagneau, Florent Gouget, Véronique Médina, tous de Lyon et connaissances de Roland.
Merci à mon vieux camarade de Niort, Yves Gassot.
Leurs contributions vont évidemment leur être rendues dans les jours qui viennent.

Je suis triste. Mais pas de dépit. Les gens sont libres de cotiser, de pré-acheter en l'occurrence,  où  bon leur semble, en fonction de leurs goûts ou de leurs affinités.
C’est  peut-être même un de leurs derniers bouts de liberté individuelle.
Je suis triste car je pense à toutes ces heures investies déjà, et qui resteront lettres mortes, dans le travail de traduction par D. et moi-même. Je pense à notre enthousiasme de cet hiver, cherchant le mot juste, la phrase la plus précise et la plus près du texte, le proverbe intraduisible et son équivalent en français, derrière nos fenêtres où ruisselait la neige épaisse,  et je m’en veux terriblement.
Je n’aime pas entraîner qui que ce soit, surtout ceux que j’aime, dans mes déroutes.
Moi seul suffit à les hanter.
Je pense aussi à  Roland, qui a mouillé la chemise, depuis le début.
Je pense que tout cela est dommage, décourageant,  et que c'était un beau roman à offrir en lecture.
Je pense aussi que...

Et puis merde ! J’en ai déjà trop dit !

 

20:56 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

16.06.2015

Au crépuscule d'un jour

A.JPGTrois heures aux pendules éternelles du ciel.
La nuit passe le relais. Sur la pointe des pieds, comme pour ne pas réveiller trop brutalement l’étoile de feu et laisser aux âmes tourmentées le temps de se retirer
incognito dans son sillage.
Dans les halliers tout proches, dont les feuillages caressent à ma fenêtre, un artiste ailé salue la lueur nouvelle.
Pour quelques heures encore, le monde ressemble à un monde déserté des hommes.
C’est peut-être la raison pour laquelle on y ressent si bien et si juste.
Où l’on pense, par exemple, dans un sourire amusé, que de philosopher sur le mensonge comme pièce maitresse des constructions sociales, c’est vraiment des billevesées de blogueur. Du trompe-la-mort.
Qu’en ai-je bien à faire ? De ça et de tout le reste ? Qu’est-ce que rabâcher dans le vide, comme une vieille machine déréglée, peut bien m’apporter ?
Les mondes meilleurs sont déjà là, ne les vois-tu pas ? A ma porte, sur ce jardin qui sent la plante ensommeillée, qui lape la rosée, et sur ce silence tremblant des primes émois.
Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. Je saisis mieux le vieil adage.

Depuis dix ans, je n’ai cessé de m’émerveiller des matins de l’été continental dans ce village perdu des confins.
L’Océan, là-bas, loin à l’autre bout, sur un autre versant de la machine ronde, dans les ténèbres roule encore ses écumes. L’Océan n’aime pas trop les matins. Il préfère les soleils fatigués du soir. Les poussières du soleil couchant. Les poncifs. Comme les promeneurs de ses grèves.
La forêt soupire d'aise.
Je ne suis pas revenu en France depuis trois ans. Depuis octobre 2012.
J’y pense maintenant, sans nostalgie, et c’est quelque peu triste de ne point être triste sans elle. Je me suis enraciné dans l’exil.
En juillet, je traverserai l’Europe, j’aime conduire une automobile à travers les paysages, cap sur la Normandie de Proust et de Maupassant, et cap sur la Bretagne où je ferai une apparition dans une librairie.
J'y parlerai de l’écriture. De mes quelques livres.
Mais je n’éprouve plus la joie que j’éprouvais à mes premiers retours vers la longitude maternelle.
Je le sens bien.
Un vague contentement, oui. La France s’est faite métonymie pour dire pays, naissance, langue d’usage. Elle a perdu ce goût joyeux que seule sait vous donner la mélancolie des sentiments.
Elle a perdu le fil conducteur.
Elle vend des armes, la France de Voltaire, de Valls et de Robespierre.
Je hausse les épaules.
Elle se fait des couilles en or en distribuant la mort partout dans le monde.
Et, le cul sur ses canons, elle n'en pérore pas moins sur la paix des hommes, sur l’humanité, sur le droit des peuples, Amen. Sur tout ce qu’elle foule au pied et puis…

Je sursaute.

L’artiste ailé a redoublé de vigueur et d’enthousiasme, peut-être vexé que d'autres voix que la sienne se soient élevées dans les broussailles. Beaucoup de voix, flutées, douces, argentées, joyeuses, désordonnées. C’est maintenant un concert.
J'ai sursauté car qu’en ai-je bien à foutre qu’elle vende des armes à toutes causes et alimente, pateline et donneuse de leçons, l’atavique et barbare besoin de tuer ?!
Incorrigible moraliste !
Il est temps de boire le café. Avec de la confiture de fraises, de mes mains faite hier et qui sentent le sucre des champs.
L’aurore est déjà adulte, le temps d’une éclosion et le soleil frappe déjà sur la cime des grands arbres.
Demain sera encore.
Vouloir et vivre des milliers de matins, renaissances sacrées du grand mouvement des choses !

11:23 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

12.06.2015

Considération générale sur le mensonge - 4 -

url.jpgDepuis la chute de l’Union soviétique, une grande partie des intérêts géopolitiques de l’Europe et des États-Unis concorde sur le vieux continent, et ce,  bien qu’ils s’y livrent une concurrence féroce, voilée à coups de sourires diplomatiques, de grandes claques dans le dos et de subtiles parties de poker menteur.
L’Europe n’avait en effet  pas manqué de voir dans la fin de la bipolarisation du monde, une occasion de s’agrandir, d’englober des populations et des marchés nouveaux et de faire rentrer des taxes supplémentaires dans son insatiable escarcelle.
Les États-Unis avaient vu, eux, une occasion de déployer leur avant-garde militaire, l’OTAN, un peu partout sur des zones stratégiques où elle était interdite depuis plus de 50 ans, et de soumettre d’autres contrées jusqu’alors sous l’emprise du collectivisme à la fructification de leurs capitaux.
Et puis, s’installer à l’est, traverser de part en part le grand corps européen plutôt que d’être stoppé à Berlin, c’est aboutir à la Mer Noire et au bassin méditerranéen par l’autre côté. S’installer tout près de la Chine et de l’Iran, cerner la planète.
Pour les Européens, en 2004 et 2005, c’est l’engouement, le festin jusqu’à la gueule, l’orgie, ils se ruent sur le cadavre encore tout chaud des pays du Pacte de Varsovie : la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la République tchèque, rejoignent « les bras fraternels » de Bruxelles et le grand marché unique et exubérant.
Mais cela ne suffit pas… La finance européenne se sent maintenant des ailes. L’ogre allemand a pourtant déjà fait ses choux gras depuis 1990. Venez faire un tour en Pologne, vous comprendrez vite et mieux : une voiture sur deux est une Audi ou une Volkswagen ! Peu importe les millions de morts  et d’estropiés dont sont responsables ces bolides conçus pour autoroutes et lancés dans des pays sans autoroute ; des pays où le réseau archaïque n’était adapté jusqu’alors qu’à la Trabant et à la charrette  attelée et où une personne sur deux n’avait jamais conduit qu’un vélo ou une mobylette !
Hécatombe.
Mais les financiers et leurs politiques fantoches n’ont pas le temps de s’arrêter à ces considérations puériles et romantiques !
En Tchéquie, Volkswagen avale le géant Skoda.
Quant aux enseignes de supermarché, ça bat tous les pavillons,  français, allemands et, dans une moindre mesure, portugais.
L’or coule à flots et les cotes en Bourse font la fête à la fin du communisme !
Mais comment avancer plus loin encore ? Nous voici parvenus maintenant à la rivière Bug, aux portes de la Biélorussie où il n’y a pas grand-chose à gratter, pensent sans doute les grands stratèges et, surtout, elle est tenue d’une main de fer par le peu démocratique Alexandre Łoukachenko, la bête noire des idéologues de la GREHF, la Grande République Européenne de la Haute Finance.
Et puis, nous voici aussi parvenus aux rivages de l’Ukraine, vaste pays, berceau historique de la civilisation russe, le grenier à blé de l’Europe, disait-on autrefois, de vastes plaines fertiles et un complexe d’industrie lourde et des gisements de matières premières dans l’est et au Sud. Un pays archaïque aussi où, passez-moi l’expression, il y a vraiment des couilles en or à se faire. Laisser tout cela péricliter dans les seules mains de quelques milliardaires ukrainiens qui ne payent même pas les impôts à Bruxelles, n’est pas envisageable !
L’Europe, depuis plus de  dix ans, à coups de magouilles et de déclarations interlopes,  rêve d’englober tout ça sous son aile protectrice.
Le  boycott de l’Euro footballistique de 2012 par les politiques démocrates, au premier rang desquels le sinistre Hollande, « ennemi de la finance », sous les prétextes fallacieux de la messe habituelle, liberté, égalité, fraternité, n’a pas d’autres messages à envoyer à l’Ukraine : « Rejoignez-nous ! Tournez le dos à la Russie ! »
La Russie. L’ombre au tableau. Pour les uns comme pour les autres, Américains et Européens, se profile un obstacle à l’horizon, Moscou.
Les taupes sont à l’œuvre, les galeries se  creusent, qui vont devenir des fossés sous les pieds du peuple ukrainien…

Tout avait pourtant bien commencé, sitôt le mur tombé. Tout marchait comme sur des roulettes.
De 1991 à 2007 en effet, Boris Elstine gouverne la Russie, une bouteille de vodka dans chaque poche.
Les bons souvenirs et les regrets qu’il laisse en Occident sont dus à sa politique de soutien sans faille aux États-Unis, aux grandes privatisations galopantes et douteuses  accompagnées d’une corruption ayant force de loi, aux importantes évasions fiscales au bénéfice des pays occidentaux, notamment de la Grande-Bretagne par des placements financiers en Bourse ou dans des clubs sportifs ; de la France aussi et de l'Espagne par des achats de propriétés. Des pans entiers de l'économie russe étaient alors en train de passer entre des mains occidentales et états-uniennes, notamment les grandes compagnies pétrolières.
On battait des bras, on saluait le grand démocrate Eltsine, on faisait mine de vénérer la grandeur retrouvée de la Russie éternelle, alors que, comme le chacal qui vient de découvrir un cadavre en putréfaction au détour de son chemin, on applaudissait à la curée ! On sonnait l’hallali !
Survient alors Poutine, ce névrosé conquérant, ce réactionnaire ennemi des homosexuels et des libertés individuelles,  mais ça, même si on le répète à l’envi en façon de propagande pour effrayer le p’tit socialiste militant de base et mettre en émoi la chaumière, on s’en fout complètement, dans le fond.
Car c’est surtout l’empêcheur de gagner des ronds en rond qu’on a dans le collimateur, dès 2008 !

L’avertissement était venu lors de la conférence de Munich sur la sécurité internationale, le 10 février 2007, à laquelle j'ai déjà fait allusion sur ce blog, la situant par erreur en 2008.
Je ne suis même pas certain que le pire des atlantistes, bien qu'il n'assistât pas à cette conférence, celui qui se pavane aujourd’hui avec autant de ridicule que d’inefficacité à l’Élysée, soit au courant de la teneur de ce discours prémonitoire.
Et quand bien même le serait-il ?  Cet homme ne parle, n’agit, ne pense et ne vit que par procuration. Alors….
Donc, devant un parterre de chefs d’États, de ministres, d’industriels, de financiers et de hauts responsables militaires venus de 40 pays, Poutine déclarait en substance :

" Le monde bipolaire est mort avec la chute de l’Union soviétique et, depuis, nous vivons dans un monde unipolaire, uniquement commandé, régi et dirigé en vertu des intérêts d’un seul pays ou d’un seul  axe. Cet état de choses est illégitime et ne repose sur aucune base juridique. En dépit de ses promesses et alors que l’organisation  militaire dite pacte de Varsovie est dissoute, l’OTAN déploie ses armes en Europe. Est-ce que c’est pour la sécurité de l’Europe ou est-ce que cela est dirigé contre quelqu’un ?
Nous sommes en droit de nous poser la question.
Le PIB des États du groupe BRIC - Brésil, Russie, Inde et Chine - dépasse le PIB de l’Union européenne toute entière. Ce sont là des forces économiques qui deviennent des forces politiques et qui ont maintenant leur mot à dire dans l’organisation  pour la sécurité du monde. D’autant plus que le monde unipolaire est une aberration qui partout enfreint tous les règlements du droit international."

En clair, Poutine disait donc : fin des diktats américains partout dans le monde, halte aux humiliations subies par la Russie depuis la chute du mur, je vous préviens, je n’accepte plus de marcher tête basse devant la dictature hégémonique des forces américaines ou pro-américaines.
Pour toute réponse, et certainement pour tester la ténacité de ces propos, un an après, l’OTAN tentait de prendre la Géorgie et programmait l’installation de rampes de missiles en Pologne, à deux doigts de l’enclave russe de Kaliningrad. On sait quelle fut la réaction de la Russie et comment la CIA, queue basse tel un chien pris en défaut,  fut contrainte de quitter la Géorgie.
On sait aussi, comme dans le scénario ukrainien, comment les médias, au premier rang desquels étaient ceux  de l’Union européenne, ont alors présenté la Russie comme étant l’agresseur ! L’éternelle vindicative et conquérante Russie !
Les conspirateurs ont, depuis le coup raté de la Géorgie,  travaillé en taupes cinq ans durant pour trouver une autre faille, pour tenter de faire tomber cette forteresse rebelle qui refuse de rentrer dans le nouvel ordre mondial étasunien, et ils ont fini par trouver l’Ukraine.
Une proie et une clef faciles pour un coup d’État, applaudi par ceux qui, en France et en Pologne surtout, n’ont que les mots démocratie, légitimité et république à la gueule.
Maïdan fut un butin facile pour  les grands prédateurs internationaux : le fruit était mûr. Et Kiev tombée aux mains des néo-nazis soumis aux intérêts européens, eux-mêmes soumis à ceux des États-Unis, c’était une saignée fatale ouverte dans le flanc de l’ours russe.
Faire tomber l’ours, le faire plier, l’écraser, afin de lui interdire toute velléité sur la scène internationale, lui interdire l’accès à la Méditerranée via la mer Noire, le couper ainsi de l’Iran et de la Syrie qu’on se propose de détruire, l’assoiffer et l’affamer.
Le coup peut réussir. Avec la bénédiction quasiment criminelle des dirigeants européens, notamment celle de Hollande et de Merkel, lorgnant avec avidité sur une Ukraine bientôt sous la coupe de Bruxelles, donc, dans une certaine mesure, de la leur...
Seulement voilà.
Il se trouve que, dessous la table, la Chine épaule la Russie, que Poutine a senti derrière lui tout un peuple massé et prêt à le suivre pour laver près de vingt ans d’humiliation, qu’il s’est tourné vers d’autres grands marchés asiatiques et d’Amérique du sud,  et qu’en obéissant comme des cons à Washington et à leur folie des grandeurs, les Européens se sont tout simplement tirés une balle dans le pied.
Car toutes leurs sanctions se sont retournées contre eux et aujourd’hui nombre de producteurs agricoles, notamment polonais, ne savent plus à qui vendre leurs produits, qui filent directement au caniveau.
Et ce n’est pas le chevaleresque Obama, qui n’en a cure,  qui va les tirer de ce mauvais pas !
J’ai pris cet exemple parmi tant d’autres, car je vis dans une région polonaise essentiellement agricole, voisine de l’Ukraine, qui commercialisait beaucoup avec les Russes et qui, conséquemment,  est durement touchée par l’embargo russe, riposte aux gesticulations européennes.
Quant à l’Ukraine plongée dans le chaos, endettée jusqu’au cou avec une inflation de près de 50% et un taux de chômage effrayant,  qu’elle se démerde ! Car là, vraiment, tout le monde s’en fout !
A part Poutine peut-être.
L’Europe et les États-Unis sont comme ça : s’ils échouent dans leurs magouilles et leurs embrouilles, ils jettent aux orties les gens dont ils se sont servis hier,  comme au poker on écarte les mauvaises cartes pour tenter la quinte ou le full.
Et tout ça, électeur grandiose, on te l’a vendu comme de l’argent comptant, à la sauce droit-de-l’hommiste et démocratique, et toi, fidèle et sans dévier, tu as porté au pouvoir tous ces gens sans aveu !
C’est ce que j’appelle ici le règne et la force du mensonge comme mode de gouvernement spectaculaire de chacune de nos vies, de chaque parcelle de territoire, de chaque pays et, mondialisation des intérêts et des contradictions oblige, de la planète toute entière.
Car le mensonge, de tous admis, par nécessité ou par ignorance, voire par bêtise ou par lâcheté, a su atteindre ce que jamais aucune vérité, aucune idéologie, aucune morale, aucune philosophie, aucune théorie, aucune religion n'avait su atteindre :  la totalité.

16:09 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écriture, histoire, politique |  Facebook | Bertrand REDONNET

10.06.2015

Considération générale sur le mensonge - 3 -

politique,histoire,écritureIl faut être clair et sans doute aurais-je dû introduire ma réflexion sur ces deux préliminaires.
D’abord,  les affaires économiques et financières et, par conséquent, sociales et politiques, de la planète sont tellement complexes et sans cesse agitées de mouvements tellement contradictoires, que nul homme ne saurait dire aujourd’hui : Moi, je sais !
On peut donc identifier peu ou prou là où ceux qui dirigent ces affaires sont dans l’absolue nécessité de mentir et de corrompre constamment la réalité, mais on ne peut affirmer avec certitude où se situe exactement la vérité, laquelle est elle-même en
mouvement perpétuel et sans arrêt paradoxale.
C’est la raison pour laquelle je n’adhère absolument à aucune des contre-thèses proposées ça et là, celles-ci étant toujours fonction de l’idéologie de leurs auteurs, lesquels, bien souvent, ne retrouvant pas leur aiguille dans l’inextricable pêle-mêle de ce gigantesque écheveau, sont eux-mêmes obligés de mentir pour dénoncer le mensonge.
Second point : lorsqu’on accuse quelqu’un de mensonge, il y a toujours derrière cette accusation une forte connotation morale, le menteur étant un mauvais luron et celui qui dit la vérité un sage.
Quoique  m’évertuant à dénoncer ici les mensonges officiels des puissants, je ne juge pas pour autant moralement leur conduite au prétexte que mentir c’est mal alors que dire la vérité, c’est bien… Car ils sont des menteurs pris en otage et leur existence de puissants est conditionnée à l’exercice même de la  supercherie. Elle leur est imposée par leur prétention au pouvoir.
Ce dont il faut les incriminer, donc, ce n’est pas du fait qu’ils mentent mais de celui qu’ils veuillent nous diriger et contraindre nos vies à être vécues sur le mode, pour eux incontournable, de la tromperie. Ce qu’il faut leur refuser, c’est le droit d’affirmer qu’ils agissent en s’appuyant sur une vérité qu'ils sont les seuls à détenir et qu’ils font ce pour quoi les électeurs les ont portés au pinacle.
Il s’agit de leur refuser le droit, légitimé par les urnes sur la foi de discours falsifiés et de déclarations d’intentions mensongères, à diriger notre bien le plus précieux : notre existence.
Ceci étant dit et, espérons-le, compris, parlons de l’Europe et, conséquemment, de la guerre à l’est de l’Ukraine.
Ça risque d’être long et soumis à digressions.

L’empire romain sur lequel s’est fondée notre civilisation et consolidée notre culture a connu son apogée au IIe siècle, s’étendant alors de la Mauritanie à la Mésopotamie et de l’Angleterre à l’Égypte, avant de se scinder en deux empires, celui d’Orient et celui d’Occident, puis de s’écrouler - s’agissant de l’empire d’Occident tout du moins -  à la fin du Ve siècle.
L’excellent Histoire de la décadence et de la chute de l’empire romain d’Edward Gibbon  retient pour causes de cette chute,
entre mille autres causes, l’immensité des territoires à contrôler en dépit d’une administration parfaitement rodée par plus de quatre siècles d’exercice et par l’abandon aux peuples conquis de toutes les responsabilités militaires.
A sa chute, on ne trouvait quasiment plus un seul romain dans les légions de l’Empire,  pourtant chargées d’y maintenir l’ordre impérial.
A titre tout à fait personnel, je ne puis m’interdire de faire un rapprochement, fût-il intempestif, avec l’extension  toujours galopante de l’Europe politique.
Née, elle aussi, à Rome, mais aux motifs exclusifs d'un libre-échange restreint, en mars 1957 avec six pays seulement responsables de l'accouchement, elle n’a cessé depuis de déployer ses ailes, englobant 28 pays et reculant sans cesse ses frontières, les portant du nord au sud du cercle polaire au détroit de Gibraltar et, d’ouest en est, des  côtes du Portugal aux frontières de la Russie.
Cette démesure s’est accompagnée forcément, au fur et à mesure qu'elle perdait justement le sens de la mesure, de  la prétention de plus en plus pressante à former une entité politique.
De fait, elle a donc abandonné en cours de route son but initial et, accumulant les contradictions en accumulant les pays et les us et coutumes de chacun d’entre eux, elle n’est plus aujourd’hui qu’une énorme machine sans âme et qui ne tient la route qu’à coups de diktats économico-financiers, alors qu’on ne trouve plus grand
chose dans ses capitaux qui soient encore vraiment européens.
Un colosse aux pieds d’argile dont le mensonge consiste  à dissimuler les pieds. Qu'on ne voie que la tête !
Prise de vertige expansionniste, cette Europe en est venue à confondre politique du moment et géographie éternelle et, son berceau n’étant plus assez grand pour satisfaire ses besoins tyranniques d'ébats, elle butte maintenant, au sud,  sur la Turquie et les premières marches du Moyen-Orient et, à l’est, sur la Russie et les premières marches de l’Eurasie.
Son apogée est déjà derrière elle et son déclin entamé car dans sa tentative de soumettre l’Ukraine à ses appétits, elle a trouvé sur son chemin Moscou, bien résolue à stopper le délire à distance raisonnable de ses murs.
Et tout ceci, bien  entendu, s'accompagne d'un concert de mensonges officiels tous plus ou moins mélodieux, orchestrés par le socialiste patelin Hollande et la conservatrice Merkel, et que le citoyen européen, abruti par ses médias, reprend avec plus ou moins de  conviction.

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08.06.2015

Considération générale sur le mensonge - 2 -

url.jpgLa falsification pure et simple de l’information est le moyen  le plus efficace de gouverner, non seulement les pays en particulier mais la planète toute entière.
Et ce moyen de gouverner est d’autant plus opérant que lorsque le mensonge est découvert par tous, il est trop tard pour revenir en arrière et, de toute façon, il n’y a plus personne pour s’en offusquer vraiment : l’information spectaculaire à haut débit a déjà noyé tout cela sous des torrents nouveaux d’inventions, toutes plus préoccupantes les unes que les autres.
Le citoyen passe outre, apeuré par des peurs nouvelles, au regard desquelles les anciennes passent pour dérisoires.
C’est là la grande astuce du spectacle médiatico-politique : savoir réinventer la peur en fonction des besoins du moment.
Il se passe donc à l’échelle planétaire ce qui se passe simplement au niveau individuel pour le petit menteur du dimanche, toujours contraint d’inventer un second mensonge pour en dissimuler un premier, et ainsi de suite, de plus en plus effrontément et d’un modèle de plus en plus invraisemblable, par une sorte de réaction atomique en chaine de la mystification.
L’exemple le plus probant et de tous connu, à l’échelle mondiale dans la dernière décennie, est évidemment l’intervention de 2003 en Irak, dont on sait hélas aujourd’hui qu’elles en sont les dramatiques et chaotiques conséquences.
Fausses photos satellites à l’appui, la planète entière a été convaincue de ce que le régime de Saddam Hussein possédait des armements de destruction massive et de ce que ce régime s’était doté d’une armée des plus redoutables. La troisième puissance militaire du monde, disait-on…
L’objectif une fois atteint, les preuves ont été apportées  sans vergogne et même les Britanniques – c’est dire ! - l’ont admis : ces informations déroutantes justifiant tous les coups étaient inventées de toutes pièces.
L’Irak a été balayé en quelques semaines et le citoyen est passé à autre chose de plus pressant pour lui. Peu importe qu’il ait été pris pour le dernier des imbéciles ! Il faut consommer l’instant dans l'émotion et le propre de l'émotion est de ne se conjuguer, justement, qu'au présent.
Cet état d’esprit aliéné, futile, inconséquent, est bien connu des grands stratèges de l'anéantissement du sens critique. Ils savent ainsi que tout mensonge d’importance, mensonge institutionnel bien emballé, produira ses effets bien mieux qu’une vérité sottement énoncée et, de plus, ne restera dans la mémoire qu’à l’état d'une vague broutille, la montée d'adrénaline étant résorbée.
D’autres exemples, la Syrie, la Libye et tutti quanti pourrait être ici cités, mais il me faut abréger.
Il va sans dire, mais je le dis quand même, que tous ces régimes détruits pas les forces occidentales étaient des régimes peu fréquentables. Mais là n’est pas mon propos car l’eussent-ils été, fréquentables, que cela n’eût rien changé au cours des évènements et qu’on m’épargne ainsi de faire la preuve de ce que les puissants n’agissent jamais par humanisme et par souci de propreté morale. Qu’on regarde simplement derrière soi, les grands stigmates de l’Histoire.
Mon propos, c’est le mensonge comme arme de destruction des consciences et comme redoutable outil de domination politique.

On assiste aujourd’hui à une dramatique confrontation entre les vues et desseins des États dominateurs  et la vérité des faits.
Rien de nouveau, c’est là une constante de l’histoire, depuis l’Antiquité.
Mais ce qu’il y a de nouveau dans l’histoire moderne, c’est que les vues et les desseins entrent toujours de plus en plus violemment et de plus en plus souvent en contradiction avec les faits, car la population mondiale compte maintenant sept milliards d’individus. L’appauvrissement logique des ressources traditionnelles et les nouvelles exigences de coexistence  géopolitique qui en découlent, pose le problème énorme aux dirigeants les plus puissants de l’harmonisation des populations de plus en plus nombreuses, d’idéologies de plus en plus multiples et d’intérêts de plus en plus divergents avec un espace qui, lui, est toujours le même, c’est-à-dire de plus en plus réduit.
Il faut donc à tout prix faire correspondre les besoins politiques avec les faits, et ce, aussi bien dans le domaine des politiques intérieures que dans celui des politiques internationales.
Quand les faits contredisent les vues, on  modifie les faits.
Nous en arriverons ainsi à l’Ukraine qui, dans la misère et par le sang versé, vit cette dramatique confrontation depuis février 2013.
Ce faisant, nous ne perdrons jamais de vue que tout cela n’est rendu possible que parce que les dirigeants – principalement occidentaux - de la planète ont l’aval des peuples par le truchement d’élections régulières, où le plus beau et le plus présentable des mensonges a toujours force de persuasion pour un électorat que le désespoir plus ou moins conscient d'une vie ressentie plus ou moins consciemment comme minable à tout point de vue, rend imbécile.

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07.06.2015

Considération générale sur le mensonge - 1 -

urlu.jpgIl n’y a guère plus niais – et il m’arrive souvent de l’être à cet effet - que de reprocher à un homme politique de mentir, surtout en période de publicité électorale.
C’est comme si on reprochait à un coureur du tour de France de monter sur un vélo ou à un footballeur de taper du pied dans un ballon.
On peut donc légitimement reprocher à un politique de faire de la politique ou, mieux, de pousser le vice jusqu’à être un candidat, mais on ne peut en aucun cas lui tenir grief de ses mensonges.
Car le mensonge est une institution. La clef de voûte de tout l'édifice politique ; clef de voûte  admise en l'état par tous ceux qui y nourrissent quelque ambition.

Ce couillon de Redonnet ne sait plus quoi raconter, alors il enfonce des portes ouvertes, ricanez-vous peut-être. Si tel est le cas, messieurs et mesdames du jugement lapidaire, expliquez-moi pourquoi – avec une explication qui tienne bien la route et non avec une sauce trempée dans l’idéologie  bon marché - des millions  et des millions de gens s’en vont partout dans le monde, à tout instant scrupuleusement voter.
Car on ne peut sérieusement supposer qu’ils s’en vont courir, leur bulletin à la main  et leur conscience dans la poche, pour élire un affligeant menteur en toute connaissance de cause.
S'il en était ainsi, après tout, ce serait quelque peu désespérant mais, au moins, ça aurait un sens. Un sens peu glorieux, certes, mais un sens quand même. Celui d'une volonté exprimée.
Ce postulat étant posé, on peut donc dire que, partout où il se manifeste, l’électeur est un fieffé imbécile et, vu l’état du monde et vu les insignifiants qui sont portés au pinacle, ça me plait bien, à moi, de voir en chaque électeur un imbécile.
Car il est, in fine, le géniteur  de tous ces braillards qu’on appelle les élus.
Le géniteur fuyant. Car on entend très souvent, oui mais, moué, j’ai pas voté pour celui qu’a été élu. Quand un Président s’assoit sur le trône et que, forcément, son comportement immédiat contredit fondamentalement ses paroles publicitaires, on ne trouve plus quasiment personne pour avouer qu’il a voté pour ce connard. Du fait, je me suis souvent demandé, en riant, si le résultat des urnes n’était pas tout simplement falsifié de fond en comble.
Mais c’est bien normal. Question d’amour propre. Difficile d’avouer qu’on peut être con à ce point-là, surtout quand ça dure depuis des siècles et qu’à la prochaine convocation électorale, on remettra le couvert et qu’on ira poser vitement son p’tit papier dans la p’tite boîboîte !

L’inversion de toute perspective étant achevée dans le sens de la déconfiture, il faut donc dire et redire que la politique, c’est d’abord l’art de mentir avec le plus d’aplomb possible et, surtout, en se rapprochant toujours le plus près possible de la vérité, comme d’un fil ténu, sans la jamais toucher, au risque d’être éliminé sur-le-champ, sans espoir de refaire surface un jour. Et c'est bien cette expérience des limites du discours fallacieux qui fait d’un mec ou d’une bonne femme un grand politique : dire des choses tellement fausses qu’elles apparaissent comme vraies tant le servum pecus ne  peut concevoir qu’un menteur puisse ne pas se dissimuler à ce point là !
L’attraction sémantique des pôles.
Quand tout cela sera entré une fois pour toutes dans toutes les têtes - et ailleurs qu’au café du commerce - la conviction descendra lentement dans les tripes et le temps de l’action sanitaire sera venu.
En attendant – car il y a longtemps que je serai clamsé quand adviendront ces jours lumineux d’un retour de l’intelligence - l’abstentionnisme est une question d’honnêteté morale et une façon de se sentir à peu près propre sur soi.
Une manière de bonheur facile et tranquille, en quelque sorte.

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