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12.06.2015

Considération générale sur le mensonge - 4 -

url.jpgDepuis la chute de l’Union soviétique, une grande partie des intérêts géopolitiques de l’Europe et des États-Unis concorde sur le vieux continent, et ce,  bien qu’ils s’y livrent une concurrence féroce, voilée à coups de sourires diplomatiques, de grandes claques dans le dos et de subtiles parties de poker menteur.
L’Europe n’avait en effet  pas manqué de voir dans la fin de la bipolarisation du monde, une occasion de s’agrandir, d’englober des populations et des marchés nouveaux et de faire rentrer des taxes supplémentaires dans son insatiable escarcelle.
Les États-Unis avaient vu, eux, une occasion de déployer leur avant-garde militaire, l’OTAN, un peu partout sur des zones stratégiques où elle était interdite depuis plus de 50 ans, et de soumettre d’autres contrées jusqu’alors sous l’emprise du collectivisme à la fructification de leurs capitaux.
Et puis, s’installer à l’est, traverser de part en part le grand corps européen plutôt que d’être stoppé à Berlin, c’est aboutir à la Mer Noire et au bassin méditerranéen par l’autre côté. S’installer tout près de la Chine et de l’Iran, cerner la planète.
Pour les Européens, en 2004 et 2005, c’est l’engouement, le festin jusqu’à la gueule, l’orgie, ils se ruent sur le cadavre encore tout chaud des pays du Pacte de Varsovie : la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la République tchèque, rejoignent « les bras fraternels » de Bruxelles et le grand marché unique et exubérant.
Mais cela ne suffit pas… La finance européenne se sent maintenant des ailes. L’ogre allemand a pourtant déjà fait ses choux gras depuis 1990. Venez faire un tour en Pologne, vous comprendrez vite et mieux : une voiture sur deux est une Audi ou une Volkswagen ! Peu importe les millions de morts  et d’estropiés dont sont responsables ces bolides conçus pour autoroutes et lancés dans des pays sans autoroute ; des pays où le réseau archaïque n’était adapté jusqu’alors qu’à la Trabant et à la charrette  attelée et où une personne sur deux n’avait jamais conduit qu’un vélo ou une mobylette !
Hécatombe.
Mais les financiers et leurs politiques fantoches n’ont pas le temps de s’arrêter à ces considérations puériles et romantiques !
En Tchéquie, Volkswagen avale le géant Skoda.
Quant aux enseignes de supermarché, ça bat tous les pavillons,  français, allemands et, dans une moindre mesure, portugais.
L’or coule à flots et les cotes en Bourse font la fête à la fin du communisme !
Mais comment avancer plus loin encore ? Nous voici parvenus maintenant à la rivière Bug, aux portes de la Biélorussie où il n’y a pas grand-chose à gratter, pensent sans doute les grands stratèges et, surtout, elle est tenue d’une main de fer par le peu démocratique Alexandre Łoukachenko, la bête noire des idéologues de la GREHF, la Grande République Européenne de la Haute Finance.
Et puis, nous voici aussi parvenus aux rivages de l’Ukraine, vaste pays, berceau historique de la civilisation russe, le grenier à blé de l’Europe, disait-on autrefois, de vastes plaines fertiles et un complexe d’industrie lourde et des gisements de matières premières dans l’est et au Sud. Un pays archaïque aussi où, passez-moi l’expression, il y a vraiment des couilles en or à se faire. Laisser tout cela péricliter dans les seules mains de quelques milliardaires ukrainiens qui ne payent même pas les impôts à Bruxelles, n’est pas envisageable !
L’Europe, depuis plus de  dix ans, à coups de magouilles et de déclarations interlopes,  rêve d’englober tout ça sous son aile protectrice.
Le  boycott de l’Euro footballistique de 2012 par les politiques démocrates, au premier rang desquels le sinistre Hollande, « ennemi de la finance », sous les prétextes fallacieux de la messe habituelle, liberté, égalité, fraternité, n’a pas d’autres messages à envoyer à l’Ukraine : « Rejoignez-nous ! Tournez le dos à la Russie ! »
La Russie. L’ombre au tableau. Pour les uns comme pour les autres, Américains et Européens, se profile un obstacle à l’horizon, Moscou.
Les taupes sont à l’œuvre, les galeries se  creusent, qui vont devenir des fossés sous les pieds du peuple ukrainien…

Tout avait pourtant bien commencé, sitôt le mur tombé. Tout marchait comme sur des roulettes.
De 1991 à 2007 en effet, Boris Elstine gouverne la Russie, une bouteille de vodka dans chaque poche.
Les bons souvenirs et les regrets qu’il laisse en Occident sont dus à sa politique de soutien sans faille aux États-Unis, aux grandes privatisations galopantes et douteuses  accompagnées d’une corruption ayant force de loi, aux importantes évasions fiscales au bénéfice des pays occidentaux, notamment de la Grande-Bretagne par des placements financiers en Bourse ou dans des clubs sportifs ; de la France aussi et de l'Espagne par des achats de propriétés. Des pans entiers de l'économie russe étaient alors en train de passer entre des mains occidentales et états-uniennes, notamment les grandes compagnies pétrolières.
On battait des bras, on saluait le grand démocrate Eltsine, on faisait mine de vénérer la grandeur retrouvée de la Russie éternelle, alors que, comme le chacal qui vient de découvrir un cadavre en putréfaction au détour de son chemin, on applaudissait à la curée ! On sonnait l’hallali !
Survient alors Poutine, ce névrosé conquérant, ce réactionnaire ennemi des homosexuels et des libertés individuelles,  mais ça, même si on le répète à l’envi en façon de propagande pour effrayer le p’tit socialiste militant de base et mettre en émoi la chaumière, on s’en fout complètement, dans le fond.
Car c’est surtout l’empêcheur de gagner des ronds en rond qu’on a dans le collimateur, dès 2008 !

L’avertissement était venu lors de la conférence de Munich sur la sécurité internationale, le 10 février 2007, à laquelle j'ai déjà fait allusion sur ce blog, la situant par erreur en 2008.
Je ne suis même pas certain que le pire des atlantistes, bien qu'il n'assistât pas à cette conférence, celui qui se pavane aujourd’hui avec autant de ridicule que d’inefficacité à l’Élysée, soit au courant de la teneur de ce discours prémonitoire.
Et quand bien même le serait-il ?  Cet homme ne parle, n’agit, ne pense et ne vit que par procuration. Alors….
Donc, devant un parterre de chefs d’États, de ministres, d’industriels, de financiers et de hauts responsables militaires venus de 40 pays, Poutine déclarait en substance :

" Le monde bipolaire est mort avec la chute de l’Union soviétique et, depuis, nous vivons dans un monde unipolaire, uniquement commandé, régi et dirigé en vertu des intérêts d’un seul pays ou d’un seul  axe. Cet état de choses est illégitime et ne repose sur aucune base juridique. En dépit de ses promesses et alors que l’organisation  militaire dite pacte de Varsovie est dissoute, l’OTAN déploie ses armes en Europe. Est-ce que c’est pour la sécurité de l’Europe ou est-ce que cela est dirigé contre quelqu’un ?
Nous sommes en droit de nous poser la question.
Le PIB des États du groupe BRIC - Brésil, Russie, Inde et Chine - dépasse le PIB de l’Union européenne toute entière. Ce sont là des forces économiques qui deviennent des forces politiques et qui ont maintenant leur mot à dire dans l’organisation  pour la sécurité du monde. D’autant plus que le monde unipolaire est une aberration qui partout enfreint tous les règlements du droit international."

En clair, Poutine disait donc : fin des diktats américains partout dans le monde, halte aux humiliations subies par la Russie depuis la chute du mur, je vous préviens, je n’accepte plus de marcher tête basse devant la dictature hégémonique des forces américaines ou pro-américaines.
Pour toute réponse, et certainement pour tester la ténacité de ces propos, un an après, l’OTAN tentait de prendre la Géorgie et programmait l’installation de rampes de missiles en Pologne, à deux doigts de l’enclave russe de Kaliningrad. On sait quelle fut la réaction de la Russie et comment la CIA, queue basse tel un chien pris en défaut,  fut contrainte de quitter la Géorgie.
On sait aussi, comme dans le scénario ukrainien, comment les médias, au premier rang desquels étaient ceux  de l’Union européenne, ont alors présenté la Russie comme étant l’agresseur ! L’éternelle vindicative et conquérante Russie !
Les conspirateurs ont, depuis le coup raté de la Géorgie,  travaillé en taupes cinq ans durant pour trouver une autre faille, pour tenter de faire tomber cette forteresse rebelle qui refuse de rentrer dans le nouvel ordre mondial étasunien, et ils ont fini par trouver l’Ukraine.
Une proie et une clef faciles pour un coup d’État, applaudi par ceux qui, en France et en Pologne surtout, n’ont que les mots démocratie, légitimité et république à la gueule.
Maïdan fut un butin facile pour  les grands prédateurs internationaux : le fruit était mûr. Et Kiev tombée aux mains des néo-nazis soumis aux intérêts européens, eux-mêmes soumis à ceux des États-Unis, c’était une saignée fatale ouverte dans le flanc de l’ours russe.
Faire tomber l’ours, le faire plier, l’écraser, afin de lui interdire toute velléité sur la scène internationale, lui interdire l’accès à la Méditerranée via la mer Noire, le couper ainsi de l’Iran et de la Syrie qu’on se propose de détruire, l’assoiffer et l’affamer.
Le coup peut réussir. Avec la bénédiction quasiment criminelle des dirigeants européens, notamment celle de Hollande et de Merkel, lorgnant avec avidité sur une Ukraine bientôt sous la coupe de Bruxelles, donc, dans une certaine mesure, de la leur...
Seulement voilà.
Il se trouve que, dessous la table, la Chine épaule la Russie, que Poutine a senti derrière lui tout un peuple massé et prêt à le suivre pour laver près de vingt ans d’humiliation, qu’il s’est tourné vers d’autres grands marchés asiatiques et d’Amérique du sud,  et qu’en obéissant comme des cons à Washington et à leur folie des grandeurs, les Européens se sont tout simplement tirés une balle dans le pied.
Car toutes leurs sanctions se sont retournées contre eux et aujourd’hui nombre de producteurs agricoles, notamment polonais, ne savent plus à qui vendre leurs produits, qui filent directement au caniveau.
Et ce n’est pas le chevaleresque Obama, qui n’en a cure,  qui va les tirer de ce mauvais pas !
J’ai pris cet exemple parmi tant d’autres, car je vis dans une région polonaise essentiellement agricole, voisine de l’Ukraine, qui commercialisait beaucoup avec les Russes et qui, conséquemment,  est durement touchée par l’embargo russe, riposte aux gesticulations européennes.
Quant à l’Ukraine plongée dans le chaos, endettée jusqu’au cou avec une inflation de près de 50% et un taux de chômage effrayant,  qu’elle se démerde ! Car là, vraiment, tout le monde s’en fout !
A part Poutine peut-être.
L’Europe et les États-Unis sont comme ça : s’ils échouent dans leurs magouilles et leurs embrouilles, ils jettent aux orties les gens dont ils se sont servis hier,  comme au poker on écarte les mauvaises cartes pour tenter la quinte ou le full.
Et tout ça, électeur grandiose, on te l’a vendu comme de l’argent comptant, à la sauce droit-de-l’hommiste et démocratique, et toi, fidèle et sans dévier, tu as porté au pouvoir tous ces gens sans aveu !
C’est ce que j’appelle ici le règne et la force du mensonge comme mode de gouvernement spectaculaire de chacune de nos vies, de chaque parcelle de territoire, de chaque pays et, mondialisation des intérêts et des contradictions oblige, de la planète toute entière.
Car le mensonge, de tous admis, par nécessité ou par ignorance, voire par bêtise ou par lâcheté, a su atteindre ce que jamais aucune vérité, aucune idéologie, aucune morale, aucune philosophie, aucune théorie, aucune religion n'avait su atteindre :  la totalité.

16:09 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écriture, histoire, politique |  Facebook | Bertrand REDONNET

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