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27.02.2009

Transition

celle-ci.JPGOn pourrait faire de la neige une allégorie de la beauté en même temps que l’antinomie du chef-d’œuvre.
Comme la beauté, elle subit les affronts du temps, d’autant plus sévèrement que le souvenir de son éclat est encore très présent à l’esprit. Tout le contraire du chef-d’œuvre.
Avec les premières velléités de redoux, la blancheur accumule la fatigue et se fait bâtarde. Les paysages s'abîment dans le chaos d’une boue glissante. Les trottoirs sont maculés comme d’une gélatine et les forêts et les villages et les clôtures et la ville se répandent des pleurs de l’éternel éphémère.
La lutte est rude entre la saison qui meurt et celle qui voudrait naître. Des tourbillons de neige voltigent encore sous une saute brutale du vent, rageurs, opiniâtres, arrière-garde désespérée du temps passé, sitôt remplacés par une averse de gouttes, puis de gros flocons à nouveau, puis des salves de pluie qui frappent le sol comme pour en reprendre possession et chasser enfin les derniers stigmates de l’hiver, qui s’agrippent pourtant aux fossés et résistent encore sous abri des sous-bois.
Le thermomètre observe le combat et marque les points. + 1 pour le nouveau né. 0 pour l’ancien. + 2, attention ! - 3 et nouvelle contre-offensive du prétendant au trône, très forte, + 4…
Les hommes éternuent sous le souffle de l’indécision et interrogent la course des nuages.
Seules les premières mélodies de la grive litorne revenue de ses villégiatures océanes et des mortes saisons, siffleront impérativement la fin de la partie.
Bientôt. Et cessant d’éternuer, les hommes remiseront enfin au placard bonnets, gants, écharpes, vestons et autres pelures.
Le grand mouvement des choses qui, comme promis dès la première heure, nous conduit vers la onzième.

10:42 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

20.02.2009

20 février, c'est toujours l'hiver...

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50 Km/h maxi...Ou alors... Take a Walk on the Wild Side
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Me suis demandé jusqu'où iraient ses pas
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Hé,  les arbres ? Un bourgeon peut-être ?
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C'était un trou de verdure où coulait une rivière

10:49 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

19.02.2009

Le livre

C'est donc cette bête-là qui sera en librairie le 24 avril prochain.
Et déjà des fâcheux, esprits chagrins,  me conseillent plutôt le salon de l'agriculture que celui du livre !
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12:54 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

18.02.2009

L'étranger

P1070017.JPGCe sera fin avril.
En France, là-bas, ce sera le vrai printemps déjà. Plein de feuilles partout, accrochées aux branches des marronniers, aux arbustes des buissons et des halliers aussi. Et des fleurs jaunes qui vagabonderont sur des talus.
Mais 2500 km, c’est long à parcourir pour un printemps !
La sève ici commencera à peine d’escalader les troncs et les branches, poussant devant elle les premières velléités de bourgeons, les premiers embryons de feuilles en tortillons encore, indécises entre le blanc et le vert. L’herbe au fossé sera encore un peu jaune, étouffée des mois et des mois durant sous le gel et la neige.
2500 km, des bords d’un océan aux frontières des Russies, c’est si long à parcourir, pour un printemps !
Il y aura plus d’oiseaux, des ramiers et des passereaux, tous revenus de leurs quartiers d’hiver. Des cigognes aussi qui planeront sur les champs et claqueront du bec, comme les poètes, le cou très renversé en arrière sur le gros amoncellement de brindilles qui leur tient lieu de nid.
Ce sera fin avril.
Le vent léger sera frais encore quand nous sauterons, très tôt le matin, dans un tout petit bus. Jusqu’à Varsovie. Puis dans un gros bus, avec une télévision qui braille des fois, et des gens qui causent fort. Nous nous installerons  là pour vingt-quatre ou vingt-six heures, direction la frontière ouest, puis Berlin dans la nuit, Hanovre, Bruxelles, puis enfin, exténués mais joyeux, Paris.
Nous aurons passé la frontière sans frontière après Bruxelles. On aura doucement chuchoté sur mon épaule endormie,  "c’est la France." J'aurai regardé défiler mon pays, de l’autre côté d'une vitre anonyme. Je n’aurai pas bien vu ces routes et ces buissons et ces maisons encore assoupies sous l’aurore. Trop de souvenirs devant les yeux. Trop longtemps. Trop d'échecs. Trop de désillusions. Trop de tout.
2500 km, c’est long à parcourir, même quand on n’est plus un printemps !
Le soir, après métro et train rapide, racketteur des pauvres gens, je verrai s’abandonner le jour sur les ondulations de cette campagne charentaise où j’ai si longtemps promené ma vie.
J’irai saluer mon ami. Je lui dirai un mot tendre. Je lui dirai qu'il me manque tellement et que c'était bien sa visite en Pologne.  Juste avant...Jamais je ne suis revenu en France depuis qu'il a quitté la terre. Je ferai un baiser sur ma main et  le soufflerai vers son silence. Une larme. Une seule. Celle de l'amitié trahie par le destin.
Puis, je ne sais pas…J'embrasserai mon fils, mon frère et quelques amis. Ensuite, je ferai ce que je suis venu faire. Pour mon livre.
Je regarderai l’océan, sans doute, comme on regarde les écumes du passé venir encore mouiller ses pas.
Je ne sais pas quel remous de lui s'agitera dans ma poitrine.  Mais ça n'a pas d'importance : on est nulle part et partout chez soi  quand on ne sait plus exactement où on est un étranger.

Ce sera fin avril…
Il neige.

08:57 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

16.02.2009

Sept mains dans la forêt Écriture

manuscrit.jpg

C'est ici et c'est ouvert.

Un cahier d’écriture à autant de mains que la semaine compte de jours : foin, donc , du repos dominical : n'ayant pas la prétention des créateurs d'univers, le cahier ne se sent guère plus fatigué le dimanche que les autres jours !

Cordialement à toutes et tous et bon voyage parmi nous, au fil des jours...

09:11 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

11.02.2009

Rien

P6150048.JPGRien.
Il n’y a rien dans l’âme humaine qui ne soit quelque part perverti par la peur.
De soi-même ?
Mais comment avoir peur de soi-même, à moins d’être en même temps un autre ?
Des autres, alors ?
Mais que sont les autres sinon l’idée que l’on s’en fait, comme une projection de ses propres visions de la vie ?
De la fin, ça c’est sûr !
Mais comment avoir peur d’une fin si c’est vraiment une fin ? Comment avoir peur de rien, s’il n’y a rien, pas même la conscience du rien ?
- J’ai peur…T’as peur de quoi, mon gars ? J’ai peur de rien…Alors, t’es un grand courageux !
M’expliquerez-vous, à la fin ! ?
S’il y a de la peur, il n’y a pas de néant.
Alors c’est d’un dieu qu’on a peur !
Mais comment avoir peur d’un dieu, s’il n’est un dieu mauvais, laid, méchant, cruel, pervers et monstrueux ?
Là, d’accord, je veux bien avoir peur.
Mais vous rendez-vous compte à quel prix ?
Il faudrait incendier la planète tout entière pour rectifier l’abyssale méprise. Et encore…

J’ai marché dans la plaine en longeant des forêts qui se courbaient, se bousculaient, se cassaient et qui hurlaient et qui gémissaient. J’étais effrayé. Je l’avoue bien volontiers.
S’il n’y avait eu ces arbres, je n’aurais ni vu, ni entendu ce vent.
De quoi ai-je eu peur, alors ?
Des arbres ou du vent ?
Je ne le sais pas trop.
Je crois en fait qu’on a peur du rien, amis,  que par ce qu’on nous en  dit et qu’on nous en montre.
Bref, tout ça, c’est du vent…

11:25 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

02.02.2009

Le moine et le parano

DSC_0641.JPGLe jeune moine souriait. Ce qui n’était pas forcément une bonne idée.
Pour deux raisons.
D’abord, parce qu’un ecclésiastique qui me sourit, moi, ça me met tout de suite sur mes gardes. D’instinct, je me demande ce qu’il cherche à me brader de son fonds de commerce métaphysique.
Du miel dans du vinaigre, que je me dis aussitôt.
Ensuite, parce que si le visage de celui-ci, du moins ce qu’on pouvait en deviner entre les broussailles de la barbe orthodoxe, était agréable et assez finement dessiné, le sourire quant à lui dénonçait une dentition clairsemée, en dents de scie, ce qui est un comble en la matière. L’émail des éléments rescapés souffrait en outre d’un jaunissement précoce, d’autant plus contrasté que la blancheur de la neige sur les paysages alentour était absolument éclatante.
Il fume en cachette, le fourbe, que j’ai pensé, malveillant comme tout. De l’herbe, si ça se trouve, même.

Tout ça, c’est bête comme chou. C’est réflexe culturel de l’athée de mauvaise foi. C’est pas glorieux, vraiment ! Ce moinillon était d’une exquise sympathie et il souriait de toutes ses quelques dents parce qu’il était content d’avoir des visiteurs. Tout simplement.
Ah, alors, s’il est content, c’est qu’il n’aime pas la solitude, le bougre ! Il en a plein le froc du cloître. Il doute ! Le monde lui manque !
Un Catogan épais sortait de la calotte et retombait lourdement sur son dos.
Barbe abondante comme des halliers, cheveux très longs, visage osseux, dents en mauvais état…Je jetais mentalement son habit aux orties et l’habillais d’un jean délavé et d’un large tee-shirt approximatif. Il ressemblait alors à un guitariste de groupe pop des années soixante-dix. Une Fender rouge et blanche au bout de ses longs bras maigres qui miaulerait des pentatoniques lui siérait assurément mieux que cet accoutrement, que je me disais.
Et lui il disait que la police était venue la semaine dernière pour les prévenir de ne pas trop s’éloigner de l’ermitage. Un homme bourré d’armes et d’explosifs avait traversé la frontière à la faveur du gel…Un Musulman.
Evidemment, que je le moquais intérieurement. Il est parano, en plus…
Mais qu’on se rassure, on pouvait se promener à notre aise, l’homme était maintenant sous les verrous.
Le jeune moine montrait le Bug retenu par les glaces, avec, sur l’autre berge la Biélorussie et l’œil de Minsk rivé au poteau rouge et blanc.
Le vent glacé, le vent des steppes, soulevait les pans de sa lourde soutane et il posait par moments la main sur sa calotte, de peur qu'elle ne s’envole. Vers l’ouest, du coup.

Je ne parlais pas bien sa langue et nous étions bientôt au chaud, dans la petite boutique que les ermites tiennent à l’entrée du monastère. Je voulais acheter du miel. J’aime le miel et celui des moines, depuis Rabelais, m’inspire toujours, ces moines fussent-ils ceux des liturgies gréco-latines. Du miel que je savais soigné, orthodoxe, du miel toutes fleurs de ce rucher que j’apercevais sous de vieux pommiers, pour l’heure torturés par la neige et le gel.
Le jeune moine, toujours souriant,  opina en branlant du chef quand je lui montrais l’objet de  toutes mes convoitises matérialistes. 15 złotys…Mais il n’avait pas de monnaie, nulle part, à me rendre sur les vingt que je lui tendais…Il avait beau fouiller partout, dans les tiroirs, sous les livres, sous les bibelots religieux, dans ses grandes poches, sous le bureau,  pas un sou.
J’allais faire le généreux et lui proposer de tout garder, histoire de lui montrer combien les mécréants peuvent être magnanimes.
Il me devança et m’offrit une icône affichée à 10 złotys… Mon élan du cœur se brisa tout net.
Toujours le dernier mot en matière de bonté, ces gens-là…Toujours…Le monopole du cœur, comme disait l’autre abruti à l’autre renard, que je grommelais en reprenant le chemin du retour, entre des lacs gelés et des bois silencieux.
Le jeune moine, lui, catogan au vent dans mon rétroviseur, faisait un signe amical de la main et….souriait toujours.

14:22 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET