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06.02.2014

Un texte de Stéphane Beau

Ce que penser veux dire...

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Je relis en ce moment Ce que parler veut dire de Pierre Bourdieu, bouquin que j’avais étudié du temps où j’étais à la fac (ça commence à dater...) et dans lequel j’ai eu envie de me replonger après avoir lu Le Goût des mots de Françoise Héritier – ouvrage qui, sous couvert de déclaration d’amour aux mots, à leur poésie et à leur magie évocatrice, s’applique surtout à resserrer les nœuds et les codes d’une langue élitiste et faussement libre.

Le livre de Bourdieu est intéressant à plusieurs titres. Tout d’abord, parce que du point de vue de la sociologie, il nous rappelle – ce qui n’est jamais inutile – que la langue n’est pas qu’un ustensile commun, partagé égalitairement par tous, mais que c’est avant tout un outil de pouvoir, pouvoir d’autant plus pernicieux qu’il reste la plupart du temps symbolique : « Toute domination symbolique suppose de la part de ceux qui la subissent une forme de complicité qui n'est ni soumission passive à une contrainte extérieure, ni adhésion libre à des valeurs ».
Il revisite par exemple la manière dont le Français, en tant que langue officielle de l’Etat, a commencé par dévaloriser les patois, les dialectes, les langues régionales, en les écartant des organes principaux de la machine sociale : école, justice, emploi, administration, armée... Dans un second temps, une fois que les « parlers locaux » ont été quasi totalement maîtrisés ou remodelés sous des formes folkloriques (comme le Breton, par exemple), le langage officiel a pu s’attaquer aux différentes catégories sociales. Le discrédit ne retombait alors plus sur celui qui ne parlait pas Français, mais sur celui qui le parlait mal ou qui n’en maîtrisait pas bien les codes : l’ouvrier, le paysan, le jeune, l’immigré... Cela permettait aux élites de profiter à la fois d’un système parfaitement égalitaire sur le papier, mais totalement déséquilibré, en termes de pouvoirs, dans les faits.

Et puis le temps a passé et on constate aujourd’hui, que la violence symbolique du langage est en train de connaître une troisième mutation : le pouvoir de la langue repose moins, maintenant sur la qualité de son expression que sur la qualité de son in-expression. Autrement dit, le langage, englué dans les logiques de communication, de management, de propos convenus divise ses utilisateurs en deux camps : ceux qui usent encore des mots pour essayer de dire quelque chose et ceux pour qui les mots ne sont plus que des codes servant à conforter une vérité officielle, une « bien-pensance » formatée et inattaquable.

Ainsi, on a pu voir ces derniers temps, par exemple, une illustration assez nette de cette évolution dans les manifestations des « bonnets rouges » en Bretagne. Il y a un siècle ou deux, ces bonnets rouges auraient été disqualifiés parce qu’ils étaient « Bretons », c’est-à-dire non intégrés au modèle dominant. Il y a une quarantaine d’années, ils auraient été suspects parce qu’ils étaient « populaires », donc pas en mesure de dialoguer et de revendiquer à partir d’un discours élaboré selon les normes en vigueur (qu’on se rappelle des moqueries à l’égard de Georges Marchais ou de Henri Krasucki par exemple). Aujourd’hui, ils sont disqualifiés parce que leurs discours, et leurs actes – qui sont aussi des discours – transgressent un nouveau code qui veut que toute parole qui n’apparaît pas assez mesurée, assez nuancée, assez respectueuse d’une expression polie et policée (les deux termes sont d’ailleurs étonnamment proches) est irrecevable.

De nos jours, donc, le paria, l’inadapté, le malotru, ce n’est plus celui qui fait des fautes de français, c’est celui qui commet des « fautes de pensée ». Cela se constate à tous les niveaux où le « politiquement correct » est devenu la norme et où toute pensée un peu divergente, un peu en décalage avec les canons de la sagesse autorisée, est immédiatement rabaissée et pointée du doigt.
Cela est très net bien sûr, en ce moment, dans tout ce qui touche aux « débats » sur le féminisme, le « masculinisme », l’homoparentalité, le mariage pour tous, le  « genre » et autres sujets brûlants qui divisent la société en deux : ceux qui savent, qui ont le savoir, la culture, le vocabulaire adéquat, les positionnements adaptés ; et ceux qui ne comprennent rien, qui n’ont pas lu les bons livres, qui ne réfléchissent pas et qui ne savent que pratiquer la violence, l’invective, l’agression.

La contestation est ainsi devenue ringarde, réactionnaire, malpolie, incorrecte, et tout ce qui peut relever de ses attitudes, de son champ lexical, de ses modalités d'expression peut être pris de haut, avec dédain ou avec moquerie, selon les cas.
Schéma simpliste qui ne reflète en rien le réel qui, de toute manière, ne se découpe jamais aussi simplement en deux partis opposables, mais toujours en une multitude de points de vues et de sensibilités. Mais schéma idéal pour disqualifier d’office toutes celles et tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, se retrouvent du mauvais côté de la barrière, et pour légitimer ceux qui se trouvent, de par le fait, du bon côté (1).
Et peu importe que les premiers soient parfois moins violents, moins obtus et plus cultivés que les seconds. Le simple fait de tenir des propos qui ne vont pas dans le sens de l’opinion dominante suffit à les disqualifier.
Cette évolution est inquiétante car, si elle n’interdit pas (encore) officiellement l’expression des pensées non conformes aux dogmes en vigueur, elle s’applique toutefois clairement à les rendre inaudibles.

 Il y a quelques temps de cela, un ami à moi, Goulven Le Brech, spécialiste du philosophe breton Jules Lequier m’écrivait ceci au sujet de Georges Palante, penseur polémique que je m’efforce de faire connaître au grand public depuis pas mal d’années : « Palante, comme Lequier est devenu folklorique et peu recommandable sur le plan philosophique... ».
« Folklorique »... Sur le coup, le mot m’a semblé amusant mais un peu décalé. Puis en réfléchissant bien, j’ai compris que le terme était rigoureusement adapté. Folklorique, oui, Palante. Tout comme Lequier et plein d’autres, sans doute : Nietzsche probablement, Cioran, ou plus proche de nous Philippe Muray, tous ces auteurs que les médias aiment citer, évoquer, parfois honorer, mais sans jamais souscrire véritablement à ce qu’ils écrivent, en conservant à leur égard une petite moue complaisante, d’un air de dire : « ils tapent fort, mais on ne leur en veut pas : cela participe au spectacle ». Spectacle folklorique, bien entendu, comme les danses bretonnes ou les chants basques.

C’est ainsi. Il faudra bien nous habituer à vivre dans un monde où la libre pensée et l’esprit critique ne seront rien de plus que les vestiges folkloriques d’une intelligence éteinte. Ce monde arrive à grand pas. Il est peut-être même déjà là...

 (1) La vraie question étant peut-être de savoir qui pose ces barrières, et surtout à qui elles sont utiles...

Stéphane

 

littérature, écriture

 

 

Par ailleurs, vient de paraître aux Editions Les 3 Génies, Hommes en Souffrance de Stéphane Beau.
Dès que je l'aurai lu, je vous en toucherai un mot.
Plusieurs même, tant le propos de cet ouvrage me semble s'attacher à prendre à contre-pied la pensée politique dominante dont nous sommes assommés.

14:05 Publié dans Stéphane Beau | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Il est un signe dont on ne parle jamais entre spécialistes du langage (censés n'avoir aucune culture économique dans le petit jeu universitaire de la spécialisation des compétences), c'est la MONNAIE.
C'est pourtant avec ce signe là, organe sémantique d'un véritable mensonge, d'une véritable discrimination, et d'un véritable détournement de la valeur, que s'opère le meurtre social de chaque instant. Dans la société du crime, tout le reste n'est que littérature.
Aujourd'hui, les bonnets rouges (entre autres,) sont disqualifiés parce que l'euro étant privatisé les politiques censés les représenter ne peuvent que les payer de mots.
La théorie du genre est d'ailleurs une arme idéologique qui elle aussi ignore (ou feint d'ignorer) le pouvoir de la monnaie. C'est peut-être sa première imposture.

Écrit par : solko | 06.02.2014

Ce monde est déjà là. Il suffit de voir les réactions quand on parle de la Syrie ou de l'Ukraine en tenant d'autres propos que ceux des discours officiels et de la presse.

Écrit par : Feuilly | 06.02.2014

Solko et Feuilly : veuillez m'excuser, j'avais oublié de mettre l'annotation de Stéphane en petit 1...
Pour l'heure, je laisse le soin à Stéphane de répondre en premier à vos commentaires.

Écrit par : Bertrand | 06.02.2014

@Solko : Est-ce possible que tu détailles le pouvoir de la monnaie dans la théorie du genre car j'avoue que j'ai un peu de mal à percevoir le lien que tu exposes ? Merci.

@Feuilly : le discours officiel n'est pas dangereux parce qu'il est officiel, mais bien, en effet, parce qu'il dessine aussi, en creux, tout ce qui n'est pas officiel. Cela est très net en ce moment sur la question de l'homophobie. Aujourd'hui, le discours officiel n'admet que deux postures homophobe/pas homophobe. Sauf que poser le débat ainsi n'a pas de sens. Seulement, le simple fait de dénoncer cela nous range déjà dans la catégorie suspecte. Je suis certain que dans la manif pour tous il y avait plein de gens qui, au fond, ne sont pas plus homophobes que cela. Il faut juste qu'ils s'adaptent un peu à des évolutions qui vont trop vite pour eux. Certaines personnes n'ont peut-être jamais eu d'amis ou de proches homosexuels, ce qui leur aurait permis de constater qu'effectivement ce sont des personnes comme les autres, si pire, ni meilleures. Il y a beaucoup de préjugés, d'idées préconçues, mais en plaçant d'office ces sentiments parfois assez confus sur le plan de la réaction intolérable, de la discrimination, du refus de l'autre, on cristallise ces préjugés qui se muent alors en convictions et en motif de combat. On voit donc bien aujourd'hui comment en dénonçant l'homophobie on peut l'amplifier en même temps...

Écrit par : stephane | 06.02.2014

Oh c'est très simple (mais forcément réducteur à expliquer dans ces petits carrés). Pour mettre au second plan l'opposition pauvres/ riches et éviter de travailler à réduire les disparités économiques et les concentrations de privilèges, on centre l'analyse des ce qu'on appelle l'égalité sur l'individualisation du consommateur. Même chose avec le racial, d'ailleurs.
En gros, suis-je déterminé socialement par ce que mon sexe (pardon mon genre, ha ha !), ou ce que la couleur de ma peau disent et montrent de moi, ou par ce que la monnaie ( c'est à dire mon compte en banque, mon héritage garni ou non) dit de moi ( et fait de moi).
J'ai travaillé comme brancardier à l'hôpital américain de Neuilly comme brancardier il y a fort longtemps, et je peux t'assurer que les riches héritières, y compris arabes, s'y sentaient fort peu discriminées.
On ne peut raisonner l'égalité hors de l'économique sans malversation intellectuelle

Écrit par : solko | 06.02.2014

Le problème avec cette histoire de mariage pour tous et de lois sur la famille, c'est qu'on ne peut faire passer un ensemble de lois appeléEs à gérer des cas particuliers et adaptées aux situations des uns et des autres 5homos, hétéros, pères, mères, beaux-pères, parents 1, 2, 3, enfants adoptés, nés soux X, sous GPA, PMA etc...° pour une loi générale, sans aboutir à des réductions drastiques (et parfois presque comiques) de sens.
J'entendais Vincent Autin expliquer qu'en matière de famille, il n'y a plus un seul modèle, "mais que chaque famille est son propre modèle". Au pays de Descartes, ce credo ultra libéral venu d'ailleurs a tout simplement du mal à passer, surtout chez des gens qui ne manient pas majoritairement les subtilités sémantiques de nos braves "élites" et qui entendent "modèle" pour ce qu'il veut dire, tout simplement.
Il eût été simple d'accorder les mêmes droits légaux à cette mosaïque de cas particulier, sans toucher sémantiquement au général, à la res publica, comme on le fait en touchant aux termes "mariage" et"famille". Mais là encore, sous couvert "d'égalitarisme", le gouvernement actuel cherche à individualiser le consommateur, et à le placer à compétition avec d'autres. C'est le credo de l'ultra libéralisme auquel ce gouvernement, plus encore que le précédent, prépare la société : le changement de Hollande, c'était ça ! Résultat : 19% de satisfaits, et une France plus clivée et divisée que jamais !

Écrit par : solko | 06.02.2014

Analyse et commentaire très éclairant de Nauher sur Off shore, à propos de cette question
http://off-shore.hautetfort.com/archive/2014/02/04/la-fureur-de-soi.html

Écrit par : solko | 07.02.2014

Je viens de lire, donc, le texte de Philippe Nauher.
On ne peut en nier l'intelligence ni même, par endroits, la justesse.
Il n'y a en effet que les idiots pour n'avoir pas vu que le projet d'anéantissement de l'individu par le biais de choix idéologiques contraignants, coercitifs, sous les apparences d'une plus grande humanité et égalité ( mariage gay, refonte de la famille culturellement séculaire, notion de sexe transformée en genre) est le but exclusif poursuivi par ces politiques, laquais du libéralisme et du cours d'échange des monnaies. Certes.
Mais il y a ce côté manichéen chez P. Nauher qui, tout de suite, jette le trouble dans le raisonnement : l'ennemi des manipulateurs et des lobbies qui les manipulent eux-mêmes, serait le catholique hétérosexuel. Outre que le propos est un peu dégradant et réducteur pour des individus comme moi qui ne sont pas catholiques pour un sou mais néanmoins hétérosexuels dans le moindre de leurs désirs, la solution est trop facile.

Si tel était le cas, la société n'en serait pas à ce degré insupportable de clivage. Les gens qui nous oppressent de leurs mensonges et de leurs falsifications sont plus intelligents que cela, Philippe : si leur but, comme je viens de le dire, est maintenant clair, l'ennemi à abattre pour l'atteindre n'est pas identifiable au premier venu comme peut l'être le catholique hétérosexuel.
Enfin, quand Philippe Nauher écrit ( je ne lui en conteste nullement le droit ) :
"Loin de se tourner vers les tenants d'un capitalisme moral et rigide, ils ont rameuté les libertaires qui veulent à la fois la reconnaissance juridique et la marginalité identitaire."
je ne peux que lui conseiller d'aller à la rencontre des libertaires ( au sens où je l'entends) pour prendre la mesure de son erreur.
A moins qu'il ne nomme "libertaires" Vallaud Belkacem, son mentor et sa clique d'emmanchés ! Mais alors il y aurait là une falsification et un abus de langage, voire l'entretien d'un confusionnisme intéressé, qui compromettrait l'honnêteté même du texte.
Mais je peux me tromper sur ce dernier point.
Enfin encore, quand on maîtrise bien son sujet, est-il besoin de dire pour argumenter, même en filigrane, qu'on a des amis homosexuels ou arabes ? C'est à mon sens hors sujet.
Est-ce que je dis, moi, que dans ma famille( stricto sensu) polonaise il y a des catholiques pour lesquels j'éprouve une tendresse non feinte, sincère, qu'aucun clivage idéologique ne saurait venir détruire, et qu'on se marre bien ensemble ?
Non. Ben si, je l'ai dit.. Zut !

Écrit par : Bertrand | 07.02.2014

Ah Bertrand, de votre lointaine et "paisible demeure sous la neige dormante",je crains que vous ne mesuriez pas le climat d'hystérie anti catholique qui a régné durant toute l'année dernière en France et qui est bien réel de la part de cette clique de maçons ultra libéraux mais aussi ultra procéduriers. On retrouve dans les éléments de langage assénés matin midi et soir dans les médias ce manichéisme que dénonce Nauher : en gros, il y a les bons français (républicains, europhiles, libéraux dans les faits, à "gauche" dans leurs votes, et laïcs au sens que l'ambigu Valls donne à ce terme, et bien sûr progressistes) et les autres : catholiques forcément intégristes, nationalistes,incultes, réactionnaires et arriérés,etc, etc.
On sait tous que cela relève de la propagande, mais quand la propagande s'empare des textes de la loi, elle cesse d'être uniquement nauséeuse. Au cœur du dispositif spectaculaire, les Femen et leurs manifestations pseudo féministes, implicitement soutenues par un gouvernement qui prend leur égérie en symbole de Marianne sur les timbres français, Femen auprès de quoi la quenelle de Dieudonné n'est qu'un geste de ralliement de collégiens de banlieue, et qui agissent non pas dans un théâtre, mais dans des lieux de culte ouverts au public.
Dans ce climat délétère, ce sont les Autin, dont je cite le sophisme plus haut, les Belkacem, Fourest et le notable Pierre Bergé, grand financeur de campagne hollandaise devant l'Eternel qui prétendent représenter dans l'ordre marchand le mouvement libertaire, aussi libertaire que le facteur est révolutionnaire. Bref.
Dès lors que ces notables profitent d'une situation où de surcroît ils sont majoritaires à l'assemblée mais sans doute pour d'autres raisons, pour toucher à des lois mettant en jeux les mœurs et la filiation de tous, tout en abreuvant les gens de discours moraux délirants (cf Autin plus haut) , il ne faut pas qu'ils s'étonnent de mettre des gens qui ne sont en effet pas des extrémistes par milliers dans la rue. Le bénéfice politique qu'ils croient en tirer et qu'ils en tireront peut-être à coups de propagande médiatique,c'est de se maintenir au pouvoir en faisant exister des clivages encore plus partisans, plus destructeurs aussi.
On cherche en vain les forces de l'esprit et le progrès réel là-dedans. Triste France.
Là-dessus je vous souhaite une excellente journée et je retourne à mon roman, mon bol d'air et mon exil à moi, fait aussi de mots.

Écrit par : solko | 07.02.2014

Bertrand,

Pour précision, quant à ce qui vous semble manichéen dans mon billet.
1-"le catholique hétérosexuel" n'est évidemment pas en soi l'unique ennemi de ce changement radical de société. Il n'en est que la figure synthétique, la cible la plus facile à déterminer et donc à viser. À bien des égards, vous êtes tout aussi concerné, comme je le suis dans mon athéisme (je précise par exemple que «ce que font les Femen est un pur scandale, une dictature que nous condamnons fermement. On ne peut pas défendre la libre-conscience pour soi et entraver celle des autres». Ces mots ne sont pas d'un catho pur et dur mais de Jean-Marc Schiappa, le président de l'Institut de recherches et d'études de la libre pensée".). Mais l'identification du catho hétéro comme ennemi privilégié a l'avantage de conforter les lobbies homo et lesbiens, de raviver chez beaucoup les vagues souvenirs d'un déni religieux et de tenir à distance ceux qui pourraient s'offusquer s'il n'y avait pas ce paravent.
2-Lorsque je parle des libertaires, je l'entends surtout ce terme dans le sens des libertariens américains et de cette nouvelle tendance cool qui, sous couvert de vouloir s'épanouir, demande à ce qu'il n'y ait pas de règles sinon leur bon plaisir. Je vous renvoie au livre de Thomas Frank, "Le marché de droit divin" que j'ai évoqué dans un billet précédent que je mets en lien (excusez ma prétention à me citer...)
off-shore.hautetfort.com/archive/2013/12/05/les-requins-cool.html‎

Écrit par : nauher | 08.02.2014

Cher Bertrand,

En relisant votre critique, je me dois d'ajouter un ultime commentaire.
Contrairement à ce que vous écrivez, il n'est pas inutile de préciser que l'on a des amis arabes ou homosexuels. C'est d'ailleurs ce qu'on finira par vous demander pour obtenir le droit de parler ou d'écrire sans encourir les foudres judiciaires. Ce clin d'œil que vous trouvez déplacé n'était pas une justification première (il n'y a rien de privé dans ce que j'écris) mais un second degré montrant par l'absurde que l'on peut parer à la critique avec trois fois rien. Cette manière de faire est détestable et ceux qui nous gouvernent, les gauchistes, en usent continuellement. Ils aiment la banlieue et vivent place des Vosges. L'arabe de service ou la lesbienne avec qui on discute de temps à autre sont des alibis bien faciles. Vous le savez bien...

Écrit par : nauher | 08.02.2014

Si la figure du catho hétéro comme symbole de l'ennemi au même titre que l'aristo en 1789 ou le juif en 1939 me semble assez hasardeuse, je souscris par contre pleinement à ce qu'écrit Eric Nauher quand il dit :

"il suffit de voir les crétins contemporains se féliciter des prétendus printemps arabes...) continuent de plus bel en vilipendant une France réactionnaire, raciste, fasciste, rance, homophobe, antisémite, islamophobe, et j'en passe. La liste s'allonge chaque jour et elle prend une telle ampleur que sa raison en devient suspecte. Oui, suspecte. Car si le monde est ainsi gangrené par la prêtrise, les culs bénis et les furieux de Dieu, il faut assurément ouvrir des camps (de rééducation il va sans dire...).

La pourriture d'un régime et d'une pensée se juge par le besoin qu'il éprouve (c'est un quasi besoin physique) d'incarner l'ennemi, d'en découdre avec lui. La nécessité de l'ennemi et la démesure de la vindicte. C'est d'une drôlerie macabre que de voir les chantres de la liberté et de la fraternité, sans qu'ils le sachent même tous (1), sur les traces d'une idéologie politique que n'auraient pas désavoué ni Paretto ni Carl Schmitt."

Écrit par : stephane | 08.02.2014

Stéphane,

la figure du juif à laquelle je pensais n'était pas tant celle de 39 (laissons de côté le point de Godwin) mais celle du tournant séculaire des années 1900, et notamment en France (même si je vous concède que la seconde procède pour partie de la première).
Quant à l'aristo de 1789, faut-il rappeler qu'il était immanquablement lié à l'image du curé et que Robespierre voulait instaurer le culte de l'Être suprême...

Écrit par : nauher | 08.02.2014

Il se pourrait bien, oui SolKo, que depuis ma position géographique – qui forcément engendre une distance du directement vécu – ne me donne pas tout à fait la possibilité de prendre la mesure de cette ambiance délétère.
Mais vous me prenez par les sentiments (ah ah ah !)en citant, aussi, Najat Valaud Belkacem . Cette bonne femme représente, focalise, à elle seule, toute la terrifiante réalité de ces réformes dites sociétales et qui ne sont en, fait, que le massacre sauvage de « l’honnête pensée.»
Cette ministre aux dents encore plus longues qu’elle ne les a en réalité ne situe l’exercice de la loi que dans le slip ou la petite culotte. Sortie de là ( si j’ose), il n’y pas de conscience possible !
Je ressens par ailleurs toutes ces misérables tentatives de pseudo-libération comme les exhalaisons du cadavre pourrissant, récupéré par le mensonge, trahi par la faiblesse et la sournoiserie politique, de tout ce qui fut dit, ressenti et écrit en d’autres temps par les intelligences les plus critiques de la fin du XXe. Faute d’être à la hauteur de ces intelligences, ces salopards ont placé l’intelligence à leur hauteur… Au ras des pâquerettes.
Bon week-end à vous, face à votre roman, peut-être…

Merci Philippe pour ces précisions. Mais je crois aussi que si le catho hétéro peut constituer une symbolique destinée à raccourcir – si besoin en était – le cerveau des thuriféraires du législateur, il y en a une autre, plus vaste, moins directement identifiable : la pensée qui rend libre de ses propres choix de vie. J’en veux pour preuve que la loi n’a jamais autant moralisé, jugé en valeur morale, les choix individuels.
Je n’avais pas trouvé déplacé l’allusion au camarade arabe ou homo. Pas du tout. J’ai dû mal m’exprimer. Je l’avais jugée trop facile dans un texte qui a beaucoup de teneur. Elle dénotait, si vous voulez.
Mais vous avez précisé

Écrit par : Bertrand | 08.02.2014

AH oui, Philippe Nauher, pas Eric... Pourquoi ai-je écrit Eric plus haut... mystère...

Écrit par : stephane | 08.02.2014

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