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09.09.2009

Pages de journal : Lecture et écriture

Pour la simple et bonne raison que ces pages existent, qu'elles jalonnent donc un parcours d'écriture,  je continue de livrer ici quelques bribes d'un journal entamé au 1er janvier 2009 et finalement abandonné.

Dimanche 25 janvier

P2150001.JPGJournée entièrement plongée dans la lecture. Toujours Michelet.
Si ce n’était l’exaltation lyrique parfois débordante et les références un peu trop prégnantes à Dieu, toutes ces pages seraient parfaitement à mon goût.
La lecture en est néanmoins très agréable, édifiante et profondément instructive quant aux détails de la Révolution naissante, hésitant entre la chèvre et le choux, entre la république ou la monarchie à l’anglaise, du moins dans sa première instance politique, l’Assemblée nationale, déjà en profond décalage avec la volonté révolutionnaire de la rue.
Une constante humaine, historique. Jusqu’à ce jour du moins, les révolutions ont toujours spontanément produit une superstructure censée les représenter et pour l’essentiel  infidèle à leurs projets.
Parce que le malaise des tripes remonte
au cérébral et que ce qui était directement vécu d'affrontement au monde devient alors politique.

Plus loin, Michelet affirme sa seule croyance au peuple. Là, dit-il en substance, est le seul bon sens et la seule vérité.
J’attends d’être plus avancé dans son oeuvre pour savoir ce que Michelet entend précisément par ¨" le peuple." Le mot a en effet été utilisé à tant de sauces, pas toutes très ragoûtantes, qu’il ne veut strictement plus rien dire. Sans doute faut-il que je le replace dans son époque, vers 1840.
Mais c’est déjà avec une juste raison que Michelet note, à propos d’un ouvrage sans doute d’inspiration marxiste ¨ Les grandes villes, la classe ouvrière absorbe toute l’attention des auteurs de "l’Histoire parlementaire." Ils oublient une chose essentielle. Cette classe n’était pas née. ¨ Et je note avec délectation cette affirmation : ¨ Le paysan est né de l’élan de la Révolution et de la guerre, de la vente des biens nationaux ; l’ouvrier est né de 1815, de l’élan industriel de la paix. ¨
Il me plaît de rajouter que ce dernier, l'ouvrier, est mort de l’élan postindustriel de la haute finance, enchaîné par le crédit et les idéaux prosaïques.
Michelet affirme par ailleurs que le moteur de la révolte était plus du ressort de la philosophie, celle de Rousseau et de Voltaire en particulier, que de la famine qui terrassait alors les campagnes.
Révérence parler, je pense qu’il écrit là une grosse bêtise. Le ventre précède la philosophie, pas l’inverse. On me rétorquera qu’il n’y avait aucune famine en 1968 ; tout le contraire même, de la surabondance,  et que la colère et la révolte étaient manifestations d’une exigence de vie autre, du point de vue de sa qualité. Une révolte philosophique.
C'est vrai.
Mai 68 n’a cependant, ni démoli de prison d'Etat, ni raccourci De Gaulle de 20 cm.


Mardi 27 janvier
4.JPGCe matin, il neige et c’est plaisir de revoir la fine blancheur des paysages en lieu et place de toute la noire pluviosité des derniers jours. Mais c’est une neige humide et à zéro degré. Je crains fort qu’en cours de journée, elle ne se change en pluie.
On aura sans doute remarqué l’attention, sinon l’importance, que je donne à la météo, sujet qui passe pour des plus futiles chez les imbéciles revenus de tout, surtout ceux qui n’ont jamais mis les pieds où que ce soit. Sujet qui ne les préoccupe, en fait, que pour leurs petites vacances.
Mais pour moi, qui vis en terre étrangère et sous un climat tout autre que celui sous lequel j’ai habité jusqu’alors, qui passe en quelque sorte ma vie en vacances,  une journée, une vie même, c’est aussi et beaucoup le temps qu’il y fait et les paysages ainsi sculptés tout autour. J’y suis très sensible.

Mais je dévoile là un des thèmes développé dans ¨ Géographies ¨  que je viens de terminer.


Mercredi 28 janvier
P2150002.JPG
Depuis que je vis en Pologne, je suis plus fragile de santé, sans être cacochyme quand même. Au moins une fois par an, un coup de fièvre alors qu’en France,  il m’était arrivé d’être dix ans sans le moindre frisson.
C’est parce que tu as vieilli, plaisante D. qui ne veut pas que j’incrimine ses latitudes
Car je mets ça sur le compte du climat, non pas sa froidure glacée de l’hiver et sa chaleur moite de l’été, mais sur les brusques écarts de température. Quand le thermomètre remonte ou descend d’un seul coup, en deux jours, de 20 degrés, forcément, l’effort d’adaptation des organismes doit être immense. D’autant que le phénomène est assez fréquent au cours d’une même année .
Au mois de juin dernier, je m’étais mis à trembler comme feuille sous novembre, incapable de maîtriser ni mes membres ni mes mâchoires. C’était grotesque. J’avais dû m’aliter quelques heures pour me refaire une santé. La température avait chuté de 17 degrés dans la journée, de 24  à 7 degrés !
¨ Choc thermique ¨ avait diagnostiqué sans ambages une femme-médecin du dispensaire. Oui, mais encore ? Ah, un thé, du miel et de la vodka et ça devrait aller …Je ne bois pas d’alcool depuis trois ans et demi…Ah, c’est dommage !
C’était la première fois qu’un médecin déplorait ma sobriété.

Nombreuses tentatives pour prendre en photo les mésanges qui viennent se régaler de mes offrandes,  sous la fenêtre. Un pic s’est invité. Un pic épeiche très élégamment plumé. Il fait la loi. Quand il se met à table, les mésanges attendent à quelques branches de là qu’il daigne laisser quelques miettes.
Je parviens à l’observer de très près mais dès que je soulève un coin de rideau pour y glisser l’objectif, il fuit évidemment à tire-d’aile.
Le jaseur boréal n’est pas venu encore.
Pas de peste à l’horizon, donc. Seulement la grippe.

09:06 Publié dans Journal de Pologne - 2009 - | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

La classe ouvrière a disparu, à mon sens, avec la chute de la sidérurgie et des grands complexes. On a plutôt aujourd’hui de petites firmes dispersées un peu partout (même si elles appartiennent à la même maison mère ou si elles enrichissent les mêmes actionnaires), firmes qui demandent plutôt une main d’œuvre spécialisée (techniciens, etc.).

Quant au monde paysan, celui qui a fait vivre les seigneurs au Moyen Age, celui qui mourait périodiquement de faim et qui représentait plus de quatre-vingts pour cent de la population, on peut considérer qu’il a disparu aussi. Il reste peut-être trois % de la population active qui travaille dans l’agriculture. Et rien de commun entre les grands propriétaires de la Beauce ou de la Marne et le petit fermier qui, avant guerre encore, faisait vivre sa famille en autarcie avec son petit lopin de terre.

Quant aux autres, tous les autres, diplômés ou pas, ils attendent au chômage qu’un travail se présente. Déjà bien contents s’ils en trouvent un, ils ne vont certainement pas se mobiliser en masse pour faire la révolution. Pourtant, chaque jour, il me semble que nos droits sociaux se rétrécissent comme une peau de chagrin.

Comme par ailleurs on nous apprend à devenir combatifs et à écraser notre voisin (c’est le principe même de la sacro-sainte concurrence), chacun devient de plus en plus individualiste et donc égoïste. D’ailleurs le modèle qu’on nous offre comme étant l’idéal (posséder des objets afin de montrer ma réussite sociale) va dans ce sens de l’écrasement de l’autre. Dans un tel contexte, on voit que les grands financiers qui tiennent les ficelles de tout cela ont encore de beaux jours devant eux.

Il nous faudrait un autre Michelet pour venir expliquer tout cela.

Écrit par : Feuilly | 09.09.2009

"Quant au monde paysan, celui qui a fait vivre les seigneurs au Moyen Age", oui. Mais surtout qui faisait vivre les affreux corvidés du clergé...La dîme était l'impôt le plus détestable et le plus lourd à supporter pour le paysan. Charité bien ordonnée, n'est-ce-pas..etc...D'ailleurs, c'est le clergé qui a sonné la contre-révolution. Bien plus que la noblesse.
Michelet analyse parfaitement cette situation : En dépossédant le clergé de ses biens, la révolution n'a fait que reprendre ce qui lui appartenant car tous ces biens avaient été, en fait, donnés au clergé pour qu'il en fasse une terre nourricière.

Le monde ouvrier quant à lui s'est écroulé surtout quand, parvenu grâce à son exploitation, au stade supra-technique de la production, le capital n'a plus eu besoin de lui, que fortement spécialisé...Et c'est là que toute la théorie marxiste s'effondre comme château de cartes. Elle n'avait pas envisagé cette mise à mort par le non-besoin de main d'oeuvre et l'emprisonnement par le crédit, la consommation, le leurre de la marchandise...

Écrit par : Bertrand | 09.09.2009

Oui, c'est ce que je dis: l'effondrement des grands complexes sidérurgistes et le besoin actuel de techniciens.

Écrit par : Feuilly | 09.09.2009

Bonjour,

L’intérêt que vous portez à Voltaire m’incite à vous indiquer ceci :

Il y a deux ans une lecture attentive de sa Correspondance (treize volumes à la Pléiade) m’a conduit à publier un livre dont le contenu ne cesse de me surprendre, dans la mesure où la mise en relation de 1500 extraits environ de cette même Correspondance et des événements historiques sous-jacents ne paraît pas pouvoir laisser place au moindre doute sur le caractère délibérément faussé de l’image qui nous a été donnée de ce personnage.
Je souhaiterais vivement que vous puissiez partager mon extrême surprise en consultant, si vous le voulez bien, la rubrique "livres" du site :
www.cunypetitdemange.sitew.com

Tout à la fin de cette rubrique, là où apparaît une reproduction de la couverture de "Voltaire – L’or au prix du sang", un clic sur le mot "Voltaire" (à gauche, en bleu) vous permet d’accéder aux quarante premières pages du livre lui-même.
Cette façon quelque peu abrupte de venir vers vous ne fait sans doute que rendre compte de mon propre désarroi, car, si je ne me trompe pas, un énorme travail de réinterprétation reste à faire, et non sans conséquences diverses…

Très cordialement à vous,

Michel J. Cuny

Écrit par : Michel J. Cuny | 16.04.2012

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