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07.12.2014

D'un point, l'autre

Je lis que mon partenaire des Editions du Bug, là-bas, dans son quartier historique de la Croix rousse, pousse une juste colère contre les envahisseurs barbares de la fête spectaculaire, une de ces fêtes de l’abrutissement des consciences, une de ces fêtes vautrée dans la débauche surchauffée de musiques sans musique et de lumières sans éclat.
Je lis que le ruisseau torrentiel du mensonge f
littérature,écritureestif pénètre sans vergogne jusques chez les gens de l’immense cité et vient« mourir dans les salons des riverains, qu’un nouveau-né y dorme, qu’un vieillard y agonise ou qu'un type normal tente de se reposer de sa journée de travail. »

 Je soulève sur la nuit le rideau de ma fenêtre.

 Il est 16 heures ; il fait bien sombre déjà.

Le village grelotte sous une petite couche de neige gelée qui s’accroche depuis des semaines à ses toits silencieux et aux branches de ses arbres. L’unique rue est déserte où s’engouffre le vent mordant de l’est, à peine éclairée par l’œil orange pâle d’un vieux réverbère.
Les gens sont chez eux.
Je me demande parfois ce qu’ils font de ces longues soirées de solitude hivernale, ces gens, avec lesquels je partage un coin de ciel planté sur la géographie…Lisent-ils comme je lis ? Ecrivent-ils comme j’écris ? Font-ils des mots croisés ? Des mots fléchés ? Des sudokus ? Ou regardent-ils, le cerveau éteint par les défaites, la  parole atone d’une télévision ?
Le village muet de froidure ne livre rien de l’intimité de ses feux. Telle une entité recroquevillée sur le sein de l’hiver continental.
Un animal sauvage - renard, élan, chien viverrin, grand cerf ou chevreuil - rôde sans doute aux lisières forestières toutes proches, aiguillonné par cette immobilité désertique des territoires humains.
Il y a un monde entre les mondes. Nous habitons ainsi mille planètes aplaties sous une même voute.
Je baisse le rideau sur la chaleur de  ma maison.
Ma fille lit un polar traduit du norvégien, ma bonne amie fait mille choses à la fois, une traduction, une écharpe, un repas, une présence.
Je replonge dans l’orthographe grammaire, mise en pages d’un manuscrit.
Le même, très certainement, dans lequel essaie de se plonger l’homme de la Croix rousse.

C’est avec ce qu’ils portent fièrement d’eux-mêmes, à l’intérieur, que les hommes tardent à se reconnaitre, d’un bout d’un monde à l’autre, par-delà les encombrantes convictions, pour balayer d’un revers de la main le brouhaha des fêtes, qui, pour seule raison d’être,  n'ont que celle de tuer l’esprit de la  fête.

06:51 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

" Homo festivus", dernier homme, nihiliste convaincu, la fête et ses réjouissances, la doctrine des "Grands événement", commémorations, surcommémorations, rappel de ce qui fut pour oublier que devant c'est le vide, fêtes aux masques mortuaires, fêtes sans joie, fêtes humiliant LA fête, procédures prédictives du commerce de la distraction enrégimentée, alignement des esprits au nom de la convivialité, immersion de l'individu dans la mascarade sans valeurs, faux carnaval aux chairs de pacotille, épuisement des esprits, dépressions des idées, vacuité, vacuité entre les vides et les vides qui sont partout, fêtes, spectacle, faut que ça sonne historique, inouï, audimatable la fête, la fête des ennuis juxtaposés, des boites com infâmes aux messages humanistes, Red Bull mon frère, Red Bull, tu seras comme moi, comme nous , comme eux, Red Bull aux cornes élimées, fraternité de solitudes ignorantes d'elles-mêmes, le grand silence au coeur du tintamarre, la fête l'objectif politique numéro un, l'aplatissements des reliefs, le débordement du néant, l'incroyable symphonie d'un orgasme sans cesse reporté, à venir, à attendre, la Parousie de l'orgasme, attends encore mon frère une Red, puis danse macabre sur une musique d'apocalypse, fête de la mort, du désastre populiste, joie-concept, simulacre pour creuser des abîmes sur les bords du ciel.
Fêtes tristes, fêtes de la haine, fêtes schizophrènes, fêtes la guerre, pas l'amort et touche pas à ma Red, Fêtard de tous pays, ensoleillez-vous!" La fête ah ça...

Écrit par : Cleanthe | 07.12.2014

Et Jagoda, c'est en polonais traduit du norvégien qu'elle lit son polar ? C'est quoi le titre ?

Écrit par : Michèle | 07.12.2014

" Il y a un monde entre les mondes. Nous habitons ainsi mille planètes aplaties sous une même voute."

Eh oui, restent les courageux qui franchissent les lignes...

Écrit par : Michèle | 07.12.2014

Les tueurs de fête sont aussi les tueurs de pays.

Écrit par : solko | 07.12.2014

Suis à la bourre pour faire écho aux commentaires, c'est pas bien, c'est pas chouette, c'est pas courtois, mais c'est pas tout.
merci Cléanthe de cette longue et fournie contribution. La fête est morte. Vive la fête !

Michèle, je suis bien incapable de te dire le titre. Faudra que je demande. Selon les bribes que j'ai entendues, c'est un peu occulte, comme trame.

Pour vous, honorable associé des Editions du Bug dont le front sue sous les mises en pages, je citerai, de mémoire, Giraudoux : les pays sont comme les fruits, les vers sont à l'intérieur.

Écrit par : Bertrand | 10.12.2014

Les commentaires sont fermés.