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03.01.2014

Georges Brassens cité à comparaître -1 -

Brassens.jpgNous avons la prétention plus ou moins désespérée de publier de-ci de-là notre littérature. Nos velléités artistiques en matière d’écriture plus exactement.
Je me demande souvent - ce n’est pas nouveau - si nous ne sommes pas les uns et les autres qui nous adonnons à cette pratique, des décalés complets, des fous furieux n’ayant pas tout à fait pris la mesure de l’état de notre époque et si, partant, nous vivons réellement dans ce monde autrement qu’en tant que risibles zigotos.
Aussi me décidé-je sur-le-champ, pour illustrer mes doutes en même temps que  l’insondable idiotie de nos sociétés procédurières à l’affut du moindre mot pouvant échapper à leur contrôle idéologiqu
e et totalitairement démocratique, d’ouvrir chaque vendredi cette chronique : Georges Brassens cité à comparaître.
J’imagine donc des textes écrits dans les années cinquante et soixante, de main de maître et par un esprit libre, tombant dans les oreilles démocratiquement bouchées des imbéciles au pouvoir.
Il y a là matière à écrire 52 chroniques au moins. Je n’y ai pas encore mûrement réfléchi, mais, connaissant parfaitement la plume de Brassens, en la confrontant à l’esprit des législateurs d’aujourd’hui, j’en suis certain.
Le drame dans tout ça, c’est que je pense sincèrement que Brassens passerait aujourd’hui effectivement la moitié de son temps devant les tribunaux, lui qui n’avait même pas d’avocat ! C’est en dire assez long sur la décadence achevée dans laquelle nous évoluons et la placidité de bovins avec laquelle nous l'acceptons : la censure des années cinquante et soixante, moins coquette mais plus brutale que celle d’aujourd’hui, était in fine plus conséquente.
Parce qu’elle s’attaquait à des faits plutôt qu’a des fantasmes, qu'elle agissait par pragmatisme plutôt sur par procès d'intention, qu'elle ne confondait pas le mot et l'acte. Cette censure qui se nourrit des amalgames est, dans l'histoire, l'apanage des sociétés totalitaires.
Et c’est, pour ma part, à se tordre de rire pour éviter d’avoir à en pleurer de désespoir.

 *

1952/2014

Chronique 1 : Georges Brassens. Madame la Garde des sceaux porte plainte pour outrage à magistrat

 Le juge pensait, impassible
« Qu'on me prenne pour une guenon
C'est complètement impossible »
La suite lui prouva que non !


 [....]

Lors, au lieu d'opter pour la vieille
Comme aurait fait n'importe qui
Il saisit le juge à l'oreille
Et l'entraîna dans un maquis !


[....]

La suite serait délectable
Malheureusement, je ne peux
Pas la dire et c'est regrettable
Ça nous aurait fait rire un peu !
Car le juge au moment suprême
Criait :«maman», pleurait beaucoup
Comme l'homme auquel le jour même
Il avait fait trancher le cou.

Motivations de Madame la Garde des sceaux :

" Nous sommes dans un État de droit et dans une communauté de citoyens profondément attachés aux valeurs constitutives de la République. On ne peut dès lors laisser des artistes, même protégés par la liberté d’expression et de création à laquelle nous sommes tous profondément attachés, insinuer qu’un magistrat puisse être assimilé à une guenon et, de surcroît, sodomiser par un abominable gorille. Entre le bel esprit frondeur et la gauloiserie barbare, il y a une ligne que Georges Brassens a franchie.  Ce n'est pas acceptable !"

11:13 Publié dans Brassens au tribunal | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Bravo. C'est effectivement très con, et vous avez malheureusement plus que raison. Je fais suivre sur Facebook (émissaire', "ça va de soi").

Écrit par : collignon | 03.01.2014

Merci. Je pense aussi à des strophes du poète sétois qui feraient bondir "le premier flic de France" si elles étaient écrites aujourd'hui. Quant à Vallaud Belkacem, elle ferait interdire la moitié de l’œuvre. Pensez-donc ! Un misogyne pareil !

Écrit par : Bertrand | 03.01.2014

Si Brassens vivait aujourd'hui, il regretterait le temps de De Gaulle. Un comble !

Écrit par : Feuilly | 03.01.2014

Un comble, comme tu dis. Nous évoluons d'esprit tels les écrevisses.

Écrit par : Bertrand | 03.01.2014

Ha ha ha ! Excellent.

Écrit par : solko | 04.01.2014

Comme vous le disiez en substance dans un commentaire ici-même il y a quelques années : quand le bateau fait naufrage, le choix nous reste de la pilule de cyanure ou du grand éclat de rire.
Comme nous n’aimons point le cyanure, j’espère faire en sorte qu’on se fende bien la pipe ici tous les vendredis matins.
Toute en faisant la démonstration de l’insondable fourberie de la pensée dominante, propre sur elle et sale en-dessous

Écrit par : Bertrand | 04.01.2014

Les commentaires sont fermés.