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26.03.2014

Limites

littératureEn ce minuscule lieu perdu de l'arrière- campagne, les pieds sur la mousse humide, je mesure combien est encore dérisoire, préhistorique, antédiluvienne même, l’organisation des hommes entre eux.
Si je fais deux pas en avant, je réintègre mon monde. Je suis en Europe, Schengen, je suis sous les lois de Paris, de Madrid, de Lisbonne, de Rome et de Trifouillis les oies…Je n’ai pas besoin de visa sur un passeport, je n'ai même pas besoin de passeport du tout, je suis quasiment à la maison.
Si je pouvais faire deux pas en arrière, toutes les lois et la plupart des valeurs qui régissent ma vie sociale seraient abolies en une seconde à peine. Même mon alphabet, mon cher alphabet, celui que j'ai appris en culottes courtes, au début, avec lequel tous les jours j’essaie de me dire dans ce monde, ne me serait plus d’aucune utilité.
Peut-être même irais-je manu militari tâter de la paille humide du cachot néo-collectiviste.
Je mesure, là, combien est fragile la liberté de mettre un pied devant l’autre sur une planète aplatie sous la botte et
raccommodée, rapiécée, par la politique des hommes. Homo erectus, lui, passait les fleuves, les ruisseaux et les montagnes sans avoir à montrer patte blanche. Homo erectus ignorait la politique. Une ignorance qui faisait de lui un savant.
J’ai une vague impression, aussi, d’avoir toujours vécu ici. Sur des frontières. Entre crépuscule et aurore, sans jamais savoir trop dissocier lequel annonçait la nuit et lequel anticipait la lumière. Sinon par l'illusion et la volonté d'exister. Vécu sur l'expérience des limites.
De l'autre côté de ce poteau blanc et rouge, commencent les Russies. Celle de Minsk et celle de Moscou. Où ronronnent des canons. Au cas où...

Et je me demande bien ce qu’en pensent les gens de la ferme, là, tranquilles, peinards, sur leur petite colline. Savent-ils qu’ils sont un pointillé. Un pointillé virtuel sur la carte et tellement dangereux sur la terre ferme, quand la folie risque de rallumer une fois encore le feu aux poudres.
Et ces grands corbeaux que je vois tournoyer, avec des reflets bleus sous leurs ailes déployées, qui vont d’un saule à l’autre, d’une rive à l’autre du fleuve, qui croassent d'un système à l'autre, savent-ils leur supériorité politique ?
Qu’ils sont bien au-dessus de l'intelligence barbare des hommes ?

08:00 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, écriture |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Les limites sont toujours fascinantes, puisqu'elles séparent deux mondes. Pourtant, quand elles deviennent murs, comme à Berlin ou en Palestine, elles portent sur elles la honte de ceux qui les ont construites.

Écrit par : Feuilly | 26.03.2014

... et de ceux qui font ou ont fait allégeance à ces murs.

Écrit par : Bertrand | 27.03.2014

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