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11.03.2013

Maupassant, Brassens

Ils ont plein de choses en commun, ces deux-là : ils arboraient de fortes moustaches, ils avaient le talent fulgurant des étoiles filantes - l'un est mort à 43 ans, l'autre à 60 -  ils étaient  de grands pourfendeurs de soutanes, et ils sont, dans l’art de manier la langue, d’inégalables références pour mézigue.

Alors, l’un - le moins loin de nous - s’est-il inspiré de l’autre ? Ce qui ne me déplairait pas.
Est-ce la rencontre fortuite de deux esthètes de génie ? Et ça me réjouirait, que de tels esprits aient pu concevoir une même tournure de langage, à un siècle d’intervalle, sur deux mots tabous,  l’un pour « cocu », l’autre pour « enculé. »
Est-ce tout simplement une expression figée que j’ignore ? Ce qui me décevrait beaucoup.

  Guy-de-Maupassant.jpg

M.DE GARELLE : Ne jouons pas sur les mots et avouez-moi franchement que j’étais…
MME DE CHANTEVER : Ne prononcez pas ce mot infâme, qui me révolte et me dégoûte.
M. DE GARELLLE : Je vous passe le mot, mais avouez la chose.

 Maupassant - La Revanche -
Gil Blas
le 18 novembre 1884 - Recueils  Le Rosier de Mme Husson et Contes grivois

 

 Brassens.jpg


Lâcher ce terme bas, dieu sait ce qu'il m'en coûte,
La chose ne me gêne pas mais le mot me dégoûte,
J' suis désolé d' dire « enculé ».

Brassens - S’faire enculer -
Titre posthume
-





Mis en ligne en août 2011

10:12 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Très bien observé, félicitations.
Ils sont très beaux, et quels talents !

Écrit par : Alfonse | 11.03.2013

Cela ne serait-il pas un rappel du poème de Lattaignant "le mot et la chose" qui connût quelques dérives encore plus galantes que l'originale et que notre érotomane Maupassant et notre poètes épris de français (mais lequel est lequel ?) ne pouvaient avoir manqué ?
La littérature libertine recèle de toute façon de telles dispositions allusives que je ne serais pas surpris que l'on trouve d'autres sources ailleurs encore (confusément, je me souviens d'avoir lu quelque chose de la même eau, qui n'était pas de l'abbé ci-dessus et qui était plus gaillard).

Écrit par : Le Tenancier | 12.03.2013

Effectivement, Tenancier, vous êtes vraiment un commentateur éclairé !Je n'avais pas pensé à L'abbé malgré lui et à son poème libertin, Le Mot et la chose.
Pourtant,qu'est- ce quon a pu me casser les pieds ( et je suis poli) avec "j'ai du bon tabac dans ma tabatière" etc...

Écrit par : Bertrand | 13.03.2013

Argh, encore une faille dans ma culture ! Qui est donc cet abbé dont vous parlez ? Et quel rapport avec "J'ai du bon tabac" ?
Quant à la poésie libertine, qu'elle soit allusive ou plus "crue", j'en reste de toutes manières grand amateur (même s'il me manque clairement des références en la matière...).

"... j'ai du bon tabac, tu n'en auras pas" ;-)

Otto Naumme

Écrit par : Otto Naumme | 13.03.2013

Madame, quel est votre mot
Et sur le mot et sur la chose ?
On vous a dit souvent le mot,
On vous a souvent fait la chose.
Ainsi, de la chose et du mot
Pouvez-vous dire quelque chose.
Et je gagerai que le mot
Vous plaît beaucoup moins que la chose !

Pour moi, voici quel est mon mot
Et sur le mot et sur la chose.
J'avouerai que j'aime le mot,
J'avouerai que j'aime la chose.
Mais, c'est la chose avec le mot
Et c'est le mot avec la chose ;
Autrement, la chose et le mot
À mes yeux seraient peu de chose.

Je crois même, en faveur du mot,
Pouvoir ajouter quelque chose,
Une chose qui donne au mot
Tout l'avantage sur la chose :
C'est qu'on peut dire encor le mot
Alors qu'on ne peut plus la chose...
Et, si peu que vaille le mot,
Enfin, c'est toujours quelque chose !

De là, je conclus que le mot
Doit être mis avant la chose,
Que l'on doit n'ajouter au mot
Qu'autant que l'on peut quelque chose
Et que, pour le temps où le mot
Viendra seul, hélas, sans la chose,
Il faut se réserver le mot
Pour se consoler de la chose !

Pour vous, je crois qu'avec le mot
Vous voyez toujours autre chose :
Vous dites si gaiement le mot,
Vous méritez si bien la chose,
Que, pour vous, la chose et le mot
Doivent être la même chose...
Et, vous n'avez pas dit le mot,
Qu'on est déjà prêt à la chose.

Mais, quand je vous dis que le mot
Vaut pour moi bien plus que la chose
Vous devez me croire, à ce mot,
Bien peu connaisseur en la chose !
Eh bien, voici mon dernier mot
Et sur le mot et sur la chose :
Madame, passez-moi le mot...
Et je vous passerai la chose !

Écrit par : Abbé Lattaignant | 13.03.2013

Ah, grand merci, cher Tenancier/Abbé (je l'ai toujours su ! La tonsure, sans doute...)
J'avoue beaucoup aimer la finesse de... la chose !

Otto Naumme

Écrit par : Otto Naumme | 13.03.2013

Cher abbé, quelle trouvaille ! Oui,on retrouve là l'expression quasi intégrale employée par Maupassant ! Vous avez "diablement" - ce qui n'est pas bien pour un abbé - éclairé ma lanterne(!)
Cher Otto, sans la chose on est bien peu de chose, n'est-il pas ?

Écrit par : Bertrand | 14.03.2013

Pax vobiscum, mon fils.

Écrit par : Abbé Lattaignant | 14.03.2013

Eh oui, cher Bertrand ! J'en suis tout chose.

Otto Naumme

Écrit par : Otto Naumme | 15.03.2013

Les commentaires sont fermés.