05.01.2009
En vrac
J’ai commencé l’année par une étourderie.
A peine sorti de la douche que je me suis engouffré dehors. La neige était dure sous mes pas, il y faisait moins 16. Mes cheveux encore mouillés et dressés sur la tête ont aussitôt gelé et je me suis demandé soudain, nom de dieu, jusqu’à quelle profondeur ça a gelé là-dedans !? J’ai essayé de penser. Ça a à peu près fonctionné. J’en ai été un peu rassuré.
J’ai pensé à la Palestine. J’ai pensé à ce conflit de soixante ans et que le monde marchait dans sa conscience à la vitesse des escargots quand ils sont vraiment très lymphatiques.
En fait, cette nouvelle année n’a de nouveau qu’un nouveau chiffre à la clef. Un neuf ancien. Sarkozy fera tout ce qu’il est humainement possible de faire pour la paix. C’est-à-dire rien ou le contraire de rien. On sait trop de quel côté du canon il se trouve et ce dont humainement, il est capable.
Et ce genre de conneries, et ce genre d’agressions de l’impérialisme sauvage israélien, et tout le fourbi, continueront pendant 365 jours. Puis on s’embrassera une nouvelle fois, on fera un feu d’artifice et péter du champagne, et ce sera reparti pour 365 nouveaux jours de stupidités humaines.
De guerre lasse, j’ai choisi l’éloignement. Lâchement ? Mais ajouter quoi au bruit dément du monde ? Ajouter quoi qui ait un sens et qui soit autre chose que de la bonne conscience pas trop chèrement payée et jetée comme bouteille à la fureur des océans ?
Rien.
Ne plus se sentir concerné, responsable, de la barbarie de son espèce. Pas moins. Ne pas mourir de la mort d’un monde répétitif. Essayer de rester debout.
L’hiver frappe dur. La neige et les températures ont tout statufié. Même mes doigts. Impossible de gratter la guitare. Le vent et le maniement du bois de chauffage les ont fendus à leur extrémité. Douleur au moindre appui sur la corde et je n’ai pas la dextérité de Django. J’ai besoin de mes dix doigts, moi.
Je ferai comme les oiseaux : Je chanterai aux beaux jours revenus.
Direction Włodawa samedi, sur la frontière ukrainienne, croisé deux énormes élans qui cheminaient sur la solitude des champs, entre deux morceaux de forêts où le soleil dégoulinait une agonie rouge sang sur la neige, la femelle devant et le mâle avec son imposante ramure derrière, qui suivait à distance. Première fois que je voyais ces grands cervidés en vadrouille. Impressionnant. Une errance glacée. Et le vent qui hurlait et la neige qui soulevait ses cotillons blancs, comme au bal.
Je suis un triple idiot d'avoir laissé l'appareil photo à la maison. Philip pensera, écrira peut-être, que c'est impardonnable !
C’est cela que j’ai à dire…Rien de moins.
Peut-être que, finalement, ça a gelé en profondeur…
15:08 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : littérature | Facebook | Bertrand REDONNET
Commentaires
bonjour monsieur Redonnet,
heureux d'être tombé sur votre site, un jour blanc et, disons, "sans"...; j'y ai lu des mots qui m'ont bien accroché, ci, et là : brassens, l'anarchie, le reste...
un peu d'air, quoi!
merci
bien à vous là-bas
Écrit par : alf | 05.01.2009
Salut B.
C'est moi qui vous ai envoyé ces deux élans, messagers de nos angoisses et de nos peurs, de nos rêves et de nos désirs.
Heureux qu'ils vous aient séduit.
Vous n'auriez pu les capturer en aucune manière.
Les pensées, les sentiments dont ils émanent, et qu'ils inspirent, ne sont pas matériels.
Ils sont le vent, le froid, mais aussi la brise et la tiédeur.
Ils sont le muscle et la pensée, ils sont blessures et cicatrices.
Ils sont le temps et la fin.
Ils nous attachent aux mêmes croyances.
Ils nous séparent des chaires tant aimées.
Ils sont le fil de nos échanges et de nos signes.
Ils nous rapprochent et ils s'éloignent.
Ils sont l'annonce de notre continuité.
La Plaine Saint-Denis vous grelotte un salut. La suite pour bientôt. Philip.
Écrit par : Philip Seelen | 05.01.2009
Toi qui étais parti loin pour oublier la bêtise des hommes et pouvoir jouer du Brassens à ta guise, voilà le grand froid de là-bas t'a privé de ta guitare. Il ne reste que la neige et les deux élans qui se promènent dans l'immensité.
Écrit par : Feuilly | 05.01.2009
Rien de moins... que l'écriture, oui, pour notre plus grand bonheur.
Et c'est bien au chaud (la folie des drones c'est loin, chez les "autres" - et quel effet ça nous ferait si c'était nous qui devions fuir dans le noir et le froid sous les bombes avec nos enfants à protéger), c'est au chaud que nous rêvons à de grandes errances glacées.
Écrit par : michèle pambrun | 06.01.2009
Pas excatement au chaud en ce qui me concerne...Moins 27 cette nuit, tuyauteries pétées, plus de chauffage quasiment, nuit prochaine du même style...Il fait - 20 la journée et pour trouver un plombier, fût-il polonais futile, bernique !
Je vous raconte ça, mais franchement, qu'est-ce que ça vient faire là ?
Pendant ce temps-là, on dit pas du mal de Sarkozy, c'est déjà ça...
Écrit par : B.redonnet | 06.01.2009
Alf, bienvenue parmi nous...On est une bande de saltimbanques qui prom'nons nos mélancolies à la barbe du monde...On vous met un couvert...
Cordialement
Écrit par : B.redonnet | 06.01.2009
... Merci pour l'accueil, à bientôt!
Écrit par : alf | 06.01.2009
Très joli texte, comme souvent. Pas très indiqué pour un type comme moi, déjà amplement et excessivement démissionnaire, mais impossible de ne pas m'y retrouver (au détail près que je n'aurais pas formulé tout à fait ainsi l'épisode israélien, mais bon, qu'importe).
On a froid rien qu'en vous lisant. Et on sait bien, oui, que les 365 jours à venir seront du même acabit que les précédents ; décidément, l'Histoire est Tragédie. Un jour, tout s'arrêtera.
Écrit par : MV | 07.01.2009
L'hiver frappe dur. J'ai même froid aux pieds en ce moment, en vous écrivant !
Écrit par : unevilleunpoeme | 07.01.2009
C'est un bien rude hiver que tu nous décris....
Ta guitare est au chômage, mais je te fais confiance pour garder le coeur en chansons...
En passant par chez toi je viens t'apporter mes voeux pour une année pleine de joies et de santé ... Je ne peux même pas t'apporter un rayon de soleil aujourd'hui la Provençe est sous la neige ....
Écrit par : Débla | 07.01.2009
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