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13.10.2011

Qu'est-ce que j'en sais, moi, de tout ça ?

littératureUne guêpe s’est fourvoyée entre les plis et les replis du rideau de la fenêtre. Prisonnière, elle s’affole, cogne la vitre, bourdonne, vrombit, s’agite, s’arc-boute, enrage et tempête.
L’enfant pousse un cri, repousse ses cahiers et ses livres, se lève d’un bond et appelle au secours :
- Une guêpe, viens vite ! Y’a une guêpe dans ma chambre ! Une grosse guêpe !
Je suis en train d’écrire un conte, de le réécrire plutôt. C’est l’histoire d’un enfant du Poitou, Jean, qui est si bête et qui fait tellement d’innommables conneries, qu’on le surnomme partout Jean le Sot…J’ab
andonne donc Jean le Sot à ses frasques et me dirige vers la chambre.
- Où ça ?
- Là. Tu vois pas ? Sur la fenêtre…
L’enfant est vraiment effrayée. Je tue l’insecte avec un chiffon. L’enfant pousse un soupir de soulagement, me remercie, se rassoie derrière son bureau et reprend livres et cahiers. Je jette un œil par-dessus son épaule : przyroda, la nature, l’environnement…
Bon.
Jean le Sot…Je me rassois aussi derrière mon bureau, dans l’autre pièce. Je regarde par la fenêtre. Il fait gris, les feuilles déjà marron se balancent entre deux coups de vent. Certaines viennent mourir sur la vitre où ruissellent les premières ombres du soir.

Jean le Sot a reçu l’ordre de sa mère d’aller à la foire de Lussac-les-Châteaux…
- C’est un peu dégueulasse ce qu’on a fait.
Je me retourne  sur ma chaise pour voir l’enfant plus loin, dans le prolongement, par la porte ouverte de sa chambre.
- Comment ça ? Qu’est-ce qu’on fait ?
- On tue les animaux, comme ça, sans souci, d’un coup de chiffon… Hop ! C'est fini ! Mais on n’a pas le droit, en fait.
- Ben fallait la laisser dans ta chambre, alors, cette guêpe.
- Oui, peut-être.. Mais on tue et on n’est même pas punis… On n’a pas le droit, je te dis. Les  animaux, c‘est des êtres vivants comme nous...
- Oui, bon, d’accord…Mais si elle t’avait piquée cette guêpe, hein ?
- Non … Je ne crois pas…Elle avait pas l’air méchante. T’aurais pas dû la tuer.
-T’en as de bonnes, toi !  Fallait pas m’appeler !
- C’est vrai…
L’enfant regarde dans sa poubelle à papiers où sans vergogne j’ai jeté l’insecte.
-  Hé, imagine un peu qu’on aurait vécu à l’époque des dinosaures…On tue les animaux parce qu'on est les plus forts, les maîtres de la terre. Mais à l’époque des dinosaures, on aurait été comme des mouches et ils nous auraient bouffés tout crus, on aurait eu peur de tout… On aurait moins fait les malins. Tu crois pas ?
Je souffle, un peu agacé.
- Oui. Enfin,  j’en sais rien.. C’est pas grave tout ça. Allez, fais tes leçons… Et puis, tu sais, les animaux ne savent pas qu'ils vont mourir, alors...C’est ça qui fait la différence, tu vois. Nous, on sait qu’on mourra un jour, alors on s’inquiète, on compte, on voit le temps qui passe vite...Mais les animaux, eux, ils vivent peinards, I s'en foutent de la mort parce qu’ils ne savent rien de tout ça.
- Qu’est-ce que t’en sais, toi ?
Oui au fait, qu’est-ce que j’en sais, moi ? Je me dérobe…
- J'ai lu ça un jour chez un écrivain.
- Lequel ?
- Malraux. Tu connais pas.
- Et il en savait quelque chose, ton Malraux ? Il parlait aux animaux ?
-Non, bien sûr que non. Il supposait.
L’enfant est perplexe.
- Alors, comme ça, les écrivains disent des choses qu’ils ne savent même pas ?  J’espère que tu sais, toi, que c’est vrai ce que tu écris...Que tu racontes pas des bêtises comme ça.
- Heu…Bon, faut que je travaille.

Jean le  Sot
se rend donc à la foire de Lussac-les-Châteaux… Je n’y suis plus. Il m’ennuie, à la fin,  ce Jean le Sot ! Je sors fumer une cigarette.
La nuit tombe sur les toits du village.
Y’a comme un brin de tristesse dans ce crépuscule brumeux. Mais c’est un brin de tristesse qui me fait sourire.

13:13 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Et on se sent fort, quand on tue une guêpe ?
Ça donne du plaisir ?
Beaucoup ?
Qu’est-ce qui vous autorise à tuer ?
Merci de développer.

Drôlement bien de soulager un enfant en tuant. Au lieu d’ouvrir la fenêtre et d’inviter la guêpe (animal beaucoup moins agressif et effectivement moins dangereux que le moindre humain — la preuve).

Parfaitement lamentable.

« On reconnaît le degré de civilisation d'un peuple à la manière dont il traite les animaux ».

Gandhi


REPONSE BREVE :
Vous êtes journaliste dans la rubrique chiens et chats écrasés ?
Et aussi : on reconnaît le degré d'intelligence d'un commentaire à la manière dont le commentateur a lu le texte.
Bertrand .REDONNET

Écrit par : Karl-Groucho Divan | 13.10.2011

Les commentaires sont fermés.