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08.09.2010

Cauchemardesque !

labyrinthe.gifQuelqu’un m’aurait raconté ça, que peut-être je ne l’aurais pas cru. Ou bien j’aurais dit, in petto, ce corniaud se débrouille vraiment mal…
Alors, même si mon blog n’a pas vocation à traiter de mes petites déconvenues,  je vais
quand même vous dire une mésaventure  parce qu’elle est révélatrice d’un monde de fous, d’imbéciles, un monde où tout est compliqué, inhumain, désarticulé, et que c’est dans ce foutoir que nous vivons et que c'est aussi dans ce bordel sans nom que la littérature et l’écriture se font, disent et contredisent.

Sept médecins polonais doivent donc se rendre en France à la mi-septembre, pour y rencontrer certains de leurs homologues français, échange de savoir-faire et d’expériences.
Ils veulent dormir à Paris, flâner un peu dans la capitale, avant de rejoindre le Poitou-Charentes, lieu de leur rendez-vous de travail.
Je suis Français, j’habite ici, ma compagne les accompagne, je me fais donc l’intermédiaire pour leur réserver sept chambres dans un hôtel du côté de Montmartre. Quoi de plus normal et de plus facile ?
C’est ce que je pensais.
Un cauchemar !  Un vrai cauchemar !  Un truc à se taper la tête contre les murs ! Un truc qui vous fait perdre l’équilibre, qui vous fait peur, même, tant on se sent soudain démuni devant un vide effroyable.

J’ai commencé ma réservation lundi matin à 8 heures, on est mercredi midi et je n’en ai pas encore fini. J’ai dû donner plus de 20 coups de téléphone au moins, j’ai eu autant de réponses différentes, de discours, d’atermoiements, d’explications, de bredouillements, de demandes de documents, d’affirmations et de dénégations et j’ai fini par hurler. Ils se sont énervés, eux aussi…L’insulte au bord des lèvres.
Je n’ai toujours pas ma confirmation et je ne sais toujours pas où vont dormir les médecins. Ils ne sont au courant de rien. J’ai trop honte. Oui, honte. C’est intellectuellement inconfortable d’avoir honte de sa nationalité et de son pays quand on s’est toujours prétendu apatride et citoyen du monde !

Je vais donc  essayer de vous reconstruire le scénario, mais je vais certainement oublier beaucoup de bribes décousues tant c’est un imbroglio ubuesque.

Toute la journée de lundi :

-  Bonjour, madame...Je voudrais réserver…Blabla blablabla…
-  Oui. Mais il nous faut un fax et on vous renvoie aussitôt, nous, un fax de confirmation.
-  Bien.
Envoi d’un fax, dates, nom de la personne qui réserve, heure d'arrivée etc...Pas de réponse. Téléphone à nouveau…
- Allô ? Blablabla...
- Ah, non ! C’est pas noté. Vous pouvez refaire ?
- Oui, je voudrais blablabla…
- Il nous faut les noms des personnes…
- Ah bon ? Mais c’est réservé au nom d’une entreprise !
-  Ah bon, alors, tout va bien..on vous envoie un fax de confirmation tout de suite.
Fax désespérément  muet, retéléphone…Non, je ne vois rien..ah, si…Bien, ça va être traité…C’est que vous n’êtes pas seul, monsieur !
- Bon
La nuit tombe. Toujours rien.
J’ai dû sauter dans le descriptif de cette première journée trois ou quatre épisodes d'échanges tous plus opaques les uns que les autres.

Mardi matin.

Enervement.
- Allo, j’ai téléphoné hier  blablabla…
-  Ah, oui  je vois, mais  il nous faut un numéro de carte de crédit ; On peut pas traiter comme ça, monsieur, surtout si ces gens-là arrivent tard dans la soirée. Il nous faut des garanties.
-  Bordel, mais vous ne pouviez pas me le dire, hier !
-  C’est pas moi, c’est un collègue !
- J'en ai eu au moins dix de vos collègues !
- Oui, monsieur, mais c'est pas moi... (médisances à peine voilées sur les collègues qui sont vraiment bons à rien.)
-  Bon, bon, voilà le numéro de carte de crédit, XXXXXXXX,  Blablblabla...
-  On vous envoie un fax de confirmation

Rien. Silence radio à tous les étages. Le temps passe...
-  Allô  ? Blabla bla..J’en ai marre de vous appeler...Je vous appelle de Pologne depuis deux jours pour blablabla..
- Ne quittez pas, je vous passe les réservations…
Longue pub complètement idiote sur un couple qui a dormi là-bas, qui a bien mangé et que c’était bien, le petit déjeuner à onze heures…La pub ne dit pas s’ils ont baisé…Mais ça m'étonnerait, ils ont l'air tellement corniauds !
Je patiente. Je suis écoeuré par tout ça et par la mièvrerie de la pub, en plus. Par son indécence.
Petit déclic :
- Allo ? je vous écoute...
-   Oui, je téléphone pour blalalalalalalalalalallalalalalalalal !
-  Oui, oui, mais vous énervez pas…J’y suis pour rien..C’est mes collègues..Et puis, c’est la grève ici, c’est le bordel….
-  Comment ça ? que je hurle… Mais en quoi êtes-vous concerné ?  Vous ne la faites même pas, vous, cette grève ! Vous êtes au boulot ! Qu’est-ce que ça a à voir ? Je ne vous commande ni par train, ni par métro, que je sache...
Silence complet du gars qui a dit une connerie qui lui a échappé.
-   Bon, je m’en occupe…C'est donc pour la nuit du tant au tant.?..Oui...Bien....Au revoir.
Rien de toute la journée. Dix coups de téléphone au moins, toujours les mêmes âneries, fax, numéro de carte, à quelle date, combien de personnes, les noms, à quelle heure ils seront là ?....J’ai envie d’étrangler mes interlocuteurs(trices) successifs.
Vers le soir, après moult tentatives pour me faire comprendre :
-   Ne vous inquiétez pas, je vois mon collègue, là, à deux pas, qui est au fax et qui est en train de vous envoyer votre  confirmation…Vous l’avez dans dix minutes..
Une heure après, rien. Absolument rien. Je me gratte la tête, je  tâte mon pouls pour être sûr de ne pas rêver.
Téléphone encore...Pub indécente, voix, déclics, murmures, re-pub, terft..yruijh...tryuzuuuiii....Allô ?
- Il me faut absolument le nom des personnes…
Je raccroche. Je suis excédé.
Je comprends comment un pauvre bougre  peut soudain basculer vers le crime.
Vite au village ! La maison, l'air frais, les couleurs, la forêt, lecture.

Mercredi matin

Allo ? Je  réexplique tout depuis le début, on s’énerve…On vérifie…on bredouille, on se coupe la parole, on ne se comprend pas, on ne sait plus très bien de quoi on parle.
- Ah, non, il n’y a rien..Si, si..Voilà le numéro de réservation….XXXXXXXX…Bon, je vous envoie un mail tout de suite, ce sera mieux qu'un fax.
Je reçois le mail…

ENFIN !

Non ! Non ! Non ? C’est pas vrai !
La réservation que je suis en train de faire depuis 48 heures pour 7 personnes, porte sur une seule personne ! Tout est à refaire !
Je retéléphone….Une autre voix…Ce n’est jamais la même voix….Une jeune femme…Je dis, je redis encore..On me dit que c’est pas moi..Je dis, attendez, vous appartenez à une même entreprise, vous faites le même boulot et vous avez chacun un discours ! Mais si, c’est vous..Là, à l’instant où je vous parle, c’est vous qui représentez l'entreprise, non ?
- Oui..Je vais essayer de démêler votre problème….Cliquetis de clavier, silence, petite pub des deux imbéciles qui ont couché là bas  une fois  et qui étaient tellement heureux d'avoir bien dormi et de s'être levés tard…Toujours pas d'infos sur leurs éventuels ébats nocturnes.

-   Ah ! non,  ça , le mail que vous avez reçu,  c’est pas nous du tout  ! C’est la centrale de réservation qui...
- Comment, que je hurle ? Cette fois-ci je porte la main à ma poitrine...J'ai vraiment peur de l'infarctus.
- Peut-être vous vous êtes trompé d'hôtel, poursuit la voix, comme irréelle...

Il faut tout reprendre à zéro…Remonter à lundi matin 8 heures....Le mythe de Sisyphe me semble une vaine plaisanterie à côté de tout ça.
Je répète pour la vingtième fois..La voix dit qu’elle ne travaillait pas depuis dimanche, qu’elle n’y est pour rien…Mais qu’il lui faut le nom des personnes et que...Ah, non, pardon, pas la peine...Voyons voir....Je m'en occupe tout de suite...C'est pour quelle date exactement ?
Je suis épuisé. Tout ça ne peut pas être vrai...Et pourtant.

Une anecdote, une simple anecdote, vous me direz.
Non !
Le procès-verbal révélateur d’un monde d’imbéciles, d’idiots, de schizophrènes et de chacun pour soi.
L’hôtel porte un nom d’oiseau.
Mais pas le bon. C’est tous les noms d’oiseaux du monde qu'il faudrait lui flanquer à la facade !
Une anecdote ? Et si je vous disais que ça n'est pas la première fois ? Que déjà l'an passé, du côté de Metz, pour une réservation...
Mais  je ne vais pas vous la refaire.
Suis épuisé.
Pauvre France !

15:29 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Eh bé, boudiou ! comme aurait pu dire mon grand-père s'il avait été du Sud-Ouest... Je sors de la lecture de ce retour d'expériences moi aussi épuisée, mais solidaire, parce que oui : ce n'est que trop criant d'une désespérante réalité que nous avons tous eu l'occasion d'expérimenter au moins une fois dans notre vie. Et si ce n'est qu'une seule, nous pouvons nous estimer chanceux !
J'en profite pour vous dire que j'ai découvert l'Exil il y a quelques semaines et que j'y reviens régulièrement, avec grand plaisir ! Belle façon d'écrire, bravo !
Bon courage pour la suite de vos pérégrinations administratives !

Écrit par : Rozven | 10.09.2010

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