09.08.2010
Titres
Je n’ai jamais su trouver le moindre titre qui vaille pour un de mes livres. Sauf un.
Vous me direz que l’important est de trouver, préalablement, la matière première. Le titre, c’est l’affiche, l’emballage, l’état civil…Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse !
Pourtant un titre, c'est primordial. C'est avec lui que le livre voyagera ou ne voyagera pas. C'est comme ça qu'il se présentera devant ses juges, qu'il sera dit s'il n'est pas tu, qu'il sera répertorié dans une bibliothèque et etc..
Il arrive même que le titre efface le nom de l'auteur...C'est dire.
Pour Brassens, poète érudit, mon titre était : "Les Mots du Cygne". Je trouvais que c’était bien, moi, ce titre…Un peu pompeux…Référence au Cygne de Cambrai, quoique Brassens n’ait pas grand-chose à voir avec Fénelon, mais bon…
Et à propos de Bon, justement, François Bon, j’avais proposé, pour chez Bonclou et autres toponymes, "Mots hameaux"..Mot à mot…Bof…
Oui, il y a toujours des mots dans mes titres…François a choisi plus sobre. Avec bonheur.
Ah, pour Polska B dzisiaj, là j’avais rusé…Un titre en polonais. Vlan ! Accepté…
Quant à Zozo, le titre du manuscrit était on ne peut plus elliptique : "Zozo".
Ça n’a pas été…Georges Monti a choisi de qualifier Zozo comme on sait. Pas mal finalement.
Passons à Géographiques…Là, j’avais fait fort…Quand j’écrivais le manuscrit, le tapuscrit diront certains, le fichier s’appelait "Climats"…J’ai longtemps gardé ce titre, puis, après le point final, j’ai choisi "Géographies"…Je brûlais, là…Je brûlais…Je brûlais tant que je me suis éloigné et ai intitulé mon manuscrit « Couleurs du monde »…Un peu lourd, ça...
J'ai bien pensé à "Terre des hommes", mais c'était déjà pris. Et avec quel brio !
Je suis donc revenu à mes premières amours et j’ai envoyé le manuscrit sous le titre « Climats »…
Georges a tranché : Ce sera Géographiques, avec le genre Divagations, référence, flatteuse pour ma pomme, à Mallarmé.
Si je vous dis tout ça, c’est parce que je lis, sous la plume de Michel Crouzet, préfacier de Lucien Leuwen :
« Stendhal n’a pas eu à régler le problème du titre* de son roman, ou plutôt des sept titres envisagés et dont il faut dire un mot. Si la tradition a retenu le nom commode et banal de Lucien Leuwen, que Stendhal a lui-même employé, si bien que le meilleur titre serait sans doute le premier qu’il ait envisagé pour le manuscrit de Madame Gaulthier, Lucien Leuwen, ou l’élève chassé de l’Ecole Polytechnique, les autres titres, successifs et souvent contemporains (1) et associés, sont révélateurs de la complexité de l’œuvre, de la multiplicité de ses sens, et significatifs de la difficulté de Stendhal à la maîtriser, à en proposer une désignation unificatrice…. »
Complexité de l’œuvre et multiplicité des sens ? Rien de tel chez moi... Trop petit.
En revanche, difficulté à proposer une désignation unificatrice, certainement.
Toute proportion gardée.
* Lucien Leuwen est un manuscrit inachevé (Note de l’Exil des mots )
1 - Le 25 novembre 1835, dans sa lettre à l’éditeur possible, Levasseur, il propose au choix Le Chasseur vert ou Les Bois de Prémol (Note du préfacier)
12:50 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature | Facebook | Bertrand REDONNET
Commentaires
J'aime bien ce billet facétieux.
L'histoire des titres c'est un peu celle qui préside aux prénoms (que nous portons et que nous donnons) : c'est le choix réalisé qui compte et on oubliera tout le reste pour trouver que ce qui existe, est bel et bon. C'est même ce qu'on fait de mieux :)!
Car c'est la chair (du livre et de l'être) qui donne toute sa fulgurance à la Chose.
Les Champs du crépuscule, c'est osé :)
Écrit par : Michèle | 09.08.2010
C'était sous-entendu, mais ça va mieux en le disant :
Ils sont superbes ces cinq livres !
Écrit par : Michèle | 09.08.2010
Michèle, je suis bien d'accord avec toi. "Les Champs du crépuscule", c'est osé...
Je crois même que, subodorant que de toutes façons ça ne serait pas retenu si le manuscrit trouvait preneur, je me suis un peu amusé.Gratuitement.
Osé, mais pas téméraire, donc...C'est un peu dire à un éventuel éditeur : Bon, ben, voilà un manuscrit mais pour le titre, à votre convenance, cher monsieur...
Merci pour les cinq livres.
J'aimerais en laisser une dizaine comme ça avant de tirer ma révérence...
Amitiés
Écrit par : Bertrand | 10.08.2010
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