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25.05.2010

Grandeur d'âme de la métaphysique doctrinaire

tunnel.jpgLe professeur Bartoszewski, vieux monsieur respectable et respecté, figure emblématique de l'intelligentzia polonaise, ancien déporté des camps d'Auswitch, ancien ministre des affaires étrangères, aujourd"hui conseiller du gouvernement pour les relations avec l'Allemagne, a rappelé récemment les paroles d'un prélat haut placé sur les marches de l'organigramme ecclésiastique et qui, dans un  sermon tonitruant, avait pris dieu lui-même  à partie en des termes on ne peut moins équivoques :
« Si tu  voulais faire tomber un avion, que n'as tu fait tomber celui qui volait sur Smolensk trois jours auparavant ? »
Entendez par là l'avion de la délégation officielle polonaise* invitée par les Russes aux cérémonies officielles du massacre de Katyń et  réunissant à son bord de nombreux membres du gouvernement, sous la conduite du premier ministre, Donald Tusk.
Surpris par la magnanimité de la  question, il paraît que dieu en est resté bouche bée.

Et le journaliste de Polytyka qui relate ces propos  criminels de dire qu'il se sent lui-même, pour la première fois de sa vie, tel un dieu, tant il ne sait que répondre à une telle ignominie.
Il en reste bouché bée.
Ce fait divers pas si divers que ça, pour dire qu'en Pologne, fort du concordat, le clergé se mêle évidemment de politique, le plus souvent côté PIS (Droit et Justice), le parti populiste du président défunt et de son frère jumeau, l'actuel candidat à la succession, et que, fidèle à son histoire partout dans le monde, le susdit clergé n'y va pas avec le dos de la cuillère pour servir les inepties les plus dégueulasses et flatter les instincts les plus vils.

Mais je veux vous rassurer quant à l'intelligence et la clairvoyance du peuple polonais. Vous rassurer quant à la douceur de ce pays. La Pologne, c'est vraiment autre chose et de plus en plus nombreux sont les Polonais qui en ont par-dessus la casquette de l'omniprésence chafouine de la soutane.
Comme dit dans 'Polska B dzisiaj', les jours de gloire de la sournoise institution, qui doit , in fine, tout à la dictature communiste, sont derrière elle.
Gare au retour de bâton ! L'histoire nous enseigne que dans ce pays, quand la coupe est pleine, elle est vraiment pleine et qu'on ne la laisse pas déborder trop longtemps.

Image : Philip Seelen

* Les  autorités russes avaient organisé, quelques jours avant le drame, des cérémonies auxquelles ils avaient convié les Polonais. Le 10 avril, il s'agissait d'une cérémonie privée, voulue par le Président défunt.

10:59 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Cher Bertrand,

Je ne suis d'accord qu'avec votre conclusion. Quant à l'anecdote que vous présentez, il me semble que vous avez mal suivi le film d'une ouverture officielle de campagne électorale PO particulièrement grotesque au cours de laquelle Bartoszewski a menacé que la Pologne devienne un Burkina-Faso économique et où Wajda a, de son côté, raconté une grosse bêtise anti-curé dans un discours dans lequel il a également proclamé l'état de guerre civile (rien que ça!). Ensuite Gazeta Wyborcza a démenti sans démentir tout en démentant les propos de Wajda. Car il s'avère que c'est un pauvre curé qui, sous le coup de l'émotion de l'accident de Smolensk, a fait le 10 avril dans une nef latérale de la cathédrale de Przemysl une homélie d'une métaphysique fort confuse et tout à fait ratée, dont ensuite une phrase a été extraite de son contexte pour les besoins de la démonstration de campagne électorale.

Mais je vois que vous vous êtes également laissé abuser en ce qui concerne le statut de cette très curieuse commémoration du 7 avril qui n' a été qu'une très subtile ruse de Poutine, sans doute pour essayer de redorer son image auprès des pays occidentaux, en essayant de leur faire croire que la Russie reconnaissait les crimes sur lesquels elle a construit son empire passé. Or c'est très loin d'être le cas!

Pour moi, les gens qui nuisent le plus à la réputation de la Pologne, ce sont, non pas les curés polonais qui me semblent effectivement vivre leurs dernières heures de gloire, mais ces libéraux de PO qui essaient de jouer d'un discours électoraliste complètement passéiste dans lequel ils agitent toute une panoplie de spectres et de démons. Car le vrai débat politique qui va se jouer dans cette campagne est la question de l'articulation entre une politique sociale et une politique économique libérale et la question du rôle de l'état dans l'organisation de la société polonaise. Et là, il faut avouer que ces braves gens de PO sont un peu courts, ce qui explique sans doute leur recours défensif à une rhétorique digne des préaux des débuts de la Troisième République en France. Leur truc ayant très bien marché en 2007, ils ont eu pour réflexe de puiser dans une vieille marmite, mais je doute fort qu'ils puissent encore longtemps continuer à prendre leurs concitoyens pour des cons à ce point-là.

Écrit par : Barbara M. | 26.05.2010

Chère Barbara,

Vous vous méprenez si vous pensez que je me fais ici l'avocat des libéraux...
Je dis sur ce blog, assez clairement, ce que je pense des libéraux, qu'ils soient de Paris, de Varsovie, de Zanzibar ou de Montcuq....
Je pensais que c'était clair.
Cependant, mon aversion pour lesdit libéraux n'a d'égal que mon dégoût des populistes,nationalistes, soutenus, que vous l'admettiez ou non, par la grande, très grande majorité du clergé polonais.
Vous êtes d'origine polonaise, vous aimez et visitez la Pologne, mais vous ne la connaissez plus au quotidien, Barbara.
L'omniprésence des curés - dont l'emblême est même accroché dans la salle de saillies des chevaux pur sang du haras de janow, soit dit en passant pour anecdote significative - devient insolente et de plus en plus nombreux sont les Polonais qui supportent de moins en moins cette insolence de "classe dirigeante" qui croit avoir son mot à dire sur tout.
Quant à la réflexion de ce curé, que vous semblez excuser par l'émotion (mais quelle émotion peut excuser des propos criminels ? ) elle est inadmissible et bien révélatrice d'un certain état d'esprit.
Je ne suis pas plus que cela la campagne électorale. J'en cueille des bribes qui me semblent importantes de l'un et l'autre bord...
Et puis, de grâce, qu'on arrête de cracher sur les Russes et sur leurs intentions toujours fautives...ça n'est pas en râbachant un passé cruel qu'on emmène vers le bonheur les enfants d'un pays, mais bien en leur enseignant la fraternité et la fin des blessures.
Vous vivez en France. Et depuis longtemps...Bien. Mais, ici, les Polonais aspirent à la vie et ce ne sont pas les discours de haine et de suspicion du PIS qui les conduisent vers la sérénité.

Écrit par : Bertrand | 26.05.2010

Bertrand,
Je connais très bien la campagne et la province polonaise: j'y vais tous les ans chez des cousins qui vivent dans des régions de Polska B moins à l'est que par chez vous et j'y suis toujours le récit des aventures avec le curé local. J'excuse donc la métaphysique vaseuse de ce curé qui s'interrogeait, tel Zadig, sur les mystères insondables de la destinée,tout comme j'excuse les sottises que je peux lire dans des copies de candidat au bac, car j'y accorde le même statut. Celui d'un monde qui finit lentement, tout comme il finissait dans les campagnes françaises il y a 40 ans. J'apprécie beaucoup moins les manipulations sur le sens des mots, ce phénomène classique en période de campagne électorale. En l'occurrence, il s'agissait bien d'une manipulation très habilement conduite. Car Wajda aurait pu prendre d'autres exemples qui montrent sans ambigüité une collusion évidente entre l'Eglise et le camp du nationalisme polonais, s'il n'avait eu que des intentions intellectuellement honnêtes.

Avec les Russes, je distingue la fraternité possible entre les humains des intentions politiques des organisateurs des diverses cérémonies officielles d'état à état. Le 10 avril, s'il ne s'agissait que d'une cérémonie privée voulue par le défunt président polonais, pensez-vous que Tusk aurait laissé partir avec le président autant de gens de son camp ce jour-là? Les gestes venus de part et d'autre après l'accident montrent un grand potentiel de fraternité humaine et c'est tant mieux, mais malheureusement, le chemin à faire pour qu'on puisse parler de fraternité entre états sera encore très long et parsemé de beaucoup de défiance. Ce qui fait que j'ai beaucoup plus de compassion pour le peuple russe que pour le peuple polonais, car il me semble que c'est lui qui souffrira le lus longtemps de la mentalité des gens qui le gouvernent.

Écrit par : Barbara M. | 26.05.2010

Quelques mots à propos des manipulations: quitte à les dénoncer,Barbara M., vous pourriez aussi dénoncer celles auxquelles se livre par exemple M.Pospieszalski à la télévision "publique" polonaise, quotidiennement ou presque, et cela au profit du PiS. D'ailleurs les média polonais actuels ont été partagés pour la plupart entre le PiS et... les ex-communistes, ce qui pourrait faire rire si ce n'était sordidement "politique".On peut évidemment critiquer les libéraux, on peut aussi ne pas oublier que Jaroslaw Kaczynski est allé chercher des électeurs à Radio Maryja( de braves curés inoffensifs?)et qu'il s'est allié en son temps à l'extrême droite( Giertych)et au populiste Lepper, dont il dénonçait auparavant le caractère "moscovite", ce qui n'est pas faux.Est-ce bien honnête de la part d'un homme qui voulait, disait-il, assainir voire purifier( terme plus que suspect) la vie politique polonaise? Il faut se méfier de ceux qui revendiquent à tout instant "honnêteté","patriotisme"et autres valeurs.Comme l'a très bien dit Schopenhauer, plus on invoque une qualité ou une valeur ( citation approximative) moins on la possède. Ceci n'épuise en rien le débat , polonais ou autre.Pour l'heure je suis plus proche du point de vue de M.Bertrand Redonnet.

Écrit par : Zdzislaw( ex délirium) | 26.05.2010

Quelques mots à propos des manipulations: quitte à les dénoncer,Barbara M., vous pourriez aussi dénoncer celles auxquelles se livre par exemple M.Pospieszalski à la télévision "publique" polonaise, quotidiennement ou presque, et cela au profit du PiS. D'ailleurs les média polonais actuels ont été partagés pour la plupart entre le PiS et... les ex-communistes, ce qui pourrait faire rire si ce n'était sordidement "politique".On peut évidemment critiquer les libéraux, on peut aussi ne pas oublier que Jaroslaw Kaczynski est allé chercher des électeurs à Radio Maryja( de braves curés inoffensifs?)et qu'il s'est allié en son temps à l'extrême droite( Giertych)et au populiste Lepper, dont il dénonçait auparavant le caractère "moscovite", ce qui n'est pas faux.Est-ce bien honnête de la part d'un homme qui voulait, disait-il, assainir voire purifier( terme plus que suspect) la vie politique polonaise? Il faut se méfier de ceux qui revendiquent à tout instant "honnêteté","patriotisme"et autres valeurs.Comme l'a très bien dit Schopenhauer, plus on invoque une qualité ou une valeur ( citation approximative) moins on la possède. Ceci n'épuise en rien le débat , polonais ou autre.Pour l'heure je suis plus proche du point de vue de M.Bertrand Redonnet.

Écrit par : Zdzislaw( ex délirium) | 26.05.2010

Bonjour Zdzislaw. A vrai dire, ce qui a attiré mon attention était le "caractère privé" du voyage de Kaczynski dans le billet de Bertrand: je trouvais que ça en faisait un peu trop à la charge du même camp. Quant au curé,je chipote, car la phrase incriminée disait très exactement: "cela aurait pu arriver UN mercredi", la phrase précédente étant une question adressée aux mystères insondables de la Providence sur les raisons pour lesquelles Dieu n'avait pas voulu que l'accident arrive le septième jour de la semaine. Impossible de contester les faits, car GW a fini par publier l'enregistrement de l'homélie qui avait été envoyé au journal par un paroissien anonyme bien intentionné.

Je ne suis pas les programmes de TVP dont on parle tant, mais surtout, je ne connais pas les raisons statutaires qui ont permis à des journalistes aussi marqués politiquement que Pospieszalski d'y prendre beaucoup de pouvoir. Néanmoins, si cette situation pourrie dure depuis environ 18 mois, cela vient du fait que les libéraux sont à court d'idées sur la façon de réformer la télé publique. En 2007, lors de leur arrivée au pouvoir, leur projet était de privatiser la télé publique à la hussarde, mais comme ça ne passait pas (ô vilain droit de veto du président selon la constitution polonaise), ils cherchent, comme sur d'autres sujets de non moindre importance... Ils vont bien finir par être obligés de trouver une solution acceptable un jour!

Au total, le problème de la réputation calamiteuse du parti PiS me semble venir de la pêche aux voix sur Radio Maryja lors des présidentielles de 2005. Malheureusement, à cette époque, cette radio, dont les programmes sont bien d'une bêtise à pleurer, avait encore pas mal d'auditeurs, alors que la victoire électorale se jouait sur un petit nombre de voix à ramasser dans les coins. Schéma classique d'élection présidentielle au suffrage universel qui a fini par être transformé en péché originel du parti PiS, à grand renfort de procédés médiatiques de la plus parfaite vulgarité. Personnellement, ce qui me gêne le plus dans tout ça est le parfait cynisme avec lequel les libéraux ont mené leur opération de conquête du pouvoir, face à une société qui découvrait avec ingénuité les techniques modernes. Et je ne peux que me réjouir du fait que l'accident du Tupolev oblige à remettre à l'heure les pendules d'un débat politique un peu plus honnête.

Quant à la place de l'Eglise en Pologne, mes amis les plus proches ont l'impression qu'à l'heure actuelle, le problème vient de la couardise du personnel politique de tous les partis importants, car ce dernier prend toujours beaucoup de gants avec l'Eglise, alors que la société réelle ne lui accorde plus la confiance qu'elle lui accordait dans les années 1990.

Écrit par : Barbara M. | 26.05.2010

Barbara, vous abordez beaucoup de points qui méritent évidemment discussion.S'agissant du problème de la télévision publique, certes les libéraux veulent la privatiser, mais vous semblez ne pas tenir compte des rapports de force politiques qui ont abouti à ce partage d'influences entre le PiS et les ex communistes:il n'y a pas d'innocents dans ce domaine
et la lutte pour la domination dans les média n'est pas une caractéristique de la Pologne.Si la situation dans la télévision publique polonaise est "pourrie", le PiS y est aussi pour quelque chose car son alliance avec l'extrême droite de Giertych et le parti populiste Samoobrona de Lepper a permis l'arrivée de véritables fascistes et pendant un certain temps le président de la tv était un certain Farfal, au passé néo-nazi!Heureusement il n'est plus là, mais la présence de "journalistes" du genre de Pospieszalski ne tient pas seulement aux régles statutaires , elle vient de rapports de force politiques au sein même de la tv et actuellement il y a une alliance entre ex communistes et le PiS pour se partager les différents programmes.
Je suis par ailleurs très étonné que vous expliquiez la venue au pouvoir des libéraux uniquement par l'ingénuité d'une société découvrant les techniques modernes:les libéraux ont gagné les élections municipales dans la presque totalité des grandes villes: est-ce du à l'immaturité des habitants ?Je vous signale que Poznan ne passe pas vraiment pour la ville la plus arriérée de Pologne et, jusqu'à preuve du contraire c'est la P.O. ou les ex-communistes qui gèrent cette ville! Cracovie est gérée par un ex- communiste!Varsovie dont Lech Kaczynski a été le maire a été reprise par les libéraux.Ce sont des élections locales dont le résultat ne doit pas grand chose selon moi aux média, ce qui est probablement plus complexe pour les législatives.
Par ailleurs je suis très surpris de ce que vous écrivez sur l'accident du Tupolev:il aurait remis les pendules à l'heure? Curieux raisonnement!Cet accident est donc un bienfait? Parce qu'il profite apparemment au PiS?
Personnellement je pense que cet accident a plutôt favorisé une grande confusion et pour en revenir à l'église ,saluons ces artistes qui ont réussi une belle récupération, l'enterrement incongru au Wawel de Lech Kaczynski non loin de Pilsudski qui est tout de même une autre pointure!Et remarquons la rapidité de l'opération, comme si l'on voulait panthéoniser le président mort le plus vite possible:pourquoi?Beaucoup de Cracoviens en ont été très choqués de même que bon nombre de Polonais.Vous savez sans doute que l'église ni la famille ne veulent endosser la responsabilité de la décision après le tollé de protestations.Le cynisme n'appartient pas à un seul camp.
Pour ce qui me concerne je regrette l'absence d'un véritable parti socialiste en Pologne,cela équilibrerait le débat.Mais le parti socialiste polonais a été détruit par les communistes et ni Tusk ni Kaczynski, ni les communistes ne réclament sa réapparition , le contraire serait étonnant!

Écrit par : Zdzislaw( ex délirium) | 26.05.2010

Zdzislaw, je vais essayer de relever le défi...

Ce Farfal dont on nous a beaucoup parlé en des termes très noirs mais quelque peu excessifs, à en juger par ce que disait la presse polonaise de droite sur sa biographie réelle, me semble avoir été élu à la direction de TVP à la fin de 2008, si j'ai bonne mémoire. Le problème est que c'est le personnel de TVP qui a le pouvoir d'élire le directeur dans la loi actuelle: le partage des chaînes entre PiS et SLD correspond donc aux forces respectives des différents syndicats de la maison TVP.

A mes yeux, PO ne dérange personne dans les grandes villes prospères dont Varsovie, Cracovie ou Poznan sont les meilleurs exemples, aussi longtemps qu'il les gère bien. A Cracovie, il s'avère que ça ne marche plus et que les décisions sont actuellement prises grâce à la participation de PiS à la gestion de la ville. Mais là où les gens vivent difficilement, il y a une demande de justice sociale à laquelle le programme politique du PiS, fondé sur les valeurs chrétiennes de solidarité sociale, répond réellement, en l'absence d'un équivalent d'un parti socialiste à la française que pourrait représenter le SLD actuel. Car le SLD actuel se trouve désormais vidé de tous ses requins des affaires qui sont de fait passés à PO après 2005 mais porte encore dans l'électorat les stigmates de la réputation de parti des communistes et de la corruption qui, il faut le dire, a prospéré quasi-impunément jusqu'en 2005. Ce qui a calmé les scandales financiers à répétition, c'est la création d'une police anti-corruption très musclée par les gouvernements PiS de 2005 à 2007. Il est de mode actuellement d' accuser cette police de "dictature", voire de "fascisme" dans Gazeta Wyborcza. A vérifier dans le détail, comme dans le cas de la biographie réelle de Farfal....

Le problème de l'enterrement au Wawel ne pose pas plus de problèmes de contestation que n'en avait posé celui de Pilsudski en 1935. En 1935, c'est d'ailleurs plutôt l'Eglise qui protestait le plus fort contre le fait qu'on ait enterré au Wawel un "mécréant". Dans le cas présent, le cardinal Dziwisz, décideur officiel, a fait assez rapidement une déclaration dans laquelle il disait avoir pris sa décision en s'inspirant des propos de Komorowski qui avait exprimé le souhait que le choix du lieu d'inhumation préserve l'unité qui s'exprimait dans la nation pendant le deuil. Dziwisz a donc habilement renvoyé la balle dans le camp du gouvernement et tout de suite après, j'ai remarqué que la rubrique de Gazeta Wyborcza: "Que penses-tu du Wawel?" dans laquelle les gens étaient invités à s'exprimer a été fermée. Bref, toute cette comédie me semble être cousue de fil blanc.

Selon moi, ce qui se cache derrière le conflit apparent entre PO et PiS, tel qu'il est né après les législatives de 2005 et dès avant les présidentielles de 2005 et raconté dans la version Gazeta Wyborcza, correspond à une division qui est apparue dès 1990 dans ce qu'on a appelé le "camp Solidarité" et qui tournait autour de la lustration des collaborateurs au régime communiste. Le problème est que PO disait en théorie dans son programme de 2005 "oui à la lustration", mais ne pouvait pas prétendre à faire SA politique de lustration ni dans l'armée ni au ministère de l'intérieur, faute d'être le parti le plus important au Parlement. Or cette question de lustration a désormais perdu son sens historique, car les nouvelles générations qui entrent en politique avaient entre 10 et 20 ans en 1989, alors que les gens de la génération des 30 à 40 ans en 1989 va bientôt prendre sa retraite.

L'accident du Tupolev est donc un bienfait en ce sens que PO se trouve moralement obligé de mettre en veilleuse tout le ramdam grâce auquel il a gagné les élections de 2007 en jouant de l'argument: "PiS = parti fasciste" ou "PiS = Giertych" et de parler sérieusement de son programme politique réel, c'est-à-dire réforme des services de santé publique et des retraites ainsi que diminution de la dette publique et passage à l'Euro. Tout cela me semble conduire inévitablement à conduire une politique de co-gestion entre PO et PiS dans l'avenir immédiat.

Écrit par : Barbara M. | 27.05.2010

Je ne suis pas très disponible pour l'heure.
Je n'ai donc fait que "survoler" vos commentaires.
je vous remercie bien sûr pour ce débat.
Il me semble d'ores et déjà que plein de choses risquent de nous opposer, Barbara.
Je prendrai donc soin de relire sérieusement et vous offrirai, dans les jours qui viennent, mes réponses.
Quand vous dites, par exemple, que ce qui vous a fait réagir, c'était l'expression "visite privée", vous auriez dû noter qu'elle n'était pas de moi mais de Lech Wałęsa. Il est bien Polonais Lech Wałęsa, non ?
Et que vous vous étonniez qu'il y eut tant de personnes à bord de cette visite privée, prouve que vous ignorez les enjeux et la façon dont le PIS a l'art de "présenter les choses", ou alors c'est carrément un parti pris idéologique et ça risque de ne pas m'intéresser longtemps, voyez-vous...
Mais je reviendrai sérieusement sur tout ça, en début de semaine prochaine sans doute.

Écrit par : Bertrand | 27.05.2010

Barbara,je réponds sur quelques points, la problématique étant vaste...
1)Je vous accorde que l'enterrement de Pilsudski a suscité des contreverses et il était considéré comme un mécréant par l'église... L'extrême droite ne l'aimait pas non plus. Je maintiens cependant que l'enterrement de Lech Kaczynski est une récupération rondement menée par l'église et Jaroslaw Kaczynski, chacun refusant d'endosser la responsabilité de la décision étant donné les réactions : il suffit de relire un peu partout les déclarations du cardinal Dziwisz.Le gouvernement n'a pas eu grand chose à dire, il a géré.Le pouvoir de l'église reste encore considérable!Il fallait faire de Lech Kaczynski un héros voire un martyr en jouant sur l'émotion compréhensible. Pourtant le personnage ne suscitait guère d'enthousiasme de son vivant.Ce n'est pas un héros!Et la rapidité de la décision est fort suspecte,je maintiens.
2)Je maintiens aussi que la victoire aux différentes élections des libéraux ne peut s'expliquer de manière simpliste, surtout au niveau local, que cela me déplaise ou pas.
Je pourrais parler abondamment de Wroclaw que je n'ai pas citée mais que je connais bien: son maire actuel est si populaire qu'il peut se permettre de gérer la ville en imposant sa loi autant à la P.O. dont il a été proche qu'au PiS réduit à un rôle d'appoint actuellement!
3)Vous affirmez que la P.O.a en son sein les requins des affaires venus du SLD.Mais vous ne parlez pas des membres du parti communiste que l'on retrouve au...PiS. Dans l'accident du Tupolew il y avait un certain Z.Wasserman qui était procureur du temps de Jaruzelski, si mes souvenirs sont bons: il s'est bien reconverti et il n'est pas le seul . A Radio Maryja, l'idéologue principal, un certain Nowak, était fort proche du pouvoir sous Jarzuzelski. Il ne suffit pas de dire que cette radio est stupide: elle encourage la stupidité!Et manipule ses auditeurs égarés.
4)J'aurais encore beaucoup de choses à dire( sans prétendre détenir la vérité), je terminerai pour cette fois en m'étonnant de votre "approbation" de l'accident!!!Il fallait donc cela pour faire taire la P.O. et remettre en selle le PiS? Je trouve votre raisonnement très étrange.
Je suppose que nous en débattrons encore.
Je présente mes salutations à M. Bertrand Redonnet en espérant ne pas l'importuner par mes longues interventions!

Écrit par : Zdzislaw( ex délirium) | 27.05.2010

Au contraire, Zdzislaw, vous m'intéressez beaucoup...
Je ferai une réponse lundi ou mardi, comme dit plus haut.
Cordialement

Écrit par : Bertrand | 27.05.2010

Barbara, encore un mot à propos de votre dernière intervention: je suis d'accord avec ce que vous dites concernant la nécessité d'un débat sur les programmes politiques( en Pologne et ailleurs) mais je ne suis pas convaincu par la stratégie du PiS et cela dès 2005.Je pense que si la dimension "sociale" et économique avait été essentielle pour les frères Kaczynski, ils auraient formé un gouvernement minoritaire, sans compromission avec Giertych et Lepper, et démontrant que leur projet est bloqué, ils auraient démissionné (le gouvernement) dans la clarté,ouvrant la voie à une victoire plus "saine".Je pense cela depuis longtemps.

Écrit par : Zdzislaw | 27.05.2010

Bertrand, je n'ai sans doute pas lu la presse avec assez d'attention le jour où Walesa a fait ce mot d'esprit fort savoureux. Je n'ai donc manifestement pas compris que vous faisiez une allusion à une querelle polono-polonaise de plus, en utilisant la formule "visite privée" et je l'avais comprise, sans doute à tort, pour une façon de dire que Kaczynski n'avait rien à faire à Katyn le 10 avril.

Or mon analyse de ce 10 avril, beaucoup plus cérémonieux que les précédents en raison du 70ème anniversaire, et par voie de conséquence celle de la symbolique de l'inhumation au Wawel vient du fait que Katyn a toujours été commémoré par les présidents de la République de Pologne le 10 avril, depuis l'élection de Walesa à cette fonction. Mon parti-pris idéologique s'arrête clairement là.

Quant aux querelles polono-polonaises, j'essaie surtout de comprendre les motivations qui amènent tout ce petit monde à s'agiter dans son bocal avec une telle frénésie, ce qui m'amène à être ouverte à toute autre explication que celles que j'ai pu trouver.

Écrit par : Barbara M. | 27.05.2010

Zdzislaw,
Ma perception de l'inhumation au Wawel est sans doute liée à mon hyper- sensibilité à toute la symbolique historique de l'affaire Katyn dans l'histoire de la Pologne et à l'éducation que j'ai reçue dans une famille très pilsudskiste. Je ne défends ce lieu d'inhumation que par ces arguments -là, par le fait que Lech Kaczynski était dans sa jeunesse un authentique pilsudkiste socialiste, aux dires de copains d'études qui n'avaient vraiment aucune raison idéologique de le flatter dans des textes écrits bien avant sa mort, et le hasard d'une mort près de Katyn dans l'exercice de la fonction de président d'une Pologne libre , dans ce contexte particulier où la Russie fraternise d'une façon bien ambigüe. J'ai applaudi des pieds et des mains quand Zbigniew Brzezinski a proposé dans la presse polonaise l'idée d'installer une stèle commémorant Katyn dans la crypte où Kaczynski serait enterré, parce que je trouvais que ça bouclait la façon dont je voyais le problème de façon impeccable. Mais je conçois aisément qu'on y voit une magouille politique, dont il faut néanmoins noter qu'elle a eu lieu,quand le PiS a découvert que la foule de tous ces gens qui l'avaient élu en 2005 s'était mise en route pour tout simplement saluer son Président mort près de Katyn (voir le film documentaire "Solidarni 2010" qui a suscité tant de critiques que j'ai fini par le regarder sur Google pour savoir de quoi il en retournait vraiment)

Tout à fait d'accord sur le fait que le PiS aurait pu choisir de faire démissionner son gouvernement en mars 2006 , se représenter devant les électeurs et que tout ça aurait alors eu de la gueule. Reste à savoir pourquoi Jaroslaw Kaczynski a choisi une autre voie à l'époque: il finira bien par le dire un jour si il continue sur la voie amorcée dans sa campagne électorale actuelle...

Une remarque sur Wasserman: procureur , certes, mais dans un bled de troisième catégorie. Je viens de trouver un article de Wyborcza (c'est dire...) très élogieux sur la façon dont il a consciemment choisi vers la fin des années 1970 de ne pas faire carrière par la voie classique de l'époque, c'est-à-dire celle de l' inscription au PZPR et de s'engager alors aux côtés des intellectuels catholiques de la grande époque... Rien à voir avec un Nowak ou le vieux Giertych, qui ont manifestement pour modèle la carrière de louvoiements et de dogmatisme de cette crapule de Boleslaw Piasecki.

Le succès de PO en 2007 est incontestablement un succès auprès des jeunes des grandes villes avec un bon niveau d'éducation: tout à fait normal que l'image du PiS-LPR-Samoobrona et des bigotes en béret de mohair ne leur ait pas parlé. Le Pis me semble avoir un électorat plus populaire. Quant à la puissance de l'Eglise, c'est pour moi ??? Car je suis frappée d'observer une pratique religieuse qui me semble assez superficielle, faite de traditions de sociabilité et de rites familiaux ou festifs. Tout cela peut très vite évoluer vers de nouveaux comportements, pour peu que le contexte économique et culturel offre de nouvelles alternatives.

Écrit par : Barbara M. | 27.05.2010

Barbara,
Ayant peu de temps devant moi je m'empresse de répondre brièvement à votre dernière intervention : je comprends vos raisons et je vous remercie pour l'information sur Wasserman , elle remet les choses à leur place effectivement. Je savais que Lech Kaczynski était pilsudskiste mais j'ignorais son socialisme.J'ai de l'admiration pour Pilsudski surtout depuis que j'ai appris combien il avait été calomnié notamment en France. Je dois cette "réhabilitation" à des personnalités comme K.Brandys ou A.Michnik(oui)ou encore A.Wiatteau, dont la lecture m'a éclairé.Moi-même je suis d'une famille ouvrière , je suis né en France et mon père a participé aux combats pour l'indépendance en 1918 en Poznanie, puis à la guerre soviéto -polonaise de 1920.En 1939, il s'est engagé dans l'armée polonaise constituée en France, il a été fait prisonnier et s'est évadé. J'ai été élevé dans une famille ouvrière plutôt favorable au régime communiste( la question sociale!), mais j'ai perdu mes illusions il y a déjà bien longtemps!
Entièrement d'accord pour traiter Piasecki de crapule, en précisant tout de même que ce fasciste et antisémite authentique a été recruté par le général du NKWD Serow et qu'il a fait carrière en Pologne "populaire" grâce aux soviétiques : cela donne à penser...
Tout cela n'efface pas nos divergences et n'épuise pas le débat, évidemment.
C'est la confrontation des idées et des connaissances qui importe et j'espère qu'elle restera pacifique en Pologne comme en France.

Écrit par : Zdzislaw | 27.05.2010

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