03.11.2009
Stéphane Beau : Le Coffret
On ne sort pas intact de la lecture du livre de Stéphane Beau, Le Coffret, récemment paru aux éditions du Petit pavé.
On n’en sort pas intact parce qu’on y rencontre ses propres peurs et ses propres angoisses.
- Qu’est-ce que tu lis, papa ? m’a demandé ma fille. Question récurrente, histoire que j’arrête de lire un peu et que je prête attention à ses dessins, ses peintures et ses images.
- Je lis un livre qui se passe vers 2100, que j’ai répondu, histoire de répondre à peu près.
- Et comment il sait ce qui va se passer en 2100 , ton écrivain ? J’aurai cent ans, moi, et j’en sais rien comment ça sera quand j'aurai cent ans !
Ben oui. Comment il sait ?
Science fiction ? Non. Pas plus que le Nautilus de Jules Verne n’était une science fiction.
Pas plus que Matin brun de Franck Pavloff ne relevait de ce domaine de l’art d’écrire.
Un apologue. Je dirais un apologue, oui. Et écrit avec une élégance et une conviction qui font de Stéphane Beau un véritable écrivain.
Je ne vous raconterai pas le livre. Bien sûr. Un livre se lit avec ce qu’on porte en soi. Je ne vous raconterai pas l’histoire de Nathanaël, de son grand-père et de son ami le libraire. C’est pas une histoire qu’on raconte. C’est une histoire qui se lit de l’intérieur. Un avertissement. Un feu clignotant de la nuit dans laquelle nous nous enfonçons.
En lisant Stéphane Beau on est en présence d'une conscience qui veille à ce qu’une nouvelle catastrophe majeure ne s’abatte pas sur l’humanité. Une catastrophe qui pour l’heure avance masquée, chafouine, drapeau à peine muet brandi par plus de 50 pour cent d’abrutis.
Ce que j’aime dans ce livre, qui porte l’éloquent sous-titre « À l’aube de la dictature universelle », c’est d'abord qu’il existe. Et que son existence même, au cas où, sera et serait un déni à tous ceux et celles qui pourraient dire un jour : On savait pas. On n’a pas fait gaffe. On n’a vu venir le loup….
Car dans cette société de demain que l’écriture de Stéphane Beau explore, beaucoup de similitudes à peine voilées nous sont déjà bien actuelles. On sent bien cette évidence, en écoutant aujourd’hui les discours du pouvoir, en examinant l’évolution des esprits depuis une trentaine d’années, que ce demain envisagé est justement très près de notre pendule. Qu’il n’y a plus que le rideau à soulever, que les trois coups ont déjà été frappés…
Juste une petite phrase, aiguë comme une arme de précision :
« (….) C’est parce qu’ils* avaient oublié que le meilleur moyen de se soumettre un esclave, c’est de l’affranchir.»
Il y a, dans ce Coffret, vraiment, de quoi réveiller tous les zombies, victimes ou consentants, qui peuplent notre monde presque parfait.
On ne sort pas intact de cette lecture parce que, aussi, plus convaincu encore que les loups-garous reniflent à nos portes.
Et Stéphane, qui termine quand même sur une note d’espoir, ne m’en voudra pas de dévoiler un petit bout de la dédicace qu’il me fit de son ouvrage : "Il faut espérer pourtant que tout ceci relève plus de la fiction que de l’anticipation."
Je joins évidemment mes espoirs aux siens.
Mais il n’y a plus vraiment de temps à perdre.
* Les régimes autoritaires d’avant la dictature universelle
10:24 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature | Facebook | Bertrand REDONNET
Commentaires
On n'y arrivera pas avec une seule vie.
On n'y arrivera pas avec une seule vie à ajouter des lectures :
"Le Coffret" de Stéphane, "Tu devrais voir quelqu'un" d'Emmanuelle Urien, "Nord absolu" de Fabrice Lardreau ; Thomas Vinau ; Manu Causse
à des lectures.
Celles en cours: (presque) tous les livres de Sylvie Germain qui vient à Tarbes en mai 2010, Jean-Louis Kuffer -lecture permanente de ses livres, comme d'autres lisent la Bible-, Olivier Bordaçarre, Philippe Lafitte, Henri Béraud, James Lee Burke, Marie-Hélène Lafon, Bertrand Redonnet, et je ne mentionne pas les oeuvres électroniques.
Il faudra bien pourtant.
Écrit par : Michèle | 03.11.2009
Je note que j'arrive en dernière position....
Mais ça me rappelle un copain boxeur qui n'avait jamais gagné un seul combat..Alors il se vantait malgré tout, les soirs de mélancolie et de vague à l'âme, d'avoir tout de même fini deuxième à chaque fois.
Hiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!!!
Amicalement
Écrit par : Bertrand | 03.11.2009
Il semble que ce "coffret" ai sur les autres livres une priorité d'urgence. Votre article m'a en effet convaincu de le lire rapidement.
Écrit par : Rodrigue | 03.11.2009
J'ai bien aimé ce livre qui propose des pistes de réflexions et incite à la lecture de grands textes, tout en nous menant dans une intrigue mien menée.
Écrit par : sylvie | 03.02.2010
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