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29.10.2009

Spleen

photo_1208522524555-3-0.jpgLe cœur, lui, n’a jamais de stratégie.
Ni de projets, ni d’anticipation. Il éclate sa lumière ou déverse son venin avec sa logique autonome.
La tête, elle, n’appréhende le monde qu’au travers ses volontés, ses velléités et ses dogmes, ces derniers fussent-ils même libertaires.
J’entends par "monde" aussi bien les rivières, les prés, les fleuves, les forêts, les oiseaux, le temps qu’il fait, les autobus, les gares, les cités, les bouts de ferraille immondes du désordre urbain, les ponts…. que le regard humain qu’on porte à l’autre, l’estime ou l’amour ou l’amitié ou le mépris dont on le gratifie, une femme aimée emportée par des torrents d'orgasmes ou  alors, les jours où Cupidon s'en fout, lamentablement échouée sous la tristesse d'une réalité obstinément standard.
J’appelle  "monde" le chemin que se fraient ensemble ma tête et mon coeur  dans le dédale de la pauvreté des hommes de petite condition, la lâche, pusillanime et prétentieuse fourberie des hommes-collabos de la moyenne, le hold-up permanent de ceux de grande condition et la misère* de tous confondus.
Je ne sais pas où ira ma tête dans ce capharnaüm du déclin universel, admis et consenti par tous, ma pauvre carcasse comprise. Je sais cependant où elle voudrait aller, parce qu’elle est une tête qui ne tient  compte du réel que par l’image du coeur qu’elle en reçoit.
Je ne sais pas où va mon cœur non plus  parce qu’il est un cœur. Mais je sais où ma tête ne voudrait  pas qu’il aille.  C’est-à-dire que je ne sais rien, finalement, de leur synthèse : De ce moi entier et qui a commencé de m'être volé par une inscription à l’état civil sous le nom de Bertrand Redonnet, acte de naissance numéro 068, commune 038.
Je ne sais rien.
Comme toi, comme vous, comme nous.
Nos cris sont ceux de prisonniers qu'on égorge.
Parce qu'il n’y a que la synthèse qui vaille la peine d'être vécue et si l’une de ses thèses est malade de la peste, l’autre a forcément le choléra.

Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point, nous faisait-on réciter au catéchisme des initiations philosophiques. Affligeant aphorisme qu’on répète comme un con quand on a vingt ans et pour faire croire qu’on est intelligent mais dont on s’aperçoit très vite, si on l’est devenu un tant soit peu, qu’il renferme les premiers principes de la séparation de l’individu en deux entités contraires et combattantes, c’est-à-dire qu’il en fait un parfait aliéné, un malheureux, un fin prêt à être dominé, gouverné, culpabilisé, christianisé.  Un lâche
corvéable et taillable à merci.
Mais y a t-il autre chose chez Pascal qui puisse servir aux hommes à se sentir autrement que des larves ?
L’invention de la calculette et des transports en commun, peut-être…

* Considérée sous ses trois aspects, économique, intellectuel et sexuel tels que magistralement mis au jour par la brochure de Strasbourg, 1967.

11:19 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Voilà un petit accès de spleen qui me parle bien, en tout cas !

Écrit par : stephane | 29.10.2009

Ah, quand on disait qu'il fallait attendre l'automne pour écrire. L'automne nous rend tous lucides (enfin... certains en tout cas) car c'est à ce moment que la nature nous montre sans mentir où nous allons.

Écrit par : Feuilly | 29.10.2009

"Transports en commun & femme aimée emportée par des torrents d'orgasme..." : ce relevé comme un sourire de lectrice pour saluer un grand texte.

Écrit par : Michèle | 30.10.2009

Les commentaires sont fermés.