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31.08.2009

Entre Sète et Montpellier

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Solko revient de Sète et, de cette villégiature ensolleillée, nous ramène quelques réflexions sur sa lecture de Michelet confrontée au spectacle affligeant des gros estivants vautrés dans le sable fin des plages, sur Valéry, sur Brassens, sur les gens qu'il a croisés, à la recherche notamment de la tombe de l'un sur la sépulture de l'autre.
La lecture de ces deux succulents billets me remet en mémoire cette anecdote.

Sur le même ton. Avec le même sourire désabusé.

Un soir de novembre 2001, je jouais Brassens pour une association, « De l’Aunis à l’Oural ». Deux jeunes guitaristes russes, étudiants de l’université de Moscou, participaient au spectacle.
Ils avaient, en première partie si j'ose dire, joué du rock pour le moins peu convaincant, puis, se ravisant avec bonheur, des chants traditionnels russes d'une implacable beauté. Ils avaient une voix superbe.
Je les avais préalablement invités à participer à mon répertoire et je les avais accompagnés sur « Dans l’eau de la claire fontaine. »
Un moment inoubliable.
Si ce n’est avant le concert, au restaurant,  une discussion sur la Tchétchénie, que j’avais eu la maladresse de provoquer, et qui m’avait fait froid dans le dos. Tout musiciens que nous fussions, nous ne voyons pas exactement les choses de la même façon, c’est le moins que l'on puisse dire.
Bref, là n’est pas, aussi grave soit-il, mon propos.

Au cours de ma prestation, j'avais évidemment parlé de Brassens, de son oeuvre, de sa vie, de Sète...

A l’entracte, un  gros gars était alors venu me trouver, un géant, la moustache généreuse retombant en halliers sur des lèvres sanguines. Nous sirotions du vin chaud, accoudés au rustique comptoir d'une buvette approximative installée  au fond de la salle.
Le gars me surpassait d’au moins deux têtes et je devais me tordre le coup et lever la mienne pour n’apercevoir finalement de mon interlocuteur qu’une grosse pomme d’Adam quelque peu velue.
- Ah, c’est bien ! Bravo !  Je voulais vous féliciter…Et de sa main large comme une enclume, il me rudoyait amicalement l’épaule. Mais vous vous êtes trompé, pour Sète, poursuivit-il, goguenard.
- Ah ? C’est possible…
Je revenais justement de Sète où j’avais été invité pour le vingtième anniversaire de la mort du Poète et peut-être avais-je commis une erreur de date ou de lieu.
Le gros gars benêt, là, planté devant moi, avait l’air sûr de son fait et, bien qu’il fût d’aspect débonnaire, ses mensurations étaient de nature à refroidir toute velléité de controverse. J'étais donc tout disposé à convenir de la présence d'une légère entorse dans mes commentaires.
- Oui, déclara t-il,  Brassens était de Montpellier.
J’étais soudain amusé par ce gros bonhomme et sa non moins grosse erreur.
Je lui souris.
- Ah non, Brassens est né et repose à Sète.
-Non, non, j’vous dis. Je suis chauffeur routier. Alors, vous savez, du pays, j’en vois et quand je passe à Montpellier, je m’arrête toujours sur sa tombe. Parce que Brassens, ça fait plus de trente ans que je l'écoute et c'est pour moi... etc…etc.

Je baissai les bras et, in petto,  me  dis que ce Monsieur, dans son rude métier, devait souvent se tromper de route… ou de client.
Voire, dans le privé,  de tombe ou d’enterrement.
C’était avant la vulgarisation du GPS, c’est vrai, mais tout de même...

Et je suis remonté sur scène un peu désabusé. Un peu démotivé aussi

09:49 Publié dans Brassens | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Excellent !

Écrit par : solko | 31.08.2009

Merci pour cet éclat de rire!

Écrit par : La Zélie | 31.08.2009

Il aurait bien fait de tourner sète fois sa langue dans sa bouche, ce brave routier...

Écrit par : Feuilly | 01.09.2009

Les commentaires sont fermés.