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22.10.2008

The place to be et la Cour des miracles

pomme.jpegLa Pologne joue les grandes. Les grandes puissances libres et libérales, influente au cœur de cette bouffonnerie économico-financière qu’on appelle l'Europe.
Elle joue les grandes et bombe avantageusement le torse.
Je la comprends.
Quand on est un pays totalisant 40 ans de liberté seulement depuis Louis XV et Voltaire et que tout d’un coup on se fait riche et à la presque hauteur de ses grands voisins, qu'on a son mot à dire sur tout et son contraire, on perd le sens de la mesure.  Surtout celle de l’humain.
Abasourdie par 50 ans d’apathie collectiviste (salut à vous, vaillants communistes de France et d’ailleurs), on se jette à corps perdu dans ce qui semble être le chemin exactement inverse. Comme un mineur prisonnier des ténèbres de l’éboulement se jette sur le premier soupçon de lumière entrevu, celui-ci dût-il déboucher en enfer.

Alors ça construit, ça vend, ça échange, ça consomme, ça démolit à coups de bulldozers et ça élève à coups de grues des buildings/bureaux sur lesquels viennent se percher les grands vautours de l’espèce humaine réduite à son économie.
Le bonheur tel un charnier. The place to be.
Les journaux gloussent de plaisir et les revues - parfois françaises - n'ont de cesse que de dessiner et redessiner la croissance par un trait rouge qui monte, qui monte, qui monte, comme une bite prise d'érection débridée.
Le soleil brille. Y’a du fric dans les tuyaux branchés sur le ventre de Bruxelles et qui arrosent copieusement l’euphorie de la renaissance.
Quand les bourses du monde entier se dégonflent une à une, quand elles se font apparemment ce qu'’elles sont essentiellement, c’est-à-dire les baudruches d’un système conçu comme un jeu de hasard, les testicules de la Pologne restent puissamment gonflées. Toujours disposées à éjaculer de la richesse marchande plein la gueule de ses thuriféraires. Ou le cul, ça dépend dans quelle position on veut servir la grand messe du triomphe de la pacotille.

Mais je ne suis pas Polonais et j’ai déjà vu jouer ce bal vampirique. Deux atouts majeurs que je détiens là pour voir l’envers du décor.

Les couloirs des hôpitaux sont des Cours des miracles où s’entassent dans une attente anxieuse à la fois cent, deux cent, trois cent personnes atteintes de la plus terrible des maladies, celle qui vous bouffe, qui un poumon, qui un rein, qui la gorge, qui la tête, qui le nez, qui les seins,  qui les couilles, qui le tout à la fois.
Dans cette cohue immonde du désespoir, une femme sur son brancard, comme oubliée là, ne voit déjà plus rien et ses yeux blancs vacillent du plafond aux passants claudiquants, difformes, glabres, exténués.
Le service public ? Honni. Ca rappelle trop l’histoire récente. Tout aux mains de l’Etat, tout aux mains de bureaucrates avides et sans scrupules. Le peuple réclame qu’on s’occupe des maladies qui le tuent.  Le libéralisme répond qu’il est d’accord, qu’on va faire du fric avec tout ça, qu’il a pas le temps de subventionner ces niaiseries, qu’il a des routes, des ponts et des autoroutes à faire, parce qu’avec des routes, des autoroutes et des ponts on fait du commerce qui jute, alors qu’on va privatiser tout ce bordel….
Dehors, les feignants fonctionnaires qui vous laissent quatre heures ou cinq heures vautrés dans les couloirs comme des chiens à lécher vos souffrances et vos blessures !
Le peuple souffreteux applaudit des deux pattes.
Je gage cependant que le remède sera bien pire que le mal. Déjà, dans cette foule cacochyme aux abois et qui s’accumule dans la chaleur fétide des couloirs, je vois bien que les visages sont des visages d’ouvriers, de paysans, de coursiers, de facteurs, d’employés de grands magasins.
Les visages résignés de la plèbe.
Les grands de ce monde, eux,  doivent emprunter d’autres couloirs, frapper à d'autres portes. Capitonnées.
La main sur le cœur, je veux dire dans la poche intérieure de leur veston, là où palpitent, quoique discrets, des écus sonnants et trébuchants,  fruits de la croissance.

Mais quoi attendre d’autre des hommes, qu'au final je me dis ?
Depuis que nous sommes des hommes, nous n’avons pris jouissance qu’à la source de nos propres erreurs.
La Pologne, comme sans doute tous les pays d’Europe centrale, s’est jetée dans la gueule d’un loup qu’elle voyait, depuis son enclos, depuis son rideau de fer, comme un agneau batifolant dans la libre prairie.

Une neige furtive, un vol des grands oiseaux de novembre, le sifflement batailleur d’un merle dans les halliers d’avril, m’auront finalement plus donné que toutes les suffisances humaines.

14:14 Publié dans Critique et contestation | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Depuis qu'un empereur l'avait fait consul, le hongre se prenait pour un étalon.
Cette phrase a l'allure d'une maxime, mais elle n'a aucun sens: la Pologne n'est pas la Hongrie, et vice-versa.
Un gars de l'est qui est(un tout petit peu)à l'ouest.
DM

Écrit par : denis montebello | 22.10.2008

Si tu fais allusion au fromage de chèvre (Ser Kosi en polonais) tu te souviens que je t'ai parlé aussi de cette fable : Le mulet se vantant de sa généalogie:
Ecoute :

Le Mulet d'un prélat se piquait de noblesse,
Et ne parlait incessamment
Que de sa Mère la Jument,
Dont il contait mainte prouesse.
Elle avait fait ceci, puis avait été là.
Son Fils prétendait pour cela
Qu'on le dût mettre dans l'Histoire.
Il eût cru s'abaisser servant un Médecin.
Étant devenu vieux on le mit au moulin.
Son Père l'Âne alors lui revint en mémoire.

Quand le malheur ne serait bon
Qu'à mettre un sot à la raison,
Toujours serait-ce à juste cause
Qu'on le dit bon à quelque chose.

Bises

Écrit par : B.redonnet | 22.10.2008

Ils font aussi du fromage de chèvre, chez Président?

Écrit par : denis montebello | 22.10.2008

Ah très bon ! Ta réplique, j'veux dire...Parce que chez Président, enfin tu vois ce que je veux dire, ce serait plutôt de la bouillie pour les chats...Hiiiiiiiiiiiiii !!!!!
I'm font marrer avec leur crise à la con...I font le coup tous les 10 ans à peu près...Histoire que les jocrisses qui tombent dans le panneau, dans un sursaut de civilité servile, se serrent un peu plus la ceinture...
I font un semblant de crise, le contribuable par la main généreuse du fromage de chèvre les renfloue, et hop, c'est reparti pour un tour...Le mieux, tiens, c'est de pas être contribuable du tout

Écrit par : B.redonnet | 22.10.2008

Si je comprends bien, en fait la Pologne ne pourra se considérer comme un pays économiquement au niveau de l'Europe lorsqu'elle fera une crise financière tous les dix ans. Peut-être perdra-t-elle ses complexes.
D'accord avec le coup des dix ans et on pourrait s'interroger sur la valeur symbolique de la décennie.
J'aime beaucoup le côté impertinent de votre texte...

Écrit par : Rosa | 22.10.2008

Ah, non alors, je ne dis surtout pas ça !
En substance, ce texte déplore simplement l'orgueil éhonté du nouveau libéralisme polonais confronté à l'abandon d'un service essentiel, celui de la santé publique.
L'euphorie actuelle ne semble pas encore atteinte par la crise mise en spectacle par le système, ses valets et ses contestataires officiels,complices, contestataires nourris du système et qui sans lui n'existeraient nulle part (syndicats, PS, PC et tutti quantti). C'est de la dialectique primaire.
Ca amuse la galerie, ça nourrit les conversations au Café du commerce.
De surcroît,j'aimerais bien que la Pologne n'accède jamais au rang des grandes puissances, rang qui partout dans le monde a fait la preuve de son incapacité à procurer le bonheur du plus grand nombre.
J'eusse aimé que les pays d'Europe centrale empruntent une autre voie que celle de nos veules conneries.
J'espère que la confusion est levée.

Écrit par : B.redonnet | 23.10.2008

Hélas, les pays de l'Est sont pour Bush la "nouvelle Europe", celle qui le suit dans ses guerres. Et cette nouvelle Europe adore qu'on la caresse dans le sens du poil.
Enfin, on ne va pas venir faire de morale. Depuis Sarkozy, la France rattrape son "retard" dans son rôle de valet des USA. Voir notre présence en Afghanistan.

Écrit par : Feuilly | 23.10.2008

Vrai Feuilly, mais ça n'est pas si simple.
Les USA manipulent avec dextérité le juste ressentiment des pays de l'Europe Centrale vis à vis de la Russie et du vieil occident qui les a lâchement vendus à Hitler d'abord (1938) et à Staline ensuite (17 septembre 1939 et 1945 Yalta).
Les Français seraient bien inspirés de ne pas porter de jugements hâtifs, eux qui n'ont pas encore digéré complètement les guerres de Cent ans avec la perfide Albion, qui ont connu avec le PCF le parti le plus stalinien d'Europe et qui ont élu à leur tête le Président le plus corrompu depuis les Républiques bananières !
Ce que je déplore, c'est donc cette manipulation. Mais déjà, des murmures s'élèvent et la défiance envers l'oncle Sam pointe son nez.
Patience...

Écrit par : B.redonnet | 23.10.2008

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