UA-53771746-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

09.11.2016

Re, oui, "Re"

20161107_130147.jpgSur mon lit d’hôpital…
La fenêtre donnait sur une broussaille, des halliers aux multiples essences, rabougries, et j’avais sur mes genoux posé l’ordinateur… Des mésanges furtives, un gros geai vindicatif, des feuilles mortes en train de mourir un peu plus, aussi.
Bref, un monde à mille mondes du mien.
Je voulais écrire, j’avais envie d’écrire, j’avais envie de dire, mais sans fuir. Dire l’ici et le maintenant.
Vaine aspiration !
Je l’ai souvent exprimé, sans prétendre pour autant à l’indiscutable vérité : la littérature, comme tous les arts,  est d’abord représentation du réel ; elle chante les traces et les empreintes  et  je ne la crois pas capable, quand elle n’a pas jailli de la plume d’un Isidore Ducasse, de plonger directement dans les tripes de la détresse pour raconter à cet étrange camarade qu’est toujours un lecteur.
Est-ce à dire que Lautréamont n’était pas un littérateur ?
Je me garderai bien de lancer une aussi studieuse problématique et renverrai au texte de Raoul Vaneigem, Isidore Ducasse et le comte de Lautréamont dans les Poésies -1956 -  qui s’ouvre ainsi : «Lautréamont est entré par la voie de Maldoror dans l'histoire  littéraire, et cela, avec une maîtrise telle qu'Isidore Ducasse, l'auteur des Poésies, lui est presque redevable de n'en être pas exclu.»
N’est-ce pas assez dire ?
Pour mézigue, donc, l’écriture est la queue flamboyante de la comète. Elle jaillit et éclaire le ciel après le passage de l’étoile, quand celle-ci a pris l’indicible direction de l’invisible.
Dès lors, comment, et surtout pourquoi, vouloir dire ce lit d’hôpital où j’étais en train de renaitre doucement ? De reconstruire morceaux par petits morceaux tout ce qui s’était fracassé  le 27 septembre ?
Ce jour-là, une Dame de l’art, plongeant son microscope et son regard au fond de ma gorge, avait simplement formulé : ce que je vois ne me plaît pas du tout.
La terre, cette bonne vieille terre, sous mes vieux pas de terrien, venait de s’éventrer.
Je savais, depuis toujours, le séisme possible… Je l’avais conjuré en le faisant  improbable.
La  suite a ressemblé à toutes les suites que s’offrent l’angoisse, la peur, parfois même la terreur et l’épouvante. 

Aujourd’hui, j’ai des larmes dans mes yeux parce que je pense à tous ces gens, hommes ou femmes, infirmières, docteurs, médecins,  professeurs, d’une autre langue, qui, tous, de Biała à Lublin en passant par Poniatowa et Varsovie, se sont penchés sur mon mal, la main et le cœur fraternels :
- On va vous tirer de là. Ne paniquez pas...
Comme si c’était ça être un homme ou une femme ! Comme si ça coulait de source de soulager l’autre de sa peine et de son effroi ! Comme si nous étions faits pour nous soutenir les uns les autres, sans ambages, discrètement, à la barbe d’un monde où seuls les égoïstes, les vauriens, les accaparateurs, les  lâches, les menteurs, les patelins et les filous ont droit à la reconnaissance de la cité !

- On va vous tirer de là. Ne paniquez pas...
Sans rien demander en retour, qu’une poignée de main, un sourire, une plaisanterie, un regard amical…

- On va vous tirer de là. Ne paniquez pas...
C’est  toute la littérature que je puis donner de ce vécu du désastre. Mais quelle littérature !
Ecoutez plutôt : Dziękuję ! Merci ! Merci à vous, incomparables frères humains ! 

Il neige aujourd’hui, première neige, premiers pas dans l’hiver qui se blottit au coin des feux, qui passera sa main sur l’échine des tourments pour les calmer, les apprivoiser, empêcher qu’ils ne s’égarent à vouloir mordre.
Et les chemins,  je le vois bien, qui grimpent déjà vers d’autres saisons.

13:35 Publié dans Acompte d'auteur | Lien permanent | Commentaires (7) |  Facebook | Bertrand REDONNET

Commentaires

Vous êtes donc de retour, cher Bertrand - et bien portant, si j'en juge par cette écriture pleine de verve.
Nous n'en doutions pas. Comme nous ne doutons pas que chaque jour à compter d'aujourd'hui vous apportera son lot de bonne et saine rémission. En amitié. M.

Écrit par : Marc V. | 09.11.2016

Et c'est plaisir que de vous retrouver là, Marc.
C'est vrai que j'ai été touché par la sollicitude et la gentillesse des personnels soignants et Docteurs polonais.
C'eût été en France que c'eût été sans doute la même chose. Je n'en sais rien. Mais là, la différence, le langage autre, rendent encore plus sensible à la solidarité exprimée.
Ce fut en tout cas, le cas...

Écrit par : Bertrand | 09.11.2016

Bon, alors puisque tu aimes les langues étrangères : welcome !

Écrit par : stéphane | 10.11.2016

Et c'est en quelle langue, ça, mon vieux Stéphane... Connais pas.
Mais c'est vrai qu'on peut pas tout connaître :))

Écrit par : bertrand | 10.11.2016

Re!

Écrit par : solko | 11.11.2016

Eh bien, voilà une bonne nouvelle !

Écrit par : Sophie | 12.11.2016

Disons une nouvelle "moyenne" car évidemment il me va falloir être patient.
Merci beaucoup, Sophie....

Écrit par : Bertrand | 13.11.2016

Les commentaires sont fermés.