23.06.2012
C'est sans doute comme ça
Longtemps, nous avons regardé le monde avec l’œil de la prétention à le changer. Cette génération - née grosso modo entre 1945 et 1960 - a eu cette fatuité de se croire en effet la génération élue pour mener à bien cette glorieuse entreprise. Avant de s'apercevoir - un peu tardivement parfois - que toutes les générations avant elle avaient eu la même et ridicule ambition.
Laquelle fait dire pas mal d’inepties et même commettre pas mal d’actions comme autant de coups d’épées données en eaux troubles.
Car le monde se fout bien des postillons et des postillonneurs comme de Colin-tampon. Quelquefois même, pour un petit coup reçu, un peu plus appuyé et énervé que les autres, il vous balance un savant uppercut qui vous met K.O pour un bon bout de temps.
Il a sa logique que la logique ne comprend pas, le monde. Il a aussi sa longévité, son immensité et sa complexité que l’éphémère, la petitesse et la simplicité de l’individu n’entrevoient que très partiellement mais, hélas, toujours de façon fort péremptoire.
Le recul et la sagesse commandent donc, - si tant est qu’on ait pris la ferme résolution de ne pas mourir un jour aussi con qu’on a vécu - de revoir toutes ses prétentions révolutionnaires à la baisse et surtout, dans la solitude des petits matins clairets, d’imaginer, sourire aux lèvres, cinq minutes seulement, ce que nous aurions fait de mieux dans un monde supposé meilleur.
Si on n’est pas définitivement pourri au point de mentir même dans un face à face intime, (ou trop con pour se comprendre vraiment tel qu’on est) la réponse tombe, limpide : rien. Absolument rien. Parce que nous ne connaissons rien aux implications, aux engrenages des sociétés et surtout aux désirs profonds des hommes qui cohabitent avec nous sur la grande boule bleue. Nous supposons tout ça. Nous le supposons ex cathedra. Parce que, aussi, notre vide et notre impuissance sont à l’intérieur, tout comme notre puissance et notre volonté de vivre.
Dès lors, accuser le canevas social du monde, son organisation, ses injustices, son immoralité, ses guerres, ses embrouilles, de notre tristesse et de nos échecs, c’est accuser, pour une bonne part, le miroir quand il nous renvoie une gueule que nous voudrions plus belle. C’est se dédouaner de soi et on comprend bien qu'il est plus facile de chercher la clef de son énigme sur des manifestations extérieures - auxquelles nous ne participons pas sinon par une vaine parole - plutôt que dans ses propres dispositions à vivre, dans sa propre éthique et dans ses propres désirs.
Le comble est alors de briser le miroir. Plus de sale gueule en face !
Mais le passant qui vous croisera dans la rue l’instant d’après vous trouvera toujours aussi moche.
Image : Philip Seelen
09:04 | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | Bertrand REDONNET
Commentaires
Et toc ! C'est de qui, la face désolée accrochée au mur ? De Rouault, ou bien ?
Écrit par : La petite souris | 23.06.2012
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